Tales of Graces F
7.1
Tales of Graces F

Jeu de Namco Tales Studio et Namco Bandai Games Inc. (2010PlayStation 3)

Spoilers présents, à vos risques et périls.

En fait Tales of Graces F, c’est un jeu auquel j’aurais aisément mis un bon gros 8 il y a quelques heures. Le problème, c’est que plus le jeu avance, et plus il s’invente des défauts en retournant dans les clichés et dans les facilités du J-RPG qu’il parvenait pourtant à éviter si habilement jusque-là. Mais commençons par le commencement.

Dans ce jeu, vous incarnez Asbel Lhant. Grosso modo, un sale gosse qui n’en fait qu’à sa tête malgré son statut, et qui finit par vivre une expérience traumatisante dans sa jeunesse. On le retrouve ensuite sept ans plus tard, et là, à la place de cette mauvaise éducation, il a pris les gros stéréotypes du héros typique d’un J-RPG, à savoir l’envie obsessionnelle de protéger ses amis et de devenir plus fort. Bon OK, je trolle un peu, mais le personnage reste bloqué le cul entre deux chaises, et même si il est plutôt cool niveau design, et parfois attachant, ça ne vole jamais bien haut et je n’ai jamais vraiment eu une affection intense pour lui. Ce n’est donc pas le jeune Lhant qui va remplacer un Yuri de Shadow Hearts dans mon cœur, clairement pas.

Mais le reste de la team n’est pas épargné non plus de ces clichés (qui peuvent être parfois bien utilisés, je ne dis pas le contraire), et l’on retrouve la sempiternelle amie d’enfance secrètement amoureuse (mais ça se voit comme le nez au milieu de la tronche), la fille amnésique, la fille bizarre qui vient en fait d’une civilisation oubliée, le vétéran de guerre trop d4rk, le binoclard prétentieux, et le compte est bon ! J’ai particulièrement accroché au personnage de Pascal, mais les autres m’ont semblé un peu désuets et pas suffisamment originaux que pour être foncièrement intéressants. Certes, Sophie est attachante, mais le personnage finit par tourner en rond une fois certaines révélations faites. Et le comportement non évolutif d’Asbel et non compréhensif par rapport à sa nature finit par être agaçant à la fin, tant ça finit par se répéter dans les cutscenes.

Et c’est pareil pour le scénario ! Ca partait tellement bien, avec ce conflit géopolitique bien pensé, avec ces révélations sur l’autre côté du monde pas si méchant que ça, et avec Richard qui pète un câble en devenant dirigeant. Ca partait franchement du bon pied. Mais voilà, tout est foutu en l’air par l’excuse du grand méchant ancestral qui a en fait pris le contrôle de Richard, et du coup, ben il est juste méchant parce que c’est comme ça, et non pas à cause d’une paranoïa du pouvoir ou à cause d’une profondeur qui aurait pu exister pour ce personnage.

Ainsi, tout le postulat de base si bien travaillé se fait COMPLETEMENT annihiler par une histoire bidon vue cinquante fois dans l’histoire des jeux de rôle japonais, et même si le grand méchant est parfois bien travaillé (notamment dans le dernier donjon), il n’a quand même que des motivations débiles, clichées, et rien que le dernier dialogue avec Asbel le prouve magnifiquement bien. Alors certes, l’ending (bien que trop happy end) n’est pas encore foncièrement mauvaise, mais ça aurait pu être tellement mieux, tellement. Rien que pendant la fin, j’avais imaginé 4 autres endings toutes bien plus émouvantes et crédibles que cette fin où finalement l’impossible est possible, et où finalement « ah ben oui, tout le monde peut être heureux en fait, suffisait de faire ça lol ».

Le problème, c’est que ce constat de ratage au-delà d’un certain point du jeu, il s’applique un peu pour tout. Le système de combats par exemple, finit par s’essouffler un peu, et même si l’on s’émerveille de sa complexité au début, on finit par s’en lasser au bout de plusieurs dizaines d’heures, car les batailles finissent par se ressembler et n’offrent finalement plus de grandes particularités qui auraient permis d’éviter cet ennui. Le bestiaire est par ailleurs assez fade, avec des ennemis insipides qui reprennent des formes ou des idées réelles (un ennemi en forme d’arc par exemple), mais qui ne parvient jamais vraiment à exister en tant que tel, au contraire par exemple d’un gluant dans un Dragon Quest qui arrivait à provoquer un attachement chez le joueur.

