HELLMAN Monte - Critiques & Annotations
3 films
créée il y a presque 5 ans · modifiée il y a 20 joursBack Door to Hell (1964)
1 h 15 min. Sortie : novembre 1964 (États-Unis). Drame, Guerre
Film de Monte Hellman
SimBoth a mis 7/10.
Annotation :
"Back Door to Hell" est le deuxième film du diptyque de Monte Hellman tourné d’une pierre deux coups aux Philippines. Il raconte le récit de soldats américains qui débarquent aux Philippines afin d’aider des guérilleros locaux contre l’invasion japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Au-delà du principe série de film de guerre, l'auteur filme ces trois soldats dans un cloître existentiel qui est traduit par la jungle dans laquelle ils s’enlisent. Elle emprisonne et asphyxie, enlevant tout charme exotique à l’environnement et faisant rapprocher le récit à celui d’un voyage conradien minimaliste. Le style âpre et anti-spectaculaire rend exiguë l’action. Elle est plus souvent enfermée et barricadée, car l’auteur se concentre sur des escarmouches, des petits maquis végétaux, des cachettes, des refuges et sur les visages des acteurs. Cela appuie aussi la tension des locaux à propos des Américains, qui malgré leur entraide, voient en eux un autre type de colonisateur. Il n’y a pas d’héroïsme dans cette vision de la guerre, comme si toute cette mission était dérisoire. C’est pourquoi les hommes sont dans un purgatoire, ils sont confrontés à leur propre futilité et se dirigent vers une perdition les menant à la mort. Tandis que pour les survivants, c'est vers le néant qu'ils sont conduits.
Macadam à deux voies (1971)
Two-Lane Blacktop
1 h 42 min. Sortie : 4 janvier 1973 (France). Drame, Road movie
Film de Monte Hellman
SimBoth a mis 10/10.
Annotation :
Le vrombissement des véhicules enragés, une route isolée et plongée dans la nuit, des regards concentrés et mutiques vers l’infini horizon de l’asphalte, enfin les bandes jaunes de la route qui défilent comme la pellicule dans un projecteur. Voici comment commence l’une des œuvres fondamentales dans ma passion pour le cinéma. À la recherche de courses et d’argent, deux hommes, obsédés par leur Chevrolet, rencontrent une auto-stoppeuse hippie et un mythomane à la recherche de reconnaissance avec qui ils font la course. L’échange des corps, comme l’échange des véhicules, ne fait plus qu’un, mais ne suffit pas à procurer des sentiments sociaux, surtout au chauffeur joué par James Taylor, car comme le disait l'auteur à propos de son film : « Pour moi, "Two-Lane Blacktop" était l'histoire d'un homme qui a souffert à cause d'une incapacité à communiquer ses sentiments. » Ainsi, seul le sentiment d’adrénaline et de vitesse le maintient en vie. Conformément, l'auteur s’affranchit de tous codes narratifs et se concentre surtout sur le culte de la voiture, les non-dits des personnages, l’atmosphère hypnotisante et langoureuse que procurent le battement mécanique des véhicules et le silence de ces anonymes du vagabondage. "Macadam à deux voies" est donc une œuvre sur le mythe de la liberté et de l’errance qui embrasse le mal-être de la contre-culture américaine, mais surtout un chef-d’œuvre mélancolique qui se termine par l’embrasement de la pellicule, ouvrant ce trou vers le néant et l’espace insaisissable de nos vies et du cinéma.
Road to Nowhere (2010)
2 h 01 min. Sortie : 13 avril 2011 (France). Romance, Policier
Film de Monte Hellman
SimBoth a mis 8/10.
Annotation :
Au-delà d’être une mise en abyme d’un tournage qui raconte l’histoire d’un fait divers sordide, "Road to Nowhere" est un emboîtement infini de regards et d’images. Quelqu’un regarde toujours quelqu’un en train de faire une image, de jouer dans une image ou encore de voir une image. Monte Hellman génère cette frontière transparente entre la réalité et la fiction, transparente, car finalement, le film ne dit plus s’il est une fiction, un faux documentaire ou une œuvre dans une œuvre. De ce fait, plus le récit avance, plus il devient flou et vaporeux comme le ferait un David Lynch. L’esthétique évolue ainsi vers un état fantomatique et obscur où les géographies sont éclatées, le fil narratif décousu et les silences sont pesants. Le réalisateur nous égare continuellement dans un jeu troublant et incertain. Par conséquent, il n’y a pas de conclusion hâtive, ni dans l’enquête menée autour de cette mystérieuse Laurel/Velma, ni dans l’histoire d’amour occulte entre cette dernière et Mitchell, tiraillé entre son film et sa muse. C’est alors un questionnement énigmatique sur notre rapport à l’image moderne qui peut s’inventer à tout instant, se voir tout le temps et que l’on interroge sans cesse, en somme un cheminement opaque vers le nul-part.