feuilles à la pelle
...autour des feuilles mortes de Prévert et Kosma...( liste en chantier )
8 morceaux
créée il y a environ 2 ans · modifiée il y a 15 joursLes Feuilles mortes
03 min.
Morceau de Yves Montand
moranc a mis 8/10 et a écrit une critique.
Annotation :
il y a ce texte de Prévert, plus simple que d'habitude : 
  
 Oh ! je voudrais tant que tu te souviennes des jours heureux où nous étions amis ; 
 en ce temps-là, la vie était plus belle, et le soleil plus brûlant qu'aujourd'hui. 
 Les feuilles mortes se ramassent à la pelle... 
 ( tu vois, je n'ai pas oublié ) 
 Les feuilles mortes se ramassent à la pelle, 
 les souvenirs et les regrets aussi... 
 ...et le vent du Nord les emporte, dans la nuit froide de l'oubli... 
 ( tu vois, je n'ai pas oublié la chanson que tu me chantais ) 
 C'est une chanson qui nous ressemble, 
 toi tu m'aimais, et je t'aimais. 
 Nous vivions tous les deux ensemble, 
 toi qui m'aimais, moi qui t'aimais. 
 Mais la vie sépare ceux qui s'aiment, tout doucement, sans faire de bruit, 
 et la mer efface sur le sable les pas des amants désunis. 
  
 - déjà, cette référence à une autre chanson, comme si elle préexistait à celle-ci, mais non ! ...ruse terrible pour amorcer aussitôt la nostalgie, piège attrape-cœurs. Il doit y avoir un terme pour ce procédé, on baptise bien tout - qui sait son nom ? 
 Sinon, j'ouvre le concours. Et en attendant, on va dire un prékosme, en hommage à Prévert et Kosma. 
  
 ... ensuite, beaucoup ont reproché aux paroles de boiter, les vers marchant sur 9 et 10 pieds, parfois 8, sans voir que c'est ce déhanchement, cette démarche blessée qui émeut, justement. Vous savez, comme marcher sur le sable mouillé, avec une vague qu'on ne réussit pas à éviter cette fois, et qui vous mouille une chaussure ? voilà. 
 Pas de vrai refrain, et c'est tant mieux. Un refrain l'aurait trop assise, là, elle va au vent. 
  
 Avant d'être chantée sur scène et de sortir en disque, la chanson est fredonnée par Nathalie Nattier et Montand dans Les Portes De La Nuit de Marcel Carmé ( 1946 ) 
 Notez qu'à l'harmonica, c'est carrément Jean Vilar, LE Jean Vilar !... et Montand ( tout jeunot ) qui dit qu'il l'a déjà entendue quelque part, cette chanson. 
 Même jeu dans un autre extrait avec Irène Joachim ( AK Nathalie Nattier ) : cette chanson est TOUJOURS présentée comme un souvenir, dès sa création, c'est une revenante. 
 ...et encore avant, avant d'être une chanson, sa mélodie a d'abord été utilisée par Kosma dans ce ballet de Roland Petit, Le Rendez-Vous ( 1945 ). 
 ...et à la base, Kosma avait piqué la mélodie à un thème musical de Pareil à des Oiseaux de Massenet (dans Poème d'Octobre en 1876 ), mais il faut faire abstraction du chant et se concentrer sur le piano. 
  ( et Massenet s'est peut-être souvenu d'un air que chantait sa maman ? )
Les Feuilles mortes
Les Feuilles mortes
03 min.
Morceau de Cora Vaucaire
Annotation :
c'est elle qui l'a chanté la première sur scène, paraît-il, et c'est pas mal du tout
Autumn Leaves (2010)
Autumn Leaves
05 min. Sortie : 28 septembre 2010 (France).
Morceau de Eric Clapton
Annotation :
ça semble couler de source...
Autumn Leaves (1998)
Autumn Leaves
04 min. Sortie : 31 mars 1998 (France). Blues
Morceau de Eva Cassidy
Annotation :
très loin des effets de voix de Montand, très beau, très pur
Les feuilles mortes (2009)
Les Feuilles mortes
03 min. Sortie : 25 mai 2009 (France).
Morceau de Iggy Pop
Annotation :
troublant iguane. Très vrai.
Autumn Leaves (1997)
Autumn Leaves
05 min. Sortie : 18 novembre 1997 (France). Pop rock
Morceau de Paula Cole
Annotation :
très belle version
La Chanson de Prévert (1990)
La Chanson de Prévert
02 min. Sortie : 1990 (France).
Morceau de Serge Gainsbourg
moranc a mis 10/10, l'a mis dans ses coups de cœur et l'a mis en envie.
Annotation :
reprenant 15 ans plus tard le principe du souvenir d'une chanson, déjà au cœur des Feuilles Mortes, Gainsbourg se plaint de ce qu'elle rouvre à chaque fois la blessure de la séparation.  
  
 On commence par le même vers que Prévert : "Oh je voudrais tant que tu te souviennes", et très vite le texte nous fait un croche-pied : c'était ta préférée je crois/qu'elle est de Prévert et Kosma. Le je crois prononcé sans pause donne l'impression de concerner "c'était ta préférée", et l'instant d'après on comprend qu'il introduit "qu'elle est de Prévert et Kosma". Cette petite suspension de la compréhension- vite rétablie - nous met en déséquilibre voulu.  
  
 Autre particularité du texte : la tournure "et peu à peu je m'indiffère", que je n'ai jamais rencontrée ailleurs. En général, le verbe "indifférer" ne s'emploie qu'à la 3e personne en mode indirect : ça m'indiffère, son avis l'indifférait etc., où indifférer est exactement équivalent à "être indifférent": on peut remplacer par "ça m'est indifférent", "son avis lui était indifférent" etc. 
 Mais ici, Gainsbourg l'utilise en mode réfléchi, "je m'indiffère", qui suppose un autre sens au verbe indifférer : "éprouver de l'indifférence": du point de vue du sens, on peut remplacer "peu à peu je m'indiffère" par "peu à peu j'éprouve de l'indifférence". 
 ...sauf que cet usage et cette acception ne semblent pas attestés ailleurs en langue française ( si vous en connaissez un exemple détrompez moi, Gainsbourg aimant parfois recourir à des usages rares ou désuets ): il s'agit ici d'une pure création poétique. 
  
 Enfin, contrairement à Prévert qui insistait sur l'aspect volatil et fini de la liaison, Gainsbourg semble pressé qu'elle finisse de le tourmenter, et espère oublier vite cette chanson des Feuilles Mortes à laquelle il rend hommage ! Le ton est doux, uni, sans grand effet de voix ( moins que Montand ), mais contraste avec la tension de son visage sur les films d'archive :  
  
 https://youtu.be/5DeA8FPqWwc?feature=shared 
  
 beaucoup moins tendue ( mais moins émouvante aussi ) , une version un peu country de Claire d'Asta : 
  
 https://youtu.be/6BRpyQLhhFs?feature=shared
Barbara (1994)
Barbara
02 min. Sortie : 25 juillet 1994 (France).
Morceau de Yves Montand
moranc a mis 9/10, l'a mis dans ses coups de cœur et l'a mis en envie.
Annotation :
pas de feuilles mortes ici, juste Brest en ruine, et les nuages qui vont crever au loin comme des chiens; mais l'affinité est évidente - bien sûr elle est de Prévert et Kosma : 
  
 Rappelle-toi Barbara 
 Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là 
 Et tu marchais souriante 
 Épanouie ravie ruisselante 
 Sous la pluie 
 Rappelle-toi Barbara 
 Il pleuvait sans cesse sur Brest 
 Et je t'ai croisée rue de Siam 
 Tu souriais 
 Et moi je souriais de même 
 Rappelle-toi Barbara 
 Toi que je ne connaissais pas 
 Toi qui ne me connaissais pas 
 Rappelle-toi 
 Rappelle-toi quand même ce jour-là 
 N'oublie pas 
 Un homme sous un porche s'abritait 
 Et il a crié ton nom 
 Barbara 
 Et tu as couru vers lui sous la pluie 
 Ruisselante ravie épanouie 
 Et tu t'es jetée dans ses bras 
 Rappelle-toi cela Barbara 
 Et ne m'en veux pas si je te tutoie 
 Je dis tu à tous ceux que j'aime 
 Même si je ne les ai vus qu'une seule fois 
 Je dis tu à tous ceux qui s'aiment 
 Même si je ne les connais pas 
 Rappelle-toi Barbara 
 N'oublie pas 
 Cette pluie sage et heureuse 
 Sur ton visage heureux 
 Sur cette ville heureuse 
 Cette pluie sur la mer 
 Sur l'arsenal 
 Sur le bateau d'Ouessant 
 Oh Barbara 
 Quelle connerie la guerre 
 Qu'es-tu devenue maintenant 
 Sous cette pluie de fer 
 De feu d'acier de sang 
 Et celui qui te serrait dans ses bras 
 Amoureusement 
 Est-il mort disparu ou bien encore vivant 
 Oh Barbara 
 Il pleut sans cesse sur Brest 
 Comme il pleuvait avant 
 Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé 
 C'est une pluie de deuil terrible et désolée 
 Ce n'est même plus l'orage 
 De fer d'acier de sang 
 Tout simplement des nuages 
 Qui crèvent comme des chiens 
 Des chiens qui disparaissent 
 Au fil de l'eau sur Brest 
 Et vont pourrir au loin 
 Au loin très loin de Brest 
 Dont il ne reste rien.



