Le Prix Première 2025
Cette année, j'ai eu la chance de faire partie du jury du Prix Première, ce prix existe depuis 2007 et est décerné par la RTBF, la chaine publique de la radio et de la télévision en Communauté française de Belgique. Il récompense en premier roman francophone édité lors des rentrées littéraires de ...
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créée il y a 2 mois · modifiée il y a 13 joursBruno et Jean
Sortie : 4 octobre 2024 (France). Roman
livre de Pauline Valade
H Bazé a mis 8/10.
Annotation :
Dès le premier tour de table sur "Bruno et Jean", tout était clair. Pauline Valade allait remporter le Prix Première ! Et c'est tout à fait mérité !
L'historienne nous présente dans un puissant et sensible roman un fait divers des plus horribles : les derniers homosexuels condamnés à la peine capitale pour leurs amours en France en 1750.
L'une des forces de ce roman est justement le travail d'historienne de Pauline Valade. L'on sent qu'elle maitrise la période, l'a déjà étudiée, mais elle nous livre une histoire, une narration... ce n'est pas un essai et on est rapidement entrainé dans l'histoire de Bruno, de Jean et de tous leurs amis (aussi extravagants qu'intéressants).
Si le roman prend son temps et que le début peut paraitre "difficile", cela permet de s'inscrire davantage dans la vie et le destin des protagonistes. Pari réussi, donc !
Enfin, on appréciera particulièrement les extraits judiciaires officiels et véridiques qui se trouvent à la fin du roman, lors du procès. Ca nous rappelle que ce roman se centre sur une histoire réelle, lorsque l'homosexualité était un crime puni de la pire des manières (la Révolution française viendra, en 1791, la dépénaliser officiellement - même si le chemin vers l'égalité sera encore long...).
Mythologie du .12 (2024)
Sortie : 22 août 2024. Roman
livre de Célestin de Meeûs
H Bazé a mis 8/10.
Annotation :
Mon coup de cœur de cette sélection (qui malheureusement n'a pas été partagé par les autres membres du jury - j'exagère avec l'adverbe ci-avant, j'aimais beaucoup le livre lauréat aussi).
J'ai été happé par l'écriture très poétique de Célestin de Meeûs (ce qui est logique puisqu'il est déjà l'auteur de deux recueils poétiques - Célestin n'est donc pas novice dans l'écriture). Il m'a emmené sans difficulté dans son esthétique qui m'a fait penser à celle de José Saramago.
Concernant l'histoire, j'ai adoré cette histoire de double solitude : celle des deux jeunes perdus dans une société "qui ne les comprend pas" et celle de ce vieux médecin réactionnaire enfermé dans cette vie "bien méritée".
Alors certes, on comprend assez vite où on va, on se doute du climax de ce roman ; mais ça n'enlève rien au plaisir qu'on en tire.
Encore plus que les autres, j'attends avec impatience les autres livres de Célestin de Meeûs et envisage plus que sérieusement de tester sa poésie.
Ma fille
Sortie : 8 janvier 2025 (France). Roman
livre de Mathilde Dondeyne
H Bazé a mis 7/10.
Annotation :
Si l'histoire de ce roman et la manière dont elle se déploie peuvent dérouter, paraitre trop simplistes, trop superficielles, voire trop "miraculeuses" sur la fin, j'ai été complètement happé par cette lecture.
Les deux raisons principales sont probablement l'endroit où je l'ai lu (quasi intégralement en étant aux thermes, donc dans un espace de cocooning parfait) et le fait que je sois profs dans une école "pas si facile" (j'aime pas le mot difficile) et je me suis donc identifié assez vite au personnage principale.
Certes, mon appréciation du livre en est durablement imprégnée, mais c'est ça aussi la culture : vivre une expérience différente en fonction de la la qualité de l'œuvre, mais aussi du contexte de découverte.
