Lars von Trier parle de films

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A propos d'un de ses premiers films, Menthe la Bienheureuse : « Ce dernier était tourné en français, bien que je ne comprenne pas un mot de français. Mais je l'ai réalisé après avoir vu India Song de Marguerite Duras, alors je n'avais pas le choix. » « India Song fut une révélation. Il fait partie du petit nombre de films qui m'ont énormément marqué ». « C'est merveilleux de sentir qu'un film est un ovni, qu'il n'a pas été conçu ici-bas. Je ne peux pas l'exprimer autrement. »

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Même chose que pour India Song, c'est un « ovni », pas conçu ici-bas. « Un film que j'ai vu au moins vingt fois et qui m'obsède complètement ». « Cette envie de colorer la pellicule noir et blanc était une pure imitation de Tarkovski, dans Le Miroir. » « Cette musique aussi était inspirée de Tarkovski. Il mettait du Bach. »

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Et également, de Jorgen Leth, L'homme parfait [qu'il s'amusera d'ailleurs en 2005 à faire déconstruire et reconstruire par son réalisateur, dans Five Obstructions]. Ce sont deux films qui l'ont touché ou fasciné durant ses années d'études cinématographiques. Le Bien et le Mal l'a « énormément influencé ». « Ce sont des films auxquels je reviens sans cesse et que j'ai dû voir une vingtaine de fois ».

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« Je l'ai récemment revu en vidéo et c'est un film qu'on pourrait qualifier de kitsch aujourd'hui. Il a un côté lourd et comique que je n'avais pas noté lorsque je l'ai vu pour la première fois ». Il raconte avoir remercié la réalisatrice et lui avoir offert un bouquet de lys blanc. « Portier de nuit était une nullité à ses yeux. Elle était très énervée et elle a accepté mon bouquet sans aucune joie. »

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« Je reconnais qu'il inspire la façon dont je conçois certains de mes plans. Il y a une scène où les enfants trouvent refuge dans un énorme baobab après un déluge. C'est une scène inoubliable qui évoque un rêve d'enfance. Petit, j'ai aussi construit des cabanes dans les arbres, j'adorais y grimper. »

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Ce qui lui plaît dans ce film : « Son monde imaginaire. Le personnage principal se rebelle dans ses rêves. Par exemple, il se voit jeter une grenade sur une vieille dame. (...) J'adore Billy le menteur. Rares sont les films que j'ai ainsi en mémoire. »

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« J'ai vu récemment Loulou de Maurice Pialat. C'est un film extaordinaire. »

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« Et je me souviens des débuts d'Isabelle Huppert dans La Dentellière de Claude Goretta. La première fois que je l'ai vue, je me rappelle avoir pensé : « Cette fille insignifiante ne peut pas avoir le rôle principal. » Mais à la fin du film, j'étais complètement ensorcelé, presque obsédé par elle. »

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« Pendant une période, j'aimais beaucoup la musique impressionniste et les œuvres pour piano. En grande partie grâce au film Delius de Ken Russell. C'est certainement le plus discipliné de tous ses films et je le trouve génial. »

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« Quand on entend des noms de villes, cela évoque des images. Le fait de parler de villes est assez visuel, car on attribue une âme à de nombreuses villes, qu'on y soit allé ou non.
Les villes sont comme les gens. Dans Le Silence de Bergman, je me souviens de cette ville imaginaire d'une grande tristesse, qui semble située dans un pays de l'Est. Elle possède, elle aussi, une âme ».

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« A une époque, j'adorais Pasolini et je l'ai pas mal étudié. J'aimais bien la trilogie qu'il a signée vers la fin de sa carrière, avec Les mille et une nuits et Les contes de Canterbury. Et Théorème est un film superbe. Salo était intéressant aussi ; il s'y est montré passablement audacieux. Un film vraiment ultime ! Heureusement qu'il y a eu des grands cinéastes comme lui. Sans eux, le cinéma serait bien pauvre. »

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« Une atmosphère très hypnotique se dégage de Gertrud. C'est un film brillant, détesté au Danemark. C'est un de ceux que je préfère. »

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Parlant de The Element of Crime : « Je vois bien certains parallèles avec (...) La Soif du mal. Et si c'est le cas, tant mieux. Ça me convient. » « Ça me rappelle un peu les scènes du barrage, à la fin [du film]. Ce barrage est (...) un endroit étrange, très beau, qui fonctionne à merveille dans le film. Il y a quelque chose de quasi mythique et et tu as tout à fait raison, c'est une référence directe à La Soif du mal et sa fin fabuleuse. » « La Soif du Mal est un film phare pour moi. »

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« Citizen Kane ne m'a jms captivé autant. Je l'admire et le travail sur la profondeur de champ m'intéresse, ms je trouve le film trop toc, c'est cô Le Procès. Les décors de ces films me paraissent artificiels, ils ont cô un goût de plastique... Lorsque Welles s'attaque à Kafka, le résultat est redondant, Welles est déjà kafkaïen. Je préfère son côté 100% américain, cô ds La Splendeur des Amberson. Je n'aime pas qu'un Américain cherche à faire l'Européen... » ...dit celui qui a réalisé Dogville..