On peut aussi parler des donjons, qui sont des calamités à parcourir, tant ils sont de la durée de vie artificielle. Ainsi, dans la plupart d’entre eux, la structure de base se répète sans cesse, jusqu’au boss. Par exemple dans un donjon, j’avais la structure couloir – grande zone – couloir avec ascenseur pour descendre au niveau suivant. Et ça s’est répété comme ça pendant 4 longs étages … Alors oui, on trouve parfois dans ces donjons des petites énigmes, mais soit elles sont complètement bateau, soit elles sont frustrantes et obligent à faire des allers-retours usants dans un level-design qui l’est tout autant.

De quoi parler d’autre ? On peut évoquer l’OST, qui est assez triste, car malgré un thème XMB et un menu principal poétiques, elle ne propose que des thèmes passe-partout qui ne resteront pas en mémoire, en dehors du sad theme et en dehors d’une musique d’ambiance de donjon qui m’a particulièrement plue. Les graphismes sont assez tristes, même en tenant en compte que c’est de la Wii. Certes la patte artistique est parfois tout d’un coup bluffante, mais la plupart du temps ça reste faible, que ce soit les textures unies ou que ce soit certains intérieurs franchement dégueulasses (le donjon du château). On peut citer Fodra qui relève un peu le niveau, même si faire une planète proche de celle du jeu qui copie/colle l’image qu’on se fait de Mars (proche de nous), c’est un peu triste d’un point de vue créatif.

Enfin je terminerais en évoquant la durée de vie, plus que correcte, même si c’est aussi parfois pour de mauvaises raisons, avec des combats qui tirent en longueur, avec des allers-retours incessants, ou encore avec des dialogues qui ne résument parfois pas à grand-chose. Mais malgré ces réserves, on tient ici un jeu d’une vraie longueur qui se rentabilise facilement, même si l’on s’en tient au scénario principal sans trop se coltiner les à-côtés, ce qui est parfois finalement évident tant le jeu nous empêche d’explorer, et tant on est constamment limité à une portion de la map à cause du scénario. Ici, pas d’exploration en solitaire, l’histoire vous tient par la main.

Au final ce jeu est un vrai ascenseur émotionnel. Au début, on a un peu du mal avec la partie enfant, niaise et parfois un peu gênante. Et puis, on finit par tomber amoureux, on finit par se rendre compte qu’il fallait passer par là pour bien capter l’essence du jeu et des personnages. Mais une relation se finit souvent mal, et en fait ce jeu pourtant si charmeur nous trompe avec un scénario cliché et inintéressant qui finit par prendre le pas sur notre relation qui commençait pourtant si bien ….

EDIT : après avoir terminé le fameux épilogue exclusif à la PS3, je dois avouer que j'ai bien envie de monter la note. Pourquoi ? Parce qu'un générique avec une jolie musique au piano et des artworks magnifiques qui défilent, moi ça me fait chialer, ça me prend par les sentiments. Ce prologue était drôle, plein de bonnes vannes qui font mouche (notamment chez Malik) malgré des running gag qui deviennent un peu lourds (le bain de Pascal), ou malgré le ratage de certaines scènes dans la dernière demi-heure. La grande méchante était plutôt bien trouvée, et au final, malgré des donjons toujours aussi chiants pour moi, je dois avouer que les jolies cinématiques bien narrées m'ont totalement prises par les sentiments. Et pourtant, cet épilogue n'était même pas forcément utile, dans le sens où la cinématique de fin originelle spoile déjà tout son contenu. Mais même, il y a une âme là-dedans, les personnages sont attachants, et au final, même si le jeu m'a déçu in-game, il m'aura quand même permis de retrouver des sensations et sentiments dignes des J-RPG à l'ancienne, et ça c'est magique, juste magique.
Bunzer

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9

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