"Tout - et je veux dire vraiment tout - était inclus dans ces premières secondes"

Le roman commence alors que Mattias apprend la mort de Samuel, un vieil ami qu'il a connu dans le village où il a grandi. Un ami hors du commun car il aurait pu être son père, homme solitaire qui vivait encore avec sa mère. Vivre est un bien grand mot, car l'on sent que parfois, Samuel se laissait simplement porter, sans vraiment vivre non plus.


C'est l'occasion pour Mattias de se rappeler. De son adolescence, de cette amitié pas toujours vue d'un très bon oeil par la mère de Mattias, vu l'écart d'âge j'imagine que l'on peut comprendre pourquoi. Mais l'adolescent et l'homme partageaient beaucoup. Une passion pour les timbres, et les papillons. L'absence du père. La même manière d'être un peu à l'écart du monde, des autres aussi. Pas incapable de se faire des amis mais souffrant d'une profonde solitude. Parfois, quand deux solitudes se trouvent, elles savent se consoler.


Les souvenirs de Mattias sont bons. On sent qu'il ne comprenait pas tout, que ses souvenirs s'éclairent au fil de nouvelles découvertes, ou parfois simplement parce qu'il porte dessus un regard d'adulte. On y parle d'amour, on y parle beaucoup d'amour car Samuel ne vivait que dans la mémoire de cet amour perdu, rencontré des années plus tôt, à l'adolescence. A l'âge où ce que l'ont vit et ressent nous frappe de plein fouet, plus fort, à l'âge où prendre du recul est impossible.


Il y a une forme de fatalité, on sent aussi une répétition dans les comportements et l'on espère que Mattias ne suivra pas le même chemin, qu'il saura trouver, lui, une manière de s'extirper de cette solitude qui va si mal aux hommes avant qu'il ne soit trop tard. La fatalité se trouve dans le récit de Samuel



Quelque chose de semblable t'est-il déjà arrivé ? Quand on comprend toute l'étendue d'une rencontre dans sa phase initiale ? Tout - et je veux vraiment dire tout - était inclus dans les premières secondes : le désir, l'exaltation, la beauté, l'abandon, la solitude, l'absence, la peine. Tout était là depuis le début et je ne pouvais rien faire d'autre que de me laisser emporter.



Ca a un côté magique, on sent le coup de foudre et l'intensité d'une première rencontre, cette connaissance innée aussi, venue de nulle part, de savoir que c'est cette personne, que ce sera cette personne. Mais pour Samuel, il y a aussi la fin. Le désir fait face à l'abandon comme s'il savait déjà qu'il n'avait pas le droit d'être heureux. La solitude parce qu'il n'a pas su retenir, l'absence parce qu'il a toujours cru qu'il ne méritait rien d'autre que d'être seul. La peine de porter un terrible secret dont il ne s'est jamais accordé le droit de se remettre.


A Mattias de se remettre pour lui et de s'accorder le droit, lui, d'être heureux.

Nomenale
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le 10 déc. 2017

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