Xenogears
8.4
Xenogears

Jeu de SquareSoft (1998PlayStation 3)

Un jeu prometteur, vivement la beta !

Donner son opinion sur un jeu aussi vieux et considéré comme culte est un exercice délicat. Comment occulter 15 ans d'histoire du jeu vidéo qui, titre après titre, a rendu injouable et obsolète le catalogue de notre enfance ? Comment répondre aux attentes des amis fans qui m'ont offert ce jeu ? La pression est grande.
Effecutons un petit voyage dans le passé pour apprécier l'œuvre dans son contexte et ainsi éviter des comparaisons inappropriées. Nous voila en 1998, Xenogears sort après le triomphe de Final Fantasy VII et dans l'ombre de sa suite (autant dire que les références du moment sont pour le moins élevées). Squaresoft est au sommet de sa forme et le monde patiente nerveusement dans l'attente du prochain chef d'œuvre de l'éditeur japonais.

Visuellement, Xenogears m'a été décrit avec ces mots : "c'est une bouillie de pixel...". Après quelques minutes de jeu, je ne pouvais qu'acquiescer. Cependant, la description ne s'arrêtait pas là : "... mais le jeu est magnifique !". Et effectivement, c'est la cas. Le jeu est à mes yeux tout simplement superbe et propose une vraie évolution par rapport au savoir faire de l'époque. L'équipe de développement a effectué un choix audacieux : faire l'inverse de ce qui a fait le succès de Final Fantasy VII. Elle a donc optépour des personnages en 2D et des décors en 3D. Ainsi sont contournés tous les problèmes inhérents à l'animation (un sprite et quelques frames suffisent). Les décors quant à eux fourmillent de détails. Squaresoft démontre ici sa force de production. Je n'ai d'ailleurs jamais vu un JRPG avec autant de salles inutiles et inutilement sur-détaillées (que ce soit sur les textures, les objets décorant les pièces etc.). Avoir un décor en 3D a aussi permis à l'équipe de tester de nouvelles méthodes de mise en scène (travellings, plongées, contre-plongées etc.). Le character design, bien que proche des standards de l'animation japonaise est plutôt inspiré. Le jeu propose aussi un mélange entre cinématiques 3D (toujours plus belle et esquivant intelligemment le rendu 3D de personnages) et des séquences animées. Ces dernières sont de bonne qualité mais ne suivent pas toutes la même charte graphique (la séquence d'introduction étant bien différente du reste, car produite par un autre studio - studio IG). Elles sont aussi trop peu nombreuses pour s'intégrer correctement dans le déroulement du jeu. J'aurais voulu passer sous silence l'indigente version anglaise mais entre le jeu d'acteur inexistant et l'absence d'effort sur le lip-sync, je me suis retrouvé à prier au début de chaque séquence pour qu'aucun personnage ne parle.
En plus de l'aspet visuel, Xenogears s'impose avec brio sur la musique. Mitsuda compose ici une OST d'une qualité rare, très cohérente, mais malheureusement bien trop courte. On est loin des quatre cds d'un Final Fantasy. Cela se ressent par une certaines répétitivité dans les thèmes ainsi que parfois dans des utilisations inappropriés de ceux-ci.

La grande force du jeu est surtout son scénario. Celui-ci est excellent, complexe (parfois un peu trop, sans raison) mais la narration déçoit. Si bien sûr ce point est symbolisé par le second disque, plus proche d'une visual novel que d'un RPG, c'est bien sur toute la longueur du titre que les errances de la narration sont visibles. Les ennemis apparaissent sur notre route sans que l'on sache comment, se font battre, et promettent de nous en faire voir la prochaine fois... ainsi de suite. Les grandes lignes sont écrites mais le liant est absent.

Ce jeu n'a en fait qu'un seul réel défaut, mais quel défaut ! A la lecture du titre de cette critique, et pour tous ceux ayant joué à Xenogears, cela est évident. Il s'agit simplement du jeu le moins fini qu'il m'ait été donné d'essayer. Alors que cosmétiquement le jeu est quasiment irréprochable, toutes ses mécaniques ne sont qu'à un stade de préproduction. Les idées sont là, leurs tests ont commencé mais rien n'est assemblé, équilibré, et malheureusement aucun compartiment du jeu n'est épargné.

Le gameplay en combat est pourtant innovant. Derrière leur apparente similitude, les systèmes de combat de JRPG ont tous cette petite subtilité qui peut modifier en profondeur les stratégies gagnantes. "Comment gérer mes matérias et mes limites (FFVII) ? Comment consommer ma magie (FFVIII) ?" Dans Xenogears, cela aurait du être : "comment économiser mes points d'actions pour déclencher un combo dévastateur ?" Au final, cette question ne se pose que lorsqu'on est en face d'un ennemi fort entouré d'une ribambelle de plus faibles. Autant dire que cette situation ne se présente JAMAIS, les combats étant bien trop rapides rendant impossible la possibilité d'accumuler ces fameux points d'action. Le calcul est simple, il faut au minimum 3 tours pour accumuler suffisamment de points. C'est à dire qu'il faut 4-5 ennemis dans la configuration ci-dessus. Autant foncer tête baissée, c'est bien plus efficace et moins risqué. La magie est elle-aussi très bancale, les faiblesses élémentaires des ennemis n'existant pas. Soit un ennemi est faible à tous les éléments, soit il est résistant à tout. La création de différentes magies devient alors une perte de temps et d'argent pour la production. Enfin, l'inclusion des Gears provoque aussi un deséquilibre dans ce système. Certaines zones sont prévues pour être explorées en Gear de par les ennemis présents. Dans ce cas, pourquoi donc forcer le joueur à sortir de son robot pour rentrer dans un pauvre maison ou effectuer une action banale. On se retrouve donc à tourner en rond pour déclencher un combat aléatoire, sortir de son robot, effectuer l'action, et espérer avoir le temps de revenir dedans sans déclencher un nouveau combat contre des ennemis faisant des dégats monstrueux. Pour résumer, le système de combat n'a pas du tout été équilibré et cela nuit gravement à ce genre de jeu. Le système de combat m'a sauvé FFXIII, il me plombe Xenogears.

Un dernier point particulièrement énervant est l'inclusion de phases de plateformes. La caméra dans le jeu est particulièrement mauvaise (il y a toujours un objet au premier plan, il est très difficile d'apprécier les distances etc.), ce qui est compréhensible car il s'agit d'une première pour Squaresoft. Donc pourquoi l'équipe de développement a à tout prix voulu inclure ce gameplay ? Pourquoi désactiver uniquement le saut lorsqu'un combat se charge, c'est à dire pendant 2-3 secondes ? Cacher les chargements de cette manière est une très mauvaise idée. Devoir recommencer toute une partie de plateforme à cause d'un combat aléatoire se déclancheant juste avant un saut est extrèmement frustrant.

Malgré tous ces défauts, si le jeu en ressortait mauvais, je n'aurais pas passé 80h dessus. Xenogears n'a tout simplement pas eu les moyens de ses ambitions. Peut-être a-t-il souffert du succès de Final Fantasy qui s'est approprié toutes les ressources internes de Squaresoft. Porté par un excellent scénario, une superbe image et une musique divine, Xenogears échoue sur un point crucial que le second disque symbolise tristement : être un jeu.

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le 21 juil. 2013

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