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Trois histoires autour du sergent Byng, qui résoud les enquêtes sans sortir d'une salle.


Car ses méthodes d'investigation ne reposent pas seulement sur l'interprétation des indices, mais sur le coeur des hommes. L'écriture légèrement différente sur une enveloppe et sur une lettre ; le faible décalage temporel entre un meurtre et la découverte du corps, ce genre de détail minuscule va être retourné dans toutes les directions et ramené au caractère des différents protagonistes pour dresser le profil du meurtrier, ses motivations, etc... sans bouger de sa chaise. Les "enquêtes" sont généralement, après l'exposition, constituées par le monologue de l'enquêteur, qui expose devant son Watson/faire-valoir différentes hypothèses qu'il valide ou invalide au fur et à mesure, par arborescence, dans la plus pure tradition cartésienne sur la théorie mécaniste des passions.


Mais derrière, il n'y a pas de présupposé déterministe, contrairement à Sherlock Holmes. La morale est plutôt inverse : rien de ce qui est humain ne nous est étranger. Byng est un humaniste, foncièrement, et le ton des énigmes a toujours quelque chose d'un peu ironiquement désuet, cintré. Je me demande si Pessoa connaissait déjà Freud quand il a écrit cela. Je ne pense pas, ce sont des oeuvres assez précoces.


Ce qui compte, ce n'est pas la qualité de l'énigme, c'est l'élan du raisonnement qui vous prend, parfois vous noie, en tout cas vous emporte et vous donne à réfléchir sur ce qu'est la peur, ce qu'est la probité, ce qu'est la conscience, ce qu'est l'être humain.


Les influences les plus évidentes sont celles de Poe et de Gaboriau, avec quelques clins d'oeil également à Conan Doyle.


Alors attention, comme souvent avec Pessoa, il s'agit d'oeuvres incomplètes, de morceaux de chapitres patiemment mis bout à bout par de courageux chercheurs. Il manque donc des bouts de phrase, certaines transitions ne sont pas faites, ou il peut y avoir des redites ce qui peut être frustrant, mais on sent le canevas derrière. C'est brut de décoffrage. Et ne tenez pas compte de l'apparat critique qui propose maniaquement les variantes, elles sont rarement significatives et ne feront que couper votre lecture.


L'affaire du professeur de science : un professeur de physique est retrouvé sur le seuil de son laboratoire, le crâne fendu par un lourd pilon. Deux étudiants, un sérieux-stressé et une brute épaisse sont retrouvés sur les lieux, et leurs versions se contredisent.


Le sergent débrouille leurs mensonges : le coupable est le professeur de français, qui avait placé le pilon en équilibre sur la porte, ce qui explique que les deux étudiants n'aient croisé personne.


L'affaire de l'équation quadratique : Roth, un professeur de mathématiques conservateur et taciturne s'est suicidé après avoir reçu une lettre qui l'a profondément troublée, sur laquelle quelqu'un semble lui demander la solution d'un problème élémentaire de mathématiques. A partir du récit de sa femme et de la lettre, le sergent arrive à retracer la source du trouble de l'homme.


De ce que j'ai compris, la lettre serait celle du fils illégitime d'une victime que Roth aurait tué dans un accès de colère déclenché par un problème ridicule, mais qu'une crise de démence épileptique l'empêchait de résoudre. La lettre, imitant l'écriture de sa victime, a réactivé le remords qu'il avait refoulé. Probablement la plus brillante des nouvelles.


L'affaire de M. Arnott : Probablement la nouvelle la moins aboutie, mais dont l'ambiance fantastique est stevensonnienne. Un homme, M. Arnott, a reçu des menaces de mort. Clerc dans le commerce maritime, il surveille certains trajets de bateau pour une société secrète.


Un jour, un homme est venu lui proposer cet emploi au nom de la société Sigismund, une société mystérieuse dont les membres se reconnaissent en prenant le prénom de Sigismund et grâce à une cicatrice sous l'oeil gauