Tunic
7.7
Tunic

Jeu de Andrew Shouldice, Isometricorp Games et Finji (2022Xbox One)


Oeuvre d’un seul homme, Andrew Shouldice , accompagné à la marge sur quelques aspects seulement par d’autres personnes, Tunic est un de ces jeux indépendants qui ont bien mérité son accueil critique et public lors de sa sortie en 2022. Le jeu avait été initialement annoncé pour une sortie en 2019, mais le développeur a usé tout ce temps pour polir son petit bijou.

Pourtant Tunic, d’un rapide coup d’oeil, ne pourrait être assimilé qu’à une nouvelle variation d’un vieux The Legend of Zelda, avec son héros qui bien, que renard, a de forts allures de Link avec son épée, son bouclier et les différentes accessoires qu’il va obtenir pour progresser dans sa quête.

Mais de la quête de notre héros le joueur alors ne sait rien. Bien éloigné des productions modernes qui veulent guider un joueur privé de sa liberté d’exploration, Tunic lui redonne ce merveilleux et effrayant plaisir que celui de devoir tâtonner et trouver le bon chemin. Il peut le faire grâce à une construction de l’environnement extraordinaire. Le jeu fourmille de passages, de raccourcis, de détours, de salles secrètes, parfois sous nos yeux. Les différentes possibilités sont parfois subtilement cachés par l’orientation de la caméra, avec cette vue isométrique bien utilisée et maligne, ou demanderont d’utiliser les capacités de notre renard. Rien ne semble être laissé au hasard, et s’il y a un doute, c’est qu’un secret s’y cache peut-être.

L’observation et l’expérimentation redeviennent ainsi des qualités dans Tunic. Mais il accompagne aussi le joueur d’une bien curieuse manière qui là encore touche à l’héritage passé du jeu vidéo, retranscrit avec modernité. Cryptique en jeu, le soft se dévoile un peu plus dans son manuel, consultable dans le jeu. Toutes les réponses n’y sont pas, car ses pages sont à retrouver au fil du jeu, parfois dans le désordre, et le manuel est dans une langue étrangère, qui est aussi celle du jeu. Quelques mots sont traduits, et les images peuvent permettre de comprendre ce qui est signifié. De même, ce manuel est proposé comme une version déjà utilisé, griffoné par un ancien utilisateur, ce qui se comprend mieux avec la fin du jeu.

Consulter ce manuel et le déchiffrer, mais aussi comprendre ses annotations fait ainsi partie du plaisir de jeu, laissant le joueur réfléchir mais aussi s’approprier cette ressource aux nombreux secrets, parfois sous nos yeux. Il ne serait pas étonnant qu’Andrew Shouldice ait connu ce plaisir ancien de jouer à des jeux japonais, dans une langue inconnue, dont les manuels étaient alors très illustrés, et qu’il fallait tâtonner pour pouvoir avancer dans des jeux où la compréhension de la langue était plus ou moins un obstacle.

Le jeu impose donc au joueur une certaine attention pour mieux comprendre la logique et le sens de l’univers présenté et débloquer les nœuds dans la progression en étant vigilants à la carte et au manuel. Une mécanique maligne assez bien déployée tout le long du jeu, mais dont la mécanique du secret est un peu trop poussée pour le contenu accessoire et supplémentaire, bien trop exagéré pour un joueur qui voudrait pousser l’aventure au-delà de sa fin (ou plutôt de sa « première » fin).

Tunic est donc un jeu qui demande un certain investissement, et qui l’exprime aussi par une difficulté assez relevée. Le jeu reprend les mécanique des Zelda, mais les balbutiements se paient chers. Même les ennemis basiques ne se laissent pas facilement défaire, obligeant le joueur à user avec précaution de son épée et de son bouclier ou de profiter des quelques objets secondaires mais en quantité limitée. Les affrontements demandent donc de relever les manches, et ceux contre les boss exigent de les relever encore plus hauts. L’échec fait partie de l’expérience, et il faut réfléchir et essayer pour trouver les meilleures approches. Là encore, l’exploration permettra d’atténuer les pics de difficulté, pour trouver des munitions ou des accessoires permettant notamment d’améliorer les statistiques, mais c’est l’épée à la main, la détermination et aussi l’expérimentation qui seront les meilleures armes.

Avec ses thématiques forestières, et son esthétique proche du low-poly mais sans virer trop dans le rétro passéiste, Tunic est aussi un bel enchantement pour les yeux, ainsi que pour les oreilles. Un bijou poli et faussement apaisé, avec son héros choupi, qui demande au joueur de s’impliquer sans trop l’accabler. Les solutions sont là, les victoires sont à portée, ce qui offre une immense satisfaction. Tunic est un de ces rares jeux qui demande une véritable connexion avec son public, par différents moyens habilement employés, comme ce manuel. Et qui le fait sans le prendre pour un imbécile mais en lui faisant confiance pour le comprendre.

SimplySmackkk
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 29 sept. 2022

Critique lue 636 fois

15 j'aime

9 commentaires

SimplySmackkk

Écrit par

Critique lue 636 fois

15
9

D'autres avis sur Tunic

Tunic
jujub
4

Death's door wins !

Jeux désinstallé après 8 heures à essayer de l'aimer car j'étais attiré par les références à Zelda 3.-La direction artistique semblait cool mais s'avère redondante. Toujours les mêmes modèles avec...

le 6 oct. 2022

12 j'aime

3

Tunic
lhomme-grenouille
8

Dans ta rondelle, Elden !

Oui. Oui vous avez bien lu. Oui, par ce titre, j’établis une connexion directe entre ce Tunic et Elden Ring. Oui oui, vous ne rêvez pas : j’entends bien comparer dans ma critique ce jeu tout mignon à...

le 20 nov. 2022

10 j'aime

8

Tunic
Dfez
10

Non, ce jeu n'est pas zelda x dark souls (petite review du "vrai" jeu sans spoil)

Lorsqu'on cherche des informations sur Tunic, on tombe trop souvent sur des descriptions journalistiques douteuses à base de "le zelda-souls indé !". Autrement il ne reste que des spoil, qu'il faut...

Par

le 27 juil. 2023

7 j'aime

2

Du même critique

Calmos
SimplySmackkk
8

Calmos x Bertrand Blier

La Culture est belle car tentaculaire. Elle nous permet de rebondir d’oeuvre en oeuvre. Il y a des liens partout. On peut découvrir un cinéaste en partant d’autre chose qu’un film. Je ne connaissais...

le 2 avr. 2020

49 j'aime

13

Scott Pilgrim
SimplySmackkk
8

We are Sex Bob-Omb and we are here to make you think about death and get sad and stuff!

Le film adaptant le comic-book culte de Brian aura pris son temps avant d'arriver en France, quatre mois après sa sortie aux Etats-Unis tandis que le Blu-Ray est déjà sur les rayons. Pourquoi tant de...

le 5 janv. 2011

44 j'aime

12

The King's Man - Première Mission
SimplySmackkk
7

Kingsman : Le Commencement, retour heureux

En 2015, adaptant le comic-book de Mark Millar, Matthew Vaughn signe avec le premier KingsMan: Services secrets une belle réussite, mêlant une certaine élégance anglaise infusée dans un film aux...

le 30 déc. 2021

39 j'aime

12