The Convenience Store
5.9
The Convenience Store

Jeu de Chilla's Art (2020PC)

Les jeux Chilla's Art font figure d’ovnis dans le paysage vidéoludique. Issuent de l'imagination de deux développeurs japonais (des frères), ils ont créé une multitude de petits projets souvent très courts et expérimentaux, tournés majoritairement vers l’horreur. Ces jeux ont jusqu'à très récemment eu une présentation sommaire, visuellement c’est souvent un retour 20 ans en arrière et le gameplay ne se résume qu'avancer, reculer et cliquer sur des objets avec une interface vieillotte, mais, car il y a un mais, ici ne réside pas l'intérêt de leurs projets et ce The Convenience Store le démontre parfaitement.


Au travers de cette virée dans la vie d’une lycéenne travaillant dans une supérette en arubaito (petit boulot accessible aux jeunes étudiants japonais), on se retrouve durant trois nuits à devoir contrôler cette jeune fille et effectuer des allers retours entre notre maison et la supérette pour compléter nos tâches quotidiennes avant de passer à la nuit suivante. L’entrée en la manière est très déroutante, tant le jeu reste simpliste avec ces modèles 3D, son éclairage et son ambiance sonore sobre mais efficace, tout cela participe à apporter un sentiment de malaise dans cette vie normale de lycéenne, qui semble peu reluisante au regard de son appartement miteux. Une fois votre bento ingurgité et votre lampe en poche, vous vous frayez un chemin à travers le pâté de maison, très sombre, qui entoure votre appartement pour atteindre le konbini et faire face à votre première rencontre, celle de votre manager et son effroyable modèle polygonal.


D’emblée, ce qui m’a semblé intelligent, est que le jeu ne cherche pas à créer l’horreur dès son introduction, et ce malgré une durée de vie très courte, deux heures tout au plus en y allant tranquillement. On passera beaucoup de notre temps, au départ, à simplement exécuter les rares tâches données par notre manager durant notre première nuit de travail et ce jusqu'à la livraison d’un colis qui vous est destiné.


De retour chez vous, vous ouvrez le colis et c’est à ce moment-là que le côté horrifique se présente à vous, et que The Convenience Store commence seulement.


Je ne dévoilerai rien de plus de l’intrigue ainsi que des quelques rares moments horrifiques du jeu, l’intérêt de toute l'œuvre ne reposant qu’uniquement sur ces points là, il est important pour chacun qui souhaiterait essayer de se préserver de tout spoilers.


Sachez que si la mise en scène reste comme tout le reste très grossière et simple, Chilla's Art ont tout compris tant qu’au rythme à adopter pour coincer le joueur au moment où il ne s'attend pas. Évidemment si quelques évènements pencheront plus du côté du jump scare, dans l’ensemble l’horreur se présente sous une forme très psychologique reposant en majeure partie sur l’imagination du joueur et sa volonté d’être attentif aux détails, cette ambiance très pesante n’est pas sans rappeler quelques maitres du genre horreur psychologique dans un sens.


L’atmosphère qui s’installe dans le magasin petit à petit et les évènements déroutants qui surviennent autour du bâtiment, donnent au joueur un sentiment d'insécurité très pesant. Bien entendu tout cela ne fonctionne que si vous choisissez de ne pas briser votre suspension consentie d'incrédulité, si vous réfléchissez trop aux mécaniques du jeu, on comprend vite dès le début que les manifestations d’horreur ne pourront pas prendre une forme trop complexe et par conséquent pourraient briser toute la surprise. Cependant en ayant décidé de parcourir cette aventure tard le soir et en me fermant volontairement à toutes informations dessus, je dois bien avouer que j’ai eu beaucoup d’instants de frissons que moi même je n’imaginais pas aussi puissants malgré la simplicité apparente.


Chilla's Art comprennent parfaitement comment manipuler le joueur en l’enfermant dans des boucles de gameplay volontairement désuètes pour le surprendre plus violemment et avec intelligence au moment opportun.


Pour le prix dérisoire que vous trouverez cette œuvre sur Steam et pour l'expérience unique, par son contexte et sa forme, qu’elle m’a procuré, je conseille amplement cette virée dans la peau d’une jeune lycéenne japonaise qui range des chips tombées des étalages.


Je vous préviens encore une fois, l'œuvre est cassée et ne ressemble pas à grand chose de ce que vous avez déjà vu, mais je ne peux que recommander de passer outre ces “barrières” et de vous laisser absorber par cette mini histoire qui en plus vous donnera deux fins possibles.


Pour moi il est maintenant clair que je vais m’aventurer vers les autres œuvres du studio, en premier celle de la vie d’un employé de Starbucks en proie à des évènements encore une fois horrifiques…passionnant n’est ce pas!


Note, le jeu n'a pas de système de sauvegarde, il faut le faire d'une traite.


Note 2, le filtre VHS peut être désactivé dans les options.

Sajuuk
6
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le 17 juil. 2022

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