Vous pouvez retrouver mon avis avec illustrations sur mon blog.

Au sein des studios de Nippon Ichi Software est régulièrement organisé un concours afin de concevoir un nouveau jeu. C’est ainsi qu’est né Yomawari: Night Alone en 2015, premier épisode d’une licence qui va se décliner en deux autres volets : Midnight Shadows en 2017 et Lost in the Dark en 2022. Ce même concours interne aura aussi permis l’émergence de The Liar Princess and the Blind Prince, dont l’univers et la patte graphique inspireront The Cruel King and the Great Hero (lire le test sur le blog).


Mais revenons-en à Yomawari. Sous ses dehors d’une esthétique très mignonne avec des personnages Super Deformed (ou chibi en japonais), le titre se place dans le genre horrifique en abordant frontalement des thématiques qui ont de quoi secouer. Quel que soit l’épisode, les personnages sont toujours des enfants, perdus au sein d’une ville fantomatique où ne semblent résider que des esprits peu enclins à la discussion. La mort est omniprésente puisque la moindre mauvaise rencontre fait passer votre personnage de vie à trépas.


Au sein du premier épisode, votre personnage recherche sa grande sœur disparue. Dans Yomawari : Midnight Shadows, Haru et Yui vont voir, une ultime fois, les feux d’artifice, Haru devant déménager sans délai, quittant ainsi le village. Un bruit suspect les oblige à se séparer, les amenant à mener une vaste partie de cache à cache pour tâcher de se retrouver. Au sein de Yomawari : Lost in the Dark, votre personnage (nommé, par défaut, Yuzu) a soudainement perdu la mémoire et doit partir en quête de ses souvenirs.


Les épisodes peuvent ainsi être joués indépendamment les uns des autres. Seule l’ambiance angoissante et une ville torturée servent de fil conducteur, se présentant comme la moelle épinière de la licence. N’ayant pu jouer qu’au second épisode en plus de Yomawari : Lost in the Dark, je ne pourrais effectuer des comparatifs qu’avec ce précédent volet.


‼️ Le test peut contenir quelques spoilers (même si l’intrigue est volontairement laissée floue pour conserver la surprise). Le jeu aborde des thèmes durs tels que le suicide, la violence animale, le harcèlement qui seront abordés dans le test (sans illustration graphique). ‼️

Pauvre âme en perdition

Quand je dis que Yomawari aborde des thématiques sensibles, cela débute dès les premières minutes. Yomawari : Lost in the Dark est le premier épisode vous permettant de personnaliser votre avatar que ce soit en modifiant son nom mais aussi son apparence physique (vêtements, tenues, accessoires). Une fois ce passage accompli, vous voici projeté à l’école au sein d’une ambiance tendue. Pour une raison inexpliquée, l’ensemble des élèves vous haït. Non seulement ils s’éloignent de votre personnage, mais vont jusqu’à le brutaliser physiquement, taguer son bureau et l’obliger à avaler un asticot vivant. C’en est trop pour Yuzu qui va se réfugier sur le toit de l’école. Alors que la jeune fille lève la tête vers le ciel, l’écran en fait de même pour dévoiler le titre de l’opus. Lorsque la caméra rebascule vers le bas, il ne reste plus de Yuzu que ses chaussures.


Vous l’aurez compris : l’introduction ne nous ménage nullement, présentant la vie scolaire de Yuzu et concluant ces premières minutes d’une scène de suicide. Même en évitant de montrer la chute, la présence seule des chaussures souligne assez l’impact de la scène, d’autant plus que Yuzu est une enfant. Si son âge reste floue, on apprendra bien plus tard qu’elle est scolarisée dans une école primaire.


Yomawari bascule rapidement aussi dans l’aspect surnaturel qui caractérise la licence. Yuzu se réveille dans une étrange forêt enneigée, en compagnie d’une jeune fille plus âgée qu’elle. Surnommée Lady, celle-ci assure à Yuzu qu’elles se connaissent et l’aide à retrouver le chemin du monde réel. Avant de se quitter, Lady encourage sa cadette à retrouver ses souvenirs afin de tenir la promesse qu’elle lui a faite par le passé, et les libérer toutes deux d’une curieuse malédiction.


C’est à partir de là que Yomawari : Lost in the Dark commence véritablement, l’introduction servant à poser les bases de l’intrigue ainsi qu’à introniser le joueur aux commandes. Les souvenirs de Yuzu se divisent en deux catégories qu’elle peut visualiser à l’infini depuis un journal intime, disponible dans sa chambre. D’un côté, ceux qui lui indiquent les zones à fouiller pour permettre l’avancée de l’intrigue, de l’autre des flash-backs pour mieux comprendre ce qui la lie à Lady.


