Top 10 Livres: "Si comme moi, tu n'as jamais rien compris à la littérature, cette liste est faite pour toi !"

Annotation :

Proust est un auteur à part dans l'histoire de la critique littéraire. N'ayant jamais écrit un seul essai sur la littérature à proprement parler, il a pourtant renversé toutes les conceptions de l'analyse critique. En disséminant ses théories sur la littérature aux quatre coins de son Oeuvre, Proust est, selon moi, l'auteur qui a permis la transition entre la critique classique et la critique moderne.

Le Contre Sainte-Beuve est une sorte de condensé (si on peut le dire ainsi) de toute sa réflexion sur la littérature. Outre ses divagations et digressions sur tous les thèmes possibles et inimaginables, cet essai dénonce particulièrement les pratiques critiques de Sainte-Beuve. Auteur très à la mode de la fin du XIXe, celui-ci est le fondateur de ce qu'on appelle aujourd'hui "la critique biographique", qui consistait à analyser une oeuvre en fonction de la vie de l'auteur. Au contraire, Proust dissocie l'homme de société de l'homme-auteur; il n'est donc foncièrement pas possible selon lui d'analyser une oeuvre en fonction des connaissances de la vie de l'auteur.

Mais je laisse la parole à Proust:
"un livre est le produit d'un autre moi que celui que nous manifestons dans nos habitudes, dans la société, dans nos vices. Ce moi-là, si nous voulons essayer de le comprendre, c'est au fond de nous-mêmes, en essayant de le recréer en nous, que nous pouvons y parvenir. Rien ne peut nous dispenser de cet effort de notre coeur. Cette vérité, il nous faut la faire de toutes pièces et il est trop facile de croire qu'elle nous arrivera, un beau matin, dans notre courrier, sous forme d'une lettre inédite, qu'un bibliothécaire de nos amis nous communiquera, ou que nous la recueillerons de la bouche de quelqu'un, qui a beaucoup connu l'auteur".

Annotation :

Dans un style très littéraire, cet essai critique est, selon moi, le dernier en date qui vaut le détour. On attend depuis qu'un autre auteur reprenne le flambeau.

Définition du roman par Julien Gracq: "Un Eden des passions en liberté".

Annotation :

Ah sacré Gilles!! Je l'ai lu à l'époque où j'étais en prépa, à l'époque où je devais lire Proust. A ce moment-là de ma vie, je n'étais pas encore un grand fan de ce dernier. Puis j'ai lu Deleuze. Et puis j'ai dévoré toute l'oeuvre de Proust. Et puis j'ai relu Deleuze. Et là j'ai compris: ce mec, en une phrase, a tout compris.

"Nous reconnaissons les choses, nous ne les connaissons pas".

Annotation :

Toute la recherche herméneutique sur la littérature instigué par Barthes, suivi par Ricoeur et bien d'autres, est résumée et magnifiée dans cet essai.

"Nous faisons tous cette expérience quotidienne d’une impatience qui se complaît en elle-même, de ce plaisir apparemment paradoxal que nous tirons de notre insatisfaction provisoire, de cette incertitude pleinement assumée face à un récit inachevé."

Annotation :

Barthes appartient à cette nouvelle vague de critique qui apparaît dans les années 50, et qui renverse tous les codes traditionnels de la critique littéraire. Fondateur du courant critique "structuralisme", sa grande idée de base fut d'analyser l'oeuvre en elle-même, sans préoccupation de l'auteur, ni du temps à laquelle elle fut écrite. Ainsi, l'oeuvre ne peut être comprise qu'en elle-même, et non par les phénomènes extérieures à elle.

En ce qui concerne cet essai, si tu trouves Racine rébarbatif et ennuyeux, lis donc cette oeuvre de Barthes, tu comprendras pourquoi Racine est un génie.

"L'auteur est mort".

Annotation :

Je me souviens avoir lu en parallèle les "Figures" de Genette et les "Variétés" de Paul Valéry. Et bien que la première soit forte intéressante, elle n'égale pas l'oeuvre de Paul Valéry, qui dans un style très simple et très direct, pose les règles qui ont gouverné la littérature.

"La forme seule conserve les oeuvres de l'esprit."

Annotation :

L'origine de la critique littéraire, c'est lui. Ce bon vieux Aristote, vieux de près de 2500 ans, avait tout compris de la littérature avant même qu'elle se nomme "littérature". C'est lui entre autre qui a posé les fondamentaux de la tragédie, des règles qui seront ensuite repris par les plus grands tragédiens de notre ère (Racine et Corneille entre autre).

"Il n'y a point de génie sans grain de folie".

Annotation :

Genette, l'une des figures de proue de la critique littéraire moderne, repose les fondamentaux du récit à travers cet extrait de Figures III, par l'intermédiaire d'une analyse sur Proust. Bon après, c'est assez rébarbatif comme lecture, parce qu'il emploie un langage très technique; mais si on s'accroche, ça vous change la vie (ou presque).

Annotation :

Toute les règles classiques sur la poésie condensé dans cette oeuvre... écrite entièrement en alexandrin. Oui Monsieur!

"Avant donc que d'écrire, apprenez à penser."

Annotation :

Bon, en temps normal, je n'aurais jamais mis du Victor Hugo dans une de mes listes. Mais il faut bien reconnaître que cette préface est bien le seul écrit de ce cher Hugo que j'apprécie. Et même s'il ne fait que répéter et qu'expliciter ce qu'avait dit Stendhal dans "Racine et Shakespeare", il faut admettre que cette préface est le fondement du romantisme, puisqu'il crée un nouveau genre théâtral: le drame romantique. Véritable cassure avec les codes classiques théâtrales de l'époque, Victor Hugo estime que la tragédie est dépassée, qu'il ne faut plus respecter les unités de lieu, de temps, et d'action, qu'il ne faut plus user de la bienséance et de la vraisemblance, mais surtout, qu'il faut privilégier désormais la prose aux alexandrins.

L'ironie de l'histoire, c'est qu'aussi convaincant puisse être cette préface, la pièce de théâtre qui la suit, "Cromwell", est de loin le pire écrit de Victor Hugo, et l'un de ces plus grands échecs.

"J'ai jeté le vers noble au chien noir de la prose".