Thèse

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Mon livre de l'année.

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Très intéressant, une petite synthèse sur l'origine du terme de mème, sa théorisation au sein de l'univers internet, et des exemples. En fait ce qui m'intéresse, c'est la création et dispersion de mèmes au sein d'une communauté, et comment les traits d'écriture peuvent aussi subir une dispersion mémétique.

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Formidable. Ou comment prendre la hauteur par rapport à nos pratiques les plus quotidiennes. Cela permet de penser la culture et l'environnement numériques comme, justement, des cultures, pas seulement des techniques : donc la manière dont nos existences se modèlent sur et modèlent les outils. Doueihi identifie aussi des phénomènes de continuité, bien sûr, mais analyse comment cette transition numérique nous amène à redéfinir des conceptions anciennes, nous qui venons de la culture de l'imprimé : qu'est-ce qu'un auteur, comment s'archive le savoir / la mémoire, comment édite-t-on et donne-t-on de la valeur au contenu édité, qu'est-ce qu'un document ou du contenu... Il fait fréquemment des expériences de pensée à partir de concepts / textes anciens, voire antiques et c'est passionnant. Et puis ce terme de conversion, indispensable pour saisir les mutations des objets culturels et des concepts anciens.

Quand il se fait visionnaire (ce bouquin sort en 2008) c'est moins pertinent, car il parie fort sur certains outils aujourd'hui complètement disparus de nos horizons d'internautes. Mais il a su anticiper les réseaux sociaux basés sur la voix (il pensait à l'échange horizontal de podcasts et à la création de communauté d'échanges autour de cela), c'était voir ce qu'est devenu Youtube mais sans la vidéo.

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Il reprend beaucoup des réflexions du bouquin précédent mais en montrant comment cela affecte la production de la connaissance et la classification des disciplines SHS, appelées à se repositionner pour intégrer une réflexion qui fasse du numérique un thème, un moyen, mais aussi un levier heuristique pour repenser tout un tas de concepts hérités de l'humanisme qui nous vient de la culture de l'imprimé. Reconfigurer les savoirs, les documents et leur accès, les rôles de chacun-e...

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Conférence qui pour l'essentiel ne fait que synthétiser les notions approfondies dans les deux bouquins précédents. C'est intéressant quand on a peu de temps à consacrer au sujet, moins quand on a lu les autres et qu'on espère des éclairages nouveaux !

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Le souci avec ce livre (dont l'auteur est issu des sciences de l'information et de la communication), c'est qu'il propose à mes yeux une définition beaucoup trop étroite de la littérature numérique : ne serait LN que ce qui se produit avec des outils numériques, pour des outils numériques, et proposant une réflexion sur ces outils. Outre le fait que toute littérature n'a pas à proposer de réflexion sur ses moyens (coucou le méta), il existe toute une panoplie d'écritures web qui se voient exclues d'office sous prétexte que les créateurs ne savent pas coder et donc ne font qu'exploiter des logiciels / plateformes préexistants (littérature-blog, littérature-réseaux (youtube, twitter, insta), littérature-forum). Après je trouve formidable l'aperçu de cette nébuleuse dont j'ignorais tout, formidable la finesse conceptuelle de l'auteur (qui est aussi créateur) et la manière dont il déploie des concepts dont je pourrai me ressaisir. Mais j'avais devant ce livre un sentiment d'attraction-répulsion !

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Excellent livre de mon directeur de thèse. Il y élabore une poétique des écritures-blog (c'est-à-dire celleux des écrivain-es numériques qui s'éditorialisent depuis un site personnel ou un blog), avec de précieux outils repensés depuis l'histoire et la théorie littéraires classiques. Écriture fine et intelligente, fréquentes analyses d'exemples (captures d'écran en sus), cela élabore de précieux outils pour prendre de la distance avec cette manière qu'a la littérature de se saisir des virtualités du web, ainsi qu'un aperçu du champ concerné comme nébuleuse de création. A prolonger l'ordinateur entre les mains !