J'ai donc plongé facilement et directement dans ce livre au point qu'il obtient facilement la troisième place du podium (il y a match serré avec "Tombée du ciel").
J'ai vécu les difficultés professionnelles et relationnelles d'Irène. J'ai apprécié l'aspect égocentrique de ce personnage (on la croit faible et malheureuse - ce qu'elle est en partie -, mais on comprend qu'elle ne fait juste pas attention aux autres, à celles et eux qui veulent vraiment l'aider).
Tout au long du roman, on s'attend à des fils narratifs évidents, mais Mathilde Dondeyne parvient à les éviter et à décrire avec précision une relation explosive et questionnable entre une prof et son élève.
En bref, une très agréable lecture qui gagne à être découverte et qui me fait attendre avec impatience le prochain livre de l'autrice.
Tombée du ciel (2024)
Sortie : 22 août 2024. Roman
livre de Alice Develey
H Bazé a mis 7/10.
Annotation :
Un roman coup de poing.
On sent très vite qu'il y a une forte dose d'autobiographie dans ce roman qui nous parle de l'internement d'Alice pour anorexie et tentatives de suicide.
Le roman est viscéral, on sent la détresse du personnage principal et on ressent ses douleurs physiques et mentales, mais aussi des autres patientes.
Le sujet, particulièrement touchant (la détresse d'enfants), ne peut laisser personne indifférent. Le livre souffrira malheureusement de deux points liés à celui-ci : une comparaison quasi obligatoire avec "Les Dragons" de Jérôme (2023) qui ne peut qu'être au détriment de "Tombée du ciel" ; et un sentiment d'écriture thérapeutique (ce qui nous retire de la "fiction" à certains moments).
Dans ce livre, les adultes sont présentés comme lamentables. On a envie de les secouer continuellement (jusqu'à la fameuse lettre), mais c'est lié à l'aspect journal intime (très immersif pour le coup) et ce n'est donc pas un problème majeur.
Pour le reste, le livre souffre du syndrome du Premier roman classique avec quelques confusions et redondances ; rien cependant qui n'empêche le livre d'être une expérience intéressante.
Enfin, je finirai en pointant une phrase de la page 72 qui donne le ton (et m'a particulièrement plu) : "Mais moi, comment je pourrais croire en un dieu qui laisse souffrir ses enfants ?"
Le Chagrin moderne (2024)
Sortie : 28 août 2024. Roman
livre de Quentin Jardon
H Bazé a mis 7/10.
Annotation :
Sur papier, ce roman m'attirait pas mal. Quentin Jardon est également connu pour avoir cocréé le magazine Wilfried (du journalisme indépendant d'investigation) que je ne connaissais que de nom mais savais qualitatif (maintenant, je suis abonné et je suis encore plus conscient de la qualité !). De plus, le pitch était intéressant : un humoriste engagé qui traverse un passage à vide et envisage d'abandonner femme et enfant sur une aire d'autoroute (enfin, de disparaitre plutôt... en leur laissant la voiture quand même).
Ca me faisait penser à du Fabcaro. Et donc ça m'intéressait.
Le résultat fut à la hauteur de mes attentes, avec les défauts inhérents des premiers romans.
Longtemps, on suit les réflexions et les questionnements de cet humoriste et on s'identifie à lui. L'excellent titre choisi par Quentin Jardon reflète parfaitement le poids du monde qui pèse sur les épaules de la classe moyenne "haute", avec tout le sarcasme qu'une telle expression suppose. L'écriture est fluide, tout en étant érudite.
En somme, tout fonctionne très bien... jusqu'à un certain point dans l'histoire (que je ne dévoilerai pas) où Quentin Jardon se perd un peu. En résultent un protagoniste un peu trop "ouin-ouin" et une temporalité parfois confuse (sans parler du personnage de David qui est amusément absurde la première fois, mais devient pénible dès son retour).
En bref, et parce que c'est ça qu'il faut retenir, une très chouette lecture qui, si elle n'est pas parfaite, annonce une suite de carrière intéressante (et l'auteur m'a confirmé qu'il était sur un autre projet).
Pas d'ici (2025)
Sortie : 1 janvier 2025. Roman
livre de Espérance Garçonnat
H Bazé a mis 7/10.
Annotation :
Ce livre apparait à la sixième place sur dix dans cette liste... je reconnais que c'est assez mal payé.
Espérance Garçonnat nous offre un voyage crédible dans cette ile italienne, on ressent les lieux visités par Pezzettino et on les parcourt avec lui sans difficulté.
Ajoutons à cela un style léché et des scènes oscillant parfaitement entre érotisme et pudeur (tout ce que j'aime !). Les différents personnages sont bien écrits et plutôt intéressants. En bref, un premier (!) roman au style irréprochable et d'une certaine douceur.
Et pourtant... je ne le mets que sixième. C'est dur, mais ça s'explique par une sorte de promesse non tenue et par des fils narratifs non conclus (ce qui m'a frustré). Il reste trop de questions à la fin de la lecture. Trop d'interrogations sur le passé, le but et l'origine de Pezzettino (ça pourrait ne pas être dérangeant, mais Espérance Garçonnat nous le tease un peu trop). Dans la même idée, la fin m'a paru "forcée", comme si l'autrice ne savait pas comment terminer ou arrivait au bout des signes autorisés par l'éditeur. Les mystères saupoudrés tout au long de la lecture n'en sont finalement pas, et c'est dommage.
Malgré ce paragraphe incisif et peu positif, j'ai vraiment apprécié la lecture et la poésie de ce roman et le conseille fortement (peut-être même plus que certains romans ci-dessus). Et à l'inverse d'autres auteurices de cette liste, je suis persuadé qu'Espérance Garçonnat a un futur en littérature et nous proposera d'autres belles choses...
Challah la danse (2024)
Sortie : 19 août 2024. Roman
livre de Dalya Daoud
H Bazé a mis 7/10.
Annotation :
Si je devais résumer mon expérience de lecture en quelques mots, je dirais "efficace, mais pas marquant". Ca parait dur dit comme ça, mais c'est un bon résumé.
J'ai apprécié les moments passés avec les personnages assez touchants, j'ai apprécié l'aspect sociologique qui se dégageait de ce roman, ainsi que le principe général qui consiste en une longue fresque d'historiettes qui, au final, proposent un tableau assez complet des familles d'origine magrébine de cet petit village français.
Bien évidemment, qui dit Maghreb, petit village et sociologie sous-entend la présence de racisme et on n'y coupera pas ; mais ça ne fait pas le centre de ce livre (et c'est un point positif).
En somme, une lecture agréable, mais qui n'aura pas eu la poésie ou la profondeur de certaines autres....
Une trajectoire exemplaire
Sortie : 15 août 2024 (France).
livre de Nagui Zinet
H Bazé a mis 3/10.
Annotation :
J'avais choisi de commencer par celui-ci. Pour la simple et bonne raison que c'était le plus court.
Mais la quatrième de couverture, présentant un looser magnifique, m'intriguait et m'intéressait.
Malheureusement, je ne m'y suis pas retrouvé du tout.
Si le personnage est en effet un looser, il n'est en rien "magnifique" et est plutôt odieux et agaçant. Je n'ai rien contre les personnages odieux ou choquant, mais j'ai ressenti ici une gradation gratuite du pire et du choc. L'auteur fait preuve d'un cynisme continu qui en devient lassant, car il n'ouvre aucune porte d'entrée ou de sortie ou d'échappatoire quelconque...
Quelques points positifs tout de même.
C'est une lecture rapide et l'auteur possède un sens de la formule et une grande érudition (cela se sent avec toutes les citations que l'on retrouve) ; mais l'originalité principale tient dans l'utilisation d'une narration en "tu" qui offre une drôle d'immersion.
