Ishikawa Takuboku est un poète japonais né en 1885 au nord-est du Japon, dans la province d’Iwate. C’est un auteur du 19ème siècle, pourtant rien n’indique de décalage entre ce dernier et notre monde actuel et sa modernité.

En parallèle de son métier d’instituteur, il se passionne pour la poésie nouvelle, anime des groupes littéraires, et plus tard créera une revue. Il est adepte du haïku qui est une des formes traditionnelles de poèmes courts, ces derniers agrémentant le monde organisé de ses poèmes. Lorsque que l’on pense poète japonais, personnellement j’ai tendance à penser stéréotypes de sagesse, délicatesse, douceur et contemplation, là c’est délicatement différent, le jeune homme annonce la couleur, dès les premiers poèmes, la noirceur et le pessimisme de ses écrits sont déstabilisants. 

« Ceux que l’on oublie difficilement », paru en 1989 est un journal poétique qui enveloppe et fait sillonner au creux de la fin de vie de Takuboku, on y lit sa vision des soins (très beau poème sur les mains d’une infirmière), son retour aux sources, l’irruption de souvenirs. En effet, le poète est atteint de la tuberculose, qui l’éteindra à ses 27 ans (il fait donc parti du club des 27). Ce sont des vers tout en simplicité mais puissance, ce minimalisme concentre la sombreur de ses écrits :

 [ Je n’avais pas fini d’écrire l’amertume des vagabondages 

Que les mots du brouillon 

Sont difficiles à relire ]

[ Cette femme qui pleurait dans ma chambre

Était-elle souvenir d’un roman

 Ou de l’un de mes jours ]

La traduction est présente mais les kanji (en japonais, il existe trois types de caractères : les hiragana, les katakana et les kanji. Les hiragana et les katakana sont des symboles phonétiques. Chacun représente une syllabe. Les kanji sont des idéogrammes qui ont chacun leur sens propre) apportent cette touche graphique qui enjolive le recueil. C’est cependant peut être ici l’occidentale qui s’exprime et cherche la beauté là où elle se fait discrète. 

En faisant mes recherches, j’ai appris que ce poète est connu au Japon pour être le premier à avoir fait évoluer la tradition, en introduisant la ponctuation occidentale. Ainsi, cette audace que s’octroie Takuboku est peut être à l’image de sa liberté intérieure, transparente dans ses écrits ?

En lisant ses poèmes, mon esprit a vagabondé, les poèmes ont pris forme et les situations sont devenues visuellement vivantes; les maisons, les rues, les paysages envahissant mon espace. J’ai pensé au cinéma d’Ozu. La partie 2 du recueil m’a tout particulièrement touchée :

[ Dans la rue une silhouette qui te ressemblait 

Et mon cœur s’est réjoui

Quelle tristesse à cette pensée ]

[ En trois ans vinrent 

Trois fois de longues lettres 

J’en avais écrit quatre ]

L’édition est Arfuyen et cette dernière a aussi fait la traduction des poèmes de Margherita Guidacci, poétesse que j’aime beaucoup, et que je conseille aussi (Neurosuite) et bien sûr les recueils d’Emily Dickinson.

-Ys
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le 1 août 2022

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-Ysé-

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