Peu féru de théâtre, je m'essayais pourtant
A goûter Bergerac, pas le vin mais Rostand.
D'abord timidement puis avec gourmandise,
Je dégustais le texte où bien des vantardises
Émanaient des Gascons, créatures au sang chaud
Qui pour un oui un non vous transperçaient la peau.
Le plus fameux d'entre eux, le sanguin Cyrano,
Portait bien haut le fer, à l'épée ou en mots.
Dans cette tragédie, des combats à l'amour,
Il n'y a guère qu'un pas et sans tourner autour
Les appâts de Roxane rendent les hommes fous,
On en fait tout un drame ; ainsi pleuvent les coups
Entre ceux qui l'admirent, ceux qui l'aiment ou l'adulent,
Il n'y a pas grand chose, à peine une virgule.
Entre le bel aspect ou la figure nasale,
Aveugle est bien l'amour, car il est anormal,
De chérir la prose, d'aimer les traits d'esprit
Et de choisir la rose en lieu de poésie.
Cyrano en coulisses, se devra de souffler
A celui qui de vers se montre dépourvu,
Le charmant est l'écho d'une grande vertu,
Elle appartient à l'autre qui demeure en retrait.
Ainsi de faux semblants jusqu'à la résurgence
D'un sang bleu au col haut, qui nourrit sa vengeance,
Dans le feu de la guerre, la faucheuse frappera,
En son noir cimetière Christian emportera.
En dépit des délices du gentil Ragueneau,
C'est alors au supplice que sera Cyrano,
De ne pouvoir avouer, à l'amour de sa vie,
Que pour une passion, tous les risques il a pris.
C'est alors que survient en cinquième partie,
Roxane est en couvent et ses cheveux sont gris,
Elle vit dans le souvenir de l'être disparu,
A lire toutes ses lettres, elle est encore émue ;
Rostand dévoile enfin dans un final troublant,
La mort de Cyrano qui de sa vie sans tâche,
Laisse entrevoir son cœur à la belle comprenant,
Que son cousin aimant ne fût que de panache.