En bref, une lecture décevante, mais qui m'intrigue sur le futur de l'auteur (je serai peut-être client de son deuxième livre).
La Femme du lac (2025)
Sortie : 2 janvier 2025. Roman
livre de Sandra de Vivies
H Bazé a mis 3/10.
Annotation :
"La Femme du lac" est un livre à la structure et à l'architecture intéressantes et originales. C'est un roman difficilement classable, entre roman, essai et livre-photos... on pourrait presque y voir une sorte de monologue théâtrale...
En somme, ça devrait être une lecture intrigante, intéressante et enrichissante... malheureusement, je suis passé complètement à côté. Je n'ai rien "compris".
Sans trop savoir pourquoi d'ailleurs... trop exigeant ? l'absence de ponctuation ? les changements de ton ? l'histoire non linéaire ?
Je n'ai pas de réponse. Toutes ces raisons peuvent me plaire, mais ici ça n'a pas pris.
Je ne rejette pas Sandra de Vivies et son écriture pour autant et je retenterai peut-être l'aventure de "La Femme du lac" d'ici quelques années.
La Fiancée de personne (2024)
Sortie : 11 avril 2024. Roman
livre de Ava Weissmann
H Bazé a mis 2/10.
Annotation :
Ce livre était probablement celui qui m'intriguait le plus (par m'intéressait, m'intriguait). Et par conséquent celui qui m'a le plus déçu.
Le résumé présentait cette femme vengeresse qui, sur base d'une échelle du connard (formidable invention !), décide de supprimer les fameux connards. Déjà ça, c'est amusant et intéressant. Ajoutons à cela la manière de tuer : à la fin d'une fellation, lorsque le mec se libère et est le plus vulnérable... GNAC, elle tranche le membre d'un coup de dents.
Une enquête de police se met donc à la poursuite de cette serial killeuse, baptisée fort à propos la bittovore.
Enfin... pas la. LE. (j'y reviendrai)
Une fois ce synopsis en tête, on s'attend à un roman décalé, complètement barré et très drôle. On s'attend même à trouver une portée politique dans ces temps où le féminisme a été catégorisé de "combat woke et extrémiste".
Donc, on est intrigué et on commencer même à être intéressé.
Et non.
Pas. Du. Tout.
C'est décalé, c'est barré, il y a quelques bonnes idées (une narration en "tu" très dynamique, cette fameuse échelle du connard, la playlist de la bittovore), mais c'est juste gore et excessif.
La portée politique disparait dans une vague de pornographie inutile et exagérée.
Le sexe est présent - c'est attendu et accepté - mais là il est OMNIprésent. La protagoniste passe son temps à baiser (on n'est au-delà du vocable "faire l'amour" ici) tout ce qui se présente à elle : ses victimes, son voisin de palier dépressif, l'amant de son patron, les invités de son patron à une orgie, une dame qu'elle a rencontrée à cette orgie, le flic ténébreux qui fait tomber toutes les femmes par sa simple voix, etc. tout le temps, tout le monde. Lorsqu'elle choisit ses victimes (pour des raisons de plus en plus friables), ces dernières sont immédiatement d'accord de coucher, qu'importe le lieu (genre l'arrière-boutique d'un magasin bio).
J'ai cité l'absurdité de ce policier qui - pareil - aurait pu être un personnage intéressant, mais est juste rendu excessivement sexy (il parle et paf toutes les femmes veulent lui faire l'amour) alors qu'il traine une maladie mentale et un mal-être extrêmes jamais abordés. Et je ne parlerai même pas de ses acolytes qui sont aussi plats que stéréotypés et inutiles (un exemple : ces deux lourdauds sont persuadés que ces meurtres ne peuvent qu'être liés à un monde homosexuel underground - d'où la masculinisation du surnom de la serial killeuse).
En fait, ce livre est juste sordide.
Malgré ça, je suis