La maison de Yuzu, tout comme les demeures des précédentes héroïnes de la licence, sert aussi bien de QG que d’unique zone safe du jeu. En plus des fragments mémoriels, Yuzu peut dénicher pléthore d’objets aussi bien utiles que purement décoratifs, voire simplement là pour étayer le lore et conférer à la ville un aspect de carrefour de l’étrange. La penderie de Yuzu permet de customiser le personnage avec des éléments que vous avez pu trouver durant votre avancée. Le genre de petit ajout purement décoratif qui fait toujours plaisir, surtout pour la coiffer d’un nœud comme l’ont porté toutes les héroïnes de la licence. Ou accrocher un masque de kitsune, porter un appareil photo en guise de sac à dos.


Yomawari : Lost in the Dark se veut être un titre qui pousse le joueur à explorer de lui-même la ville, en s’aidant des quelques indices qui sont en possession de Yuzu. Tant que vous n’avez pas déniché l’objet adéquat, certaines zones vous sont inaccessibles. Leurs frontières baignent dans un brouillard où sévit une étrange créature qui vous tue instantanément.


Bien évidemment, la fouille ne se fera pas sans heurt puisque Yuzu n’est pas seule dans cette ville plongée dans la nuit. Des esprits en tout genre rôdent, attaquant la petite fille dès qu’elle croise leur regard. Contrairement au précédent épisode, où des éléments comme des panneaux et buissons permettaient de se cacher le temps que les ennemis s’éloignent, Yuzu doit avancer parmi les créatures. Pour cela, en restant appuyé sur les gâchettes R2 et L2, l’enfant cache ses yeux derrière ses mains et peut avancer. Il faut surtout veiller à ne pas approcher les cercles rouges représentant les esprits. En résumé, évitez tout contact visuel pour ne pas engager de conflit, fermez les yeux et éloignez vous, ou courez si la situation est trop tendue. Dans ce dernier cas, surveillez votre jauge d’endurance qui peut rapidement s’épuiser. Il est aussi possible de jeter des cailloux ou avions en papier pour éloigner les esprits en détournant leur attention.


Plusieurs boss viendront empêcher Yuzu de reconstruire sa mémoire. Rappelons le : Yuzu est une enfant. Elle ne possède donc aucune arme pour vaincre ces créatures, souvent gigantesques. Il lui faudra esquiver les coups qui lui sont portés. C’est au joueur de s’adapter à certaines mécaniques propres à chaque zone. Pour ma part, j’ai apprécié celui reposant sur l’usage d’un flash d’appareil photo pour aveugler les ennemis, ou encore celui d’une cave où la vision est déformée, amenant même à une inversion des commandes.


Le reste du gameplay demeure très simple, misant avant tout sur la fouille et la découverte d’objets à aller déposer dans des endroits précis, ou de résolutions d’énigmes. Ainsi, dans le cimetière, vous devrez apaiser les esprits des mourants. En voyant une tombe recouverte de monnaie, il faudra comprendre que vous devez jeter une pièce pour apaiser l’esprit du défunt.


Prisonnière d’un tortueux labyrinthe

Yuzu est une enfant et le jeu ne l’oublie jamais, la faisant douter et être apeurée face à ce qu’elle voit et vit. Le carnet où elle répertorie aussi bien ce qu’elle doit accomplir que les éléments qu’elle trouve est rempli de croquis dignes d’une personne de son âge. Rien n’est vraiment bien dessiné, hormis les stickers qu’elle accole, et l’écriture est tout en rondeurs, très scolaire. Ce qui tranche d’autant plus avec l’ambiance de la ville. Véritable petite bourgade campagnarde du Japon, la cité propose aussi bien des routes larges que des ruelles, donnant à l’ensemble un air de labyrinthe. Selon les esprits présents, il faut parfois modifier sa trajectoire, toujours s’adapter et avancer à pas comptés pour éviter les pièges. Certains esprits aiment vous tomber dessus (au sens propre) pour vous écraser.


Les différentes zones permettent d’étayer différents tropes de l’horreur sans jamais verser dans le gore, s’approchant davantage de l’angoisse et usant de l’allusion. Je remercie d’ailleurs les développeurs de Yomawari d’avoir conservé cette direction artistique plutôt que chercher à approcher le photo réaliste, ce qui aurait rendu certaines séquences insoutenables. Sans entrer dans le détail pour conserver le plaisir de la surprise, Yuzu va aussi bien retourner à l’école (joie !), que découvrir une maison emplie de poupées, une rizière peuplée d’épouvantails, un bateau hanté ou encore un cimetière.


Afin que le voyage au sein de la ville ne soit guère hasardeux, vous pouvez compter sur la présence de statues Jizo. En échange d’une pièce, vous pouvez sauvegarder votre progression. Après une mort brutale, vous revenez auprès de la dernière statue à qui vous avez accordé une offrande. Il vous est aussi possible (gratuitement) de voyager de statue en statue. Notez comme il est ironique de trouver de telles figures quand on sait que les Jizo sont les protecteurs des voyageurs et des enfants.


Niveau sonorité, Yomawari : Lost in the Dark se veut minimaliste mais efficace. Aucune piste musicale ne se fait entendre, ni même de doublage, laissant toute place au sound-design. Si l’écran d’accueil propose d’utiliser un casque pour profiter de l’expérience à son maximum, le titre peut aussi s’apprécier sans. A vous de voir ce qui vous convient le mieux. Le fond sonore est parcouru par le crissement des cigales, parfois remplacé par d’autres sonorités moins complaisantes selon le lieu traversé. Selon où Yuzu marche, le son de ses pas sera ponctué de celui du métal, du bitume ou de l’herbe. En ville, le grésillement des distributeurs et des lampadaires viennent ponctuer nos pas. De même, la présence d’ennemis est précédée de battements de cœurs se faisant plus frénétiques pour souligner la proximité immédiate du danger. Du coup, on tend l’oreille, on se laisse absorber par l’ambiance que tissent toutes ces sonorités.


Mauvaise nouvelle pour les non bilingues : tout comme ses prédécesseurs, Yomawari : Lost in the Dark n’a droit qu’à une traduction en anglais. Si le niveau requis n’est pas très haut (je ne sais que balbutier en anglais et je comprends les textes sans pour autant savoir lire un roman), il peut s’avérer assez subtil en termes d’énigmes. Car les informations passent aussi bien par les images véhiculées à travers les mémoires que les dialogues entre Yuzu et Lady.


Le carnet répertorie les grandes étapes à exécuter, tout comme l’inventaire donne à chaque objet un descriptif à ne pas négliger. Ainsi une zone requiert d’exécuter un rituel dont les étapes sont délivrées à travers de notes déchirées à ramasser. Il y a là un aspect survival game à l’ancienne où tout doit être lu avec attention. Ce qui m’a parfois amené à fouiller et chercher la prochaine étape sans vraiment comprendre l’action à accomplir. Le dernier chapitre du récit peut ainsi se révéler assez retors puisqu’il fait appel à des mécaniques que vous venez tout juste de découvrir, et requiert d’exécuter des actions bien précises.


Pour autant, je ne peux pas voir cela comme un gros point noir vu que cela entre en adéquation avec l’esprit du titre, que j’avais déjà pu voir dans le précédent volet. La ville, comme la mémoire de Yuzu, est une énigme à résoudre par nos propres moyens. Je pense qu’avec une localisation en français, certaines énigmes auraient gagné en clarté pour les personnes non bilingues.


Aparté sur les trophées


Yomawari : Night Alone avait alourdi sa liste de trophées d’un requérant de jouer 50 heures (alors qu’il faut à peine 15 heures pour compléter tous les autres objectifs). Midnight Shadows proposait de fouiller l’ensemble du jeu, tout en amenant le joueur à exécuter quelques activités annexes. Yomawari : Lost in the Dark se concentre, lui, sur l’essentiel. En plus de réussir l’histoire, vous devrez dénicher tous les objets se trouvant au sein de la ville. Hors, une partie d’entre eux n’est accessible qu’après avoir conclu le récit, et en retournant sur les lieux déjà fouillés précédemment pour taquiner les boss une seconde fois. Sans compter certains évènements disséminés dans les ruelles, véritables énigmes venant étayer le lore folklorique vivotant en ville. Un guide n’est guère de trop pour réussir à trouver le moindre élément (surtout celui qui est invisible…).


En résumé


Ayant joué à Yomawari : Midnight Shadows pour avoir une première approche de la licence (Night Alone n’étant disponible que sur PS Vita, Steam et Switch), Yomawari : Lost in the Dark a su me surprendre avec de nouvelles mécaniques propres à cet opus (se cacher les yeux) tout en conservant l’identité de la licence. Le récit pourra heurter les sensibilités tant il n’est guère intransigeant, sans pour autant verser dans la pure violence graphique, y préférant l’allusion. L’absence de localisation en français pourra être un frein pour une part du public, rendant certaines résolutions d’énigmes obscures. Pour autant, je ne peux que vous le conseiller surtout si vous appréciez le mélange angoisse et univers enfantin, à l’image de Little Nightmares ou des animes comme Higurashi.

So-chan
9
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Créée

le 5 févr. 2023

Critique lue 11 fois

So-chan

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