Rares sont les jeux qui visent aussi mal que The Last Guardian de Fumito Ueda. Par où commencer ? En dix ans de développement, on se retrouve avec sans doute l’un des pires jeux de plateforme de tous les temps, tout ça à cause d’une inertie de mouvement rendant chaque action lourde, horriblement lourde. Tu veux monter sur une rambarde ? Ton personnage va s’accrocher, glisser, puis enfin monter. Tu sautes ? Même histoire : animations excessives qui alourdissent tout et rendent l’expérience pénible.

Le principal attrait du jeu, Trico, cet animal auquel on est supposé s’attacher, devient vite une simple IA à manipuler. Il nous regarde ? On peut lui donner un ordre. Ses oreilles bougent ? Il a compris et va l’exécuter. Mais à aucun moment l’illusion ne prend vraiment.

Cinq heures d’enfer où l’on ne retire aucune satisfaction à surmonter les obstacles. Car dès qu’on bloque, la frustration prend immédiatement le relais.

Cinq heures d’enfer où, lors des moments de bravoure, on est censé ressentir une connexion avec cette IA, seule source de répit, de chaleur, de réconfort dans cet univers froid, blanc, épuré.

Tout le jeu repose sur un jeu d’oppositions : la froideur de son monde contre la chaleur de la relation Trico/Héros, la fragilité de l’enfant face à la puissance instinctive de Trico, l’hostilité des gardiens mécaniques contre la protection organique de notre créature. Même dans son dernier affrontement, The Last Guardian oppose un être vivant, un assemblage d’émotions et de faiblesses, à un monstre inerte, sans âme. C’est cette construction par contraste qui donne au jeu son identité si particulière.


On pensera à ce boss de fin, entité inhumaine, rocheuse, magique, opposée à Trico, cadavre exquis de multiples espèces. L’un n’est rien, l’autre est tout.

On pensera à ce moment final, au sommet, à profiter du paysage avec cette IA pour laquelle on pleurera, qui nous accompagnera toute notre vie, et à qui certains donneront même son nom à leur animal de compagnie.


On pensera à ce jeu qui repose entièrement sur cette opposition : un humain fragile, frêle, qui doit se débattre en appuyant frénétiquement sur tous les boutons, et cette IA, ce sauveur, pour qui un simple coup de griffe suffit à triompher des ennemis.

On est si proche d’un jeu magique. Mais pour moi, la sauce ne prend pas. Je suis pourtant un fervent défenseur du « les jeux vidéo ne doivent pas forcément être fun », mais là, cette lourdeur omniprésente est un non catégorique.

Oh, que vous allez détester cette animation d’escalade où le personnage trébuche, grimper Trico et se perdre dans ses bugs de caméra... Un problème que je pensais disparu depuis l’ère Xbox 360/PS3.

Si ce jeu est un exercice de thèses et d’antithèses digne d’une dissertation de philo, alors il mérite un 1, car il aurait voulu être un 10.



Gorz
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le 3 avr. 2025

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