"Quand ils franchissent la porte de la maison de retraite, les gens ne sont plus rien, si ce n'est des vieux qui n'ont plus la possibilité de rester chez eux. Leur histoire n'existe plus, leurs finances pompées un peu plus chaque mois, seuls leurs corps portent les stigmates d'une vie plus ou moins rude."
A-S Pelletier dénonce avec franchise, rigueur, et humanité, le "profit sans morale" qui règne dans le monde de la vieillesse, que ce soit les services de soin à domicile mais aussi les maisons de retraite. Elle relance cette honte bue de tous, détaille cette mise en coupe de la vieillesse à travers les services, les institutions, tout un système qui les rançonnent, et les maltraitent depuis des années, prenant les personnels qui tentent de s'en occuper, en étau.
Le manque d'effectif de base (0,6 agent patient), ou récurrent (faute de volonté de remplacer par du personnel qualifié), renvoie à l'enjeu de faire des économies sur le dos des anciens qui ont pourtant cotiser toute leur vie. Comme le dit l'auteur, "le sous effectif est une pathologie contre laquelle aucun traitement n'a été trouvé"...
Il en est de même du rationnement indécent des repas (coût moyen journalier en dessous de 4 euros) par référence aux prix moyen exorbitant d'une maison de retraite imposé au résident.
Dans le milieu, "les trois F" sont ainsi le sigle du soin quotidien rationné (figure, fesses, fauteuil)...
Tout cela alors qu'il s'agit de rentabiliser un marché pouvant être juteux, notamment dans les structures privées à but lucratif, au plus grand bénéfice de leurs actionnaires.
Se référer à l'article du Monde Diplomatique de mars 2019 (Philippe Baqué), qui place l'EHPAD privé comme plus rentable qu'un centre commercial. Les grandes fortunes de France ne s'y trompent pas, de même les investisseurs bancaires, fonds de retraite ou même les fonds souverains des Emirats Arabes unis.
Sans divulgacher, cet indispensable livre témoignage s'achève par un bel hommage poétique de la fille de l'auteur à sa mère.