Tertullian destroys pagantards with facts and logic

J'ai de très mauvais souvenirs de mes cours de latin, mais je crois que Tertullien m'a définitivement réconcilié avec cette langue. Rarement je n'ai été aussi impressionné par cette maîtrise de la formule, par la beauté des mots et par l'élégance de la rhétorique. L'Apologétique, violent discours prononcé à l'encontre du proconsul de Carthage pendant les persécutions des chrétiens, est en effet une magnifique démonstration d'éloquence, et le verbe employé par l'auteur est tout à fait saisissant lors des passages de réquisitoire ; implacablement grandiose lorsqu'il s'agit de louer sa religion et son Dieu. Certains passages donnent le vertige : ainsi, la comparaison des chrétiens à une "ligue et une congrégation pour assiéger Dieu de [leurs] prières, comme en bataillon serré" est à la fois surprenante et déroutante pour le lecteur, mais donne aussi l'ampleur de la foi des fidèles martyrisés, avec une intensité que je n'avais jamais vu jusqu'alors.
Un autre aspect qui m'a tout autant plu, c'est le fourmillement de détails et d'anecdotes, propre à la littérature antique, qu'on peut trouver sur la vie des hommes au IIe siècle après Jésus-Christ. Entendre toutes les rumeurs infondées qui visent les chrétiens, propagées par les païens, prête à sourire : ainsi, ceux-ci idolâtreraient en réalité un âne, un bâton, ou pratiqueraient l'inceste, d'après leurs détracteurs. On peut d'ailleurs noter que vis-à-vis de tout cela, Tertullien fait preuve d'un certain humour, ce qui est fort appréciable à la lecture. On trouve également beaucoup de moments sur des passages de l'Histoire, parfois très drôle (la beauferie des Macédoniens par exemple) ou très intéressants (j'ignorais tout des sacrifices d'enfants chez les Puniques), voire à certains égards, jetant un tout autre regard sur les mœurs de cet époque.
Mais évidemment, outre le style de l'orateur, et le plaisir qu'on peut tirer de la lecture, ce qui fait la grandeur de l'Apologétique, c'est l’impressionnante dévotion dont fait preuve l'auteur à l'égard du Seigneur. N'en déplaise à certains (et je ne vais pas me faire que des amis), on ne peut pas comprendre une telle œuvre si l'on est pas chrétien soit-même. C'est un livre qui se lit avec la foi au cœur, et qui servira certainement à raffermir celle-ci, pour tous les croyants qui prendront la peine de le parcourir. Une chose est sûre cependant, si vous êtes athées, ce n'est pas sa lecture qui vous convertira (voyez-m'en navré), mais peut-être y trouverez-vous de quoi passer agréablement quelques soirées, seul ou en compagnie de votre Gaffiot, pour les plus courageux.