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« J'ai un faible pour La Dame de Shanghai, probablement à cause de toutes les rétro-projections, l'emploi des miroirs, et Rita Hayworth est bien sûr magnifique. La séquence dans la salle aux miroirs tient du génie. »

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On lui dit que ds Epidemic il alterne continuellement entre une action qui va de l'avant et la mémoire : « Effectivement. C'est une question de style, cette volonté de rendre l'intrigue + énigmatique, en la situant à plusieurs niveaux temporels simultanément. La mémoire constitue un niveau intéressant. J'aime bcp les films comme Providence, par ex, construits de cette manière. Pê qu'il a perdu un peu de sa force, mais je me souviens avoir été très impressionné en le voyant pour la 1ère fois. »

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On lui demande s'il l'a vu. « Oui, mais il m'a déçu. En fait, le concept [de plan-séquence] n'est pas vraiment exploité dans le film. L'intérêt serait d'évoluer librement dans un vaste paysage et, pourquoi pas, de pénétrer dans certains décors. Hitchcock se contente d'un appartement étriqué. L'intrigue ne me paraît pas idéale pour ce genre d'expérience. » « Non, le résultat n'est pas tellement intéressant. »

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« Je ne vois presque plus de films récents. Et puis, les films « à la mode » ne me disent pas gd chose. Brazil de Terry Gilliam, par ex : détesté ! Ou ces Français qui ont fait Delicatessen. Je ne supporte pas. C'est maniéré et superficiel, c'est grotesque sans posséder la générosité, la richesse de couleurs et la joie de vivre du grotesque. En revanche, c'est ce que fait très bien Fellini.
Je n'ai même pas pu voir Brazil jusqu'au bout. »

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« C'est pareil pour les films de Peter Greenaway ; ce sont des films sans mystère. L'esthétique y est si poussée et exagérée que ça en devient lourdingue. Bizarre... ce sont des réalisateurs auxquels on me compare parfois ». Bizarre, oui... c'est pas du tout ce qu'il fait lui-même dans ses plus mauvais films, non non...

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D'autres œuvres m'ont incité à faire Europa : en particulier Les Damnés de Visconti, qui m'a beaucoup marqué. C'est ce film qui m'a donné l'idée de suivre une famille à travers ses activités, ses relations et ses conflits internes.

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Anne Louise Hassing (...) tenait le rôle principal dans La douleur de l'amour de Niels Malmros. C'est un film merveilleux, le meilleur du cinéaste, et il m'a donné envie de faire Breaking the Waves.

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Je suis surpris du succès des Scènes de la vie conjugale. (...) Mes amis à Stockholm trouvaient Bergman terriblement enfantin. C'est vrai pour la plupart des artistes, mais la psychologie de Bergman reste à un niveau très grand public, ce qui explique pourquoi ses films sont si populaires. C'est juste une réflexion, pas une remarque critique.

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La cécité est un outil mélodramatique ingénieux. Cela m'a fait penser au Secret magnifique de Douglas Sirk : une histoire totalement invraisemblable. Le personnage joué par Rock Hudson y renverse une femme – interprétée par Jane Wyman – et cet accident la rend aveugle. Il devient médecin pour pouvoir la soigner. Et, à la fin, ils se marient, évidemment ! Ça, c'est vraiment fort ! Mais je n'ai qd même pas cherché à me servir de ressorts aussi énormes en écrivant Dancer in the Dark.

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Ce réalisateur ne m'est pas indifférent mais je le considère pourtant marginal dans mes sources d'inspiration. Il a signé des mélodrames forts mais jamais sirupeux. Un film de Douglas Sirk ne fait pas pleurer. Son travail est suffisamment stylisé pour laisser une certaine distance entre le spectateur et les personnages pris dans les remous de l'intrigue.

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L'ennui, c'est que la plupart des films du genre [comédie musicale] sont plein de stéréotypes affreusement américains. Et Cabaret n'y échappe pas ! C'est probablement pour cette raison que je préfère West Side Story, et de loin. Il a une cohérence, puisque le sujet qu'il traite est archi-américain. En outre, il a permis à la comédie musicale de sortir des studios dans la rue.

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Parmi les anciennes productions des majors, j'ai un faible pour Chantons sous la pluie. Une grande partie à cause de Gene Kelly. Fred Astaire était un danseur hors pair, mais Gene Kelly était, en plus, un chorégraphe talentueux, novateur et plein de fantaisie. Un peu comme Bob Fosse plus tard. Gene Kelly était fabuleux ! On peut difficilement trouver plus américain [que lui] mais il avait aussi beaucoup d'indépendance d'esprit.

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Je viens de revoir De Sang froid par Richard Brooks. C'est un film excellent mais aussi très pénible. Les scènes d'exécution sont toujours très fortes émotivement au cinéma.

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J'aimais bien l'idée d'opposer un pays de l'Est aux Etats-Unis. Mon film aura un côté Joe Hill. C'est un grand film aussi. Tu te souviens de la scène finale ! L'oiseau qui passe au moment où le protagoniste sera fusilllé. Comme il a les yeux bandés, je crois bien qu'il ne le voit pas. Il ne fait que l'entendre. C'est génial !

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L'idée [que le psg principal de Dancer in the Dark vive dans une caravane] m'est venue d'un vieux film de Werner Herzog, Stroszek, interprété par Bruno S., l'acteur qui incarne Kaspar Hauser, un film qui me tient beaucoup à cœur. Herzog était un cinéaste complètement original. Malheureusement, il est tombé un peu dans l'oubli...