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Très bonne synthèse des approches sociologiques d'Internet, thématisée selon les catégories sociologiques traditionnelles (sociabilité, économie, journalisme, politique...)

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Patchwork d'articles sur nos pratiques en ligne. La qualité est souvent au rendez-vous, parfois où on ne l'attendait pas : l'article le plus génial concerne les communautés en ligne de... tricoteuses. Ou comment finement allier l'analyse de la manière dont les relations en ligne reconfigurent une pratique quotidienne souvent liée à l'espace domestique et tributaire d'acteurs économiques à la notion d'empowerment : des femmes qui revendiquent le tricot comme pratique créative et liante.

Article très bien fait sur les forums en ligne, à exploiter.

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Livre décevant, qui se résume le plus souvent à une fastidieuse liste de pratiques (sans jamais les analyser). Réfute dès la préface toute pensée de sociologisation : ce qui est débile quand on s'attaque à une question sociologique, évidemment... comme si les publics de lecteur-ices étaient neutres. C'est naïf et bête. Heureusement que les témoignages sont en eux-mêmes intéressants, et invitent à une relecture plus personnelle.

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Long et fastidieux... surtout les parties (les plus longues) concernant politique et économie. Mais c'est un très bon essai malgré tout, bien qu'il soit parfois difficile de suivre au début lorsqu'il rentre de près dans des considérations technologiques.

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Notion d'hypertexte, littérature au second degré. Quelle finesse ; mettre le mot juste sur le phénomène littéraire à l'œuvre, c'est mieux comprendre les textes et les relations entre eux. Evidemment avec les littératures numériques, toutes ces notions de réécriture, parodie, pastiche, trouvent à se réactiver dans les nombreux procédés de collage, ou jeux communautaires de reprises et citations...

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Bof bof bof... ça oscille entre des participations oiseuses et verbeuses (on mesure le manque abyssal de culture littéraire des intervenant-es, ou leur propension à imiter les vrai-es écrivain-es en obscurcissant une prose qui n'en méritait pas tant) et quelques-unes (rares) plus intéressantes. Grosse déception.

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Un peu déçue, peut-être parce que j'en attendais une réelle interrogation sur la définition de l'amateurisme et sa redéfinition dans un contexte où l'éditorialisation en ligne se passe d'intermédiaires légitimants. Or, les trois parties (image / son / texte, grossièrement) éludent cette question, chacune à leur manière, définissant l'amateur comme le non-professionnel (ce qui ne veut rien dire, évidemment). C'est d'autant plus étonnant que les cas limite explorés auraient dû mettre les autrices sur la piste de cette question pourtant fondamentale, et qui a trait à la valeur : elles voient bien que certain-es artistes se passent des intermédiaires, et que la professionnalisation des artistes date du XIXème siècle, alors... bon. Au moins, c'est un bon exposé de pratiques, souvent bien analysées, mais je suis très, très loin de partager toutes les conclusions des autrices.

Un bon point en revanche pour l'analyse pointue que fait Anaïs Guilet de la publication feuilletonnesque des fanfictions, et de la continuité historique avec les publications en feuilletons dans les journaux à grand tirage du XIXème siècle (littérature de masse, populaire, qui contribua à l'édification de genres, comme le roman d'aventure ou le roman à l'eau de rose, qui voient leur prolongation aujourd'hui dans nombre d'écrits amateurs en ligne)

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Casilli analyse les trois grand mythes qui entourent Internet :
- Internet comme espace idéal
- le corps sur Internet comme ange désincarné
- Internet désocialisant
Puis les confronte aux études sociologiques, tout en montrant la diversité des méthodes et des écoles sociologiques, depuis les années 80, qui se sont penchées sur les réseaux sociaux numériques et les espaces numériques en général. Cela émaillé de témoignages individuels et d'analyses des terrains expérimentés par le sociologue, et un ton d'humour. Très bon livre, qui change des sociologies d'internet lues jusqu'ici, moins enracinées dans la culture internet qui me semble être notre quotidien.

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Excellente analyse des mystifications littéraires, et qui en propose une catégorisation fortement inspirée des catégories genettiennes (dans Palimpsestes mais aussi dans Seuils). Suppositions d'auteur et mise en place des mystifications, esthétiques du dispositif, prises dans une durée, recours au pastiche collectif ou imaginaire, création d'un idiolecte et de biographèmes, mise en place d'indices et de réversibilité des rôles au sein d'un jeu de société fortement ritualisé... particulièrement utile pour penser la généalogie des double-comptes hétéronymes sur les forums d'écriture, et la manière dont ils convertissent la tradition de l'hétéronymat littéraire.

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Analyse de deux communautés d'écrivain·es en ligne, l'une la liste de diffusion e-critures (composée de créateur·ices et chercheur·euses en littérature numérique) et l'autre le site ecrits...vains ?, aujourd'hui disparu. C'est intéressant même si c'est souvent à charge contre la seconde communauté, qui importerait un peu trop en ligne la littérature imprimée, sans saisir les possibles de l'outil numérique. Bon... je trouve ça un peu naïf, et l'opposition entre les deux champs de pratiques ne me semble pas posée dans les bons termes.

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Marie-Anne Paveau présente avec ce dictionnaire une série d'entrées qui permettent de se détacher de la comparaison avec le prénumérique lorsqu'on applique les théories linguistiques au numérique. Les corpus sont subjectifs, mais surtout composites : ils intègrent une dimension technologique et langagière, sans juxtaposition mais par réelle coécriture. En fait c'est génial pour penser l'intrication entre les CMS / l'organisation des écosystèmes numériques et leur appropriation par les usagers (ex du technogenre thread de forum, ou twitt). Elle fait également une intéressante distinction entre technogenres prescrits / négociés / produsés (dans le premier cas, fortement prescrits techniquement, comme l'éditorialisation d'un profil sur un forum ; dans le second cas, importation de genres prénumériques en ligne où ils se reconfigurent, comme l'article de blog ; dans le dernier cas, création par les usagers de genres neufs, comme celui de la pancarte militante ou du mème sous forme de technographisme). Enfin elle dresse une liste de caractéristiques des technodiscours, indispensable à la compréhension du statut de l'écrit en ligne : délinéarisé, composite, plurisémiotique, subjectif, imprévisible...

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Excellent ouvrage, fondamental pour se décentrer un peu de nos conceptions contemporaines de la lecture (et par conséquent pour mieux comprendre les mutations de ce rapport). On y voit ce support, devenu transparent, du livre, évoluer depuis les papyrus jusqu'à l'imprimé, et toute l'institution éditoriale se mettre en place. On voit aussi comment la lecture en retour influence les sociétés : émergence du protestantisme grâce en partie aux tracts diffusés à grande échelle dans toute l'Europe du 16e siècle. Et comment les représentations influencent les pratiques de lecture : ces Grec·ques pour qui le texte écrit n'était qu'une notation mémorielle, destinée à être réactivée par le logos tout puissant (et par un esclave lecteur, car se subordonner au logos d'autrui était infâme) ; ces scholastiques qui n'accédaient aux textes originels que par la médiations d'abrégés et de de gloses ; ces humanistes et leurs cahiers de citations, florilèges de lieux communs à réinvestir dans leurs propres écrits... le seul mauvais chapitre est le dernier, consacré au monde contemporain de la fin des années 90, tout sauf visionnaire et surtout sacrément réactionnaire.

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J'ai beaucoup tiqué sur la distinction réel/virtuel et sur les analyses psychologiques (moralisantes) à base d'internautes incapables de faire le distingo réel-virtuel. Forcément après avoir lu Marie-Anne Paveau... ces distinctions semblent reposer davantage sur un préjugé que sur une réalité observable.
En dehors de ces problèmes terminologiques et de deux ou trois jugements moraux balourds en fin de chapitres, Fanny Georges propose une catégorisation fine pour décrire l'identité numérique, et propose également de travailler à partir de métaphores (ce qui ne me convainquait pas au début mais qui est en réalité extrêmement intéressant si on comprend bien que les métaphores sont la manière dont on subjective des objets inédits afin de les manier, et que c'est bien le processus cognitif à l'œuvre chez les internautes et qui commande aussi les choix des concepteur·ices). Métaphore du soi (le profil utilisateur), du chez soi (lien entre ce profil et l'interface) et du flux (indices de vivance en ligne qui servent à métaphoriser la présence et la fréquence). Pas trop mal !

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Collot n'aime que la poésie lyrique, et le fait bien comprendre (en particulier en adoptant une lecture simpliste de toutes les poésies textuelles / littéralistes qu'il cite).
La première partie dresse une chronologie intéressante de la poésie française depuis les années 70 ; en effet, Collot se plaint que les entreprises d'envergure de ce type aient relégué les écritures lyriques dans un coin, offrant un aperçu tronqué de la production contemporaine (on pense à l'anthologie critique Un nouveau monde, réalisée par Isabelle Garron et Yves di Manno). Du coup il tombe dans l'excès inverse, mais bon, ça permet de contrebalancer ma vision des choses.
Il développe des concepts un peu flous (à mon sens) sur ce renouveau lyrique qui bâtirait un lyrisme non plus tourné vers l'intériorité / la sentimentalité du poète, comme dans le lyrisme romantique, mais vers le Monde, à travers les paysages et le rapport aux territoires (il parle beaucoup d'écopoétique, d'écologie). Ce serait donc un lyrisme moins subjectif, puisque c'est dans cette interaction Monde-Langage-Sujet que naît le poème. Bon, ça vaut ce que ça vaut.
Par contre Collot a oublié qu'en 2019, les femmes écrivaient. Sur la dizaine d'études de fin d'ouvrage, pas une d'entre elles, et les rares qu'il cite le sont très sporadiquement, sans analyse. On peut s'étonner de l'absence de Valérie Rouzeau qui correspond pourtant bien à ce qui devrait lui plaire. Pas un seul mot sur Quintane ! ça c'est fort de café.

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Ce livre, tiré d'un travail doctoral, est une merveille. L'autrice y analyse une constellation d'œuvres qu'elle appelle factographies ; ces œuvres, explique-t-elle, n'ont jamais vraiment été pensées ensemble, alors même qu'elles partagent un grand nombre de traits. Ce sont des œuvres qui travaillent à partir de documents / de scènes vues / de discours lus, sous forme de recueil de fragments, et sans commentaire auctorial. Elles ne sont pas narratives, se rapprochent des arts du collage ou du ready made, et mettent en place un dispositif proche des installations où c'est le spectateur qui agit pour créer du sens, qui entre en interactions avec un ensemble de choses pensées pour qu'il puisse vivre une expérience singulière et entière.
Elle replace ensuite ces œuvres (Témoignage, de Reznikoff, Journal du dehors, d'Ernaux, Stalingrad, de Kluge, Récits d'Ellis Island, de Perec et Faits de Cohen) dans un paysage plus large, celui de la tentation littérale de la littérature depuis le XXe siècle (toucher au neutre, ne pas créer mais choisir et recontextualiser, ne pas donner d'interprétation toute faite) et celui des arts contemporains, qui opèrent ce même travail sur le document, interrogé plutôt qu'interprété.
Tout cela en reparcourant les grandes théories littéraires, en les faisant jouer, et en les appliquant très concrètement au corpus qu'elle étudie. Magistral ! Et très utile pour moi sur les questions de travail du document, cette belle analogie du montage cinématographique, etc.