C’est un auteur prometteur qu’est allée dénicher la Série Noire avec Frank Bill dont elle nous livre ce recueil de dix-sept nouvelles sur la misère et le crime dans l’Amérique rurale.
Dix-sept nouvelles noires dans des comtés perdus du Midwest ravagés par une crise qui rend plus prégnante une certaine arriération et pousse une population abandonnée à trouver d’autres sources de subsistance. Vendettas familiales. Règlements de comptes autour d’une des nouvelles ressources économiques de l’Amérique profonde, j’ai nommé le trafic de méthamphétamine qui permet aux rednecks non seulement de boucler leurs fins de mois, mais aussi d’oublier un peu le monde pourri dans lequel ils vivent. Combats de chiens et stress post-traumatique d’une jeunesse qui n’a quitté sa terre que pour mieux aller se faire trouer la peau en Afghanistan ou en Irak. Voilà la teneur de ces courtes histoires tragiques mettant en scène des hommes et des femmes poussés aux dernières extrémités à la fois par le poids de la tradition et par celui du vide de leurs vies dans une Amérique qui semble les avoir oublié.

Si chacune de ces nouvelles est bien ancrée dans une réalité contemporaine que viennent nous rappeler ces constantes références à la guerre contre le terrorisme ou au trafic de meth, Frank Bill montre toutefois une vie en vase clos, presque hors du temps, dans des coins paumés où tout le monde se connaît depuis toujours et où les haines bénéficient d’un temps infini pour mûrir avant d’éclater dans un déferlement de violence que la loi, inexistante ou corrompue, ne peut endiguer.

« Il avait mis le feu à la maison de son père pour toucher l’argent de l’assurance. Buté le chien d’Esther MacCullum sous le nez de ce dernier pour une sombre histoire de dette. Grimpé sur la fille de Needle Galloway, treize ans à l’époque. Défoncé le crâne de Nelson Anderson avec un marteau à la Leavenworth Tavern, parce que cet enfoiré l’avait ouvertement accusé d’avoir balancé Willie Dodson sur un deal intercomtés, alors qu’il avait agi pour le compte du shérif.
Et aujourd’hui, il venait de vendre sa petite-fille Audry, la P’tiote, au clan de Hill pour qu’elle tapine. Avec le fric qu’elle gagnerait, il pourrait payer les médicaments anticancéreux de sa femme Joséphine. Mouais, pas de doute, j’suis un enfant de salaud, pensa-t-il » (Vieilles rancoeurs).

Avec une écriture concise et nerveuse, directe, Frank Bill livre dix-sept nouvelles finement ciselées, vénéneuses et glaçantes… désespérées et désespérantes. C’est une bien belle découverte.
EncoreDuNoirYan
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le 10 févr. 2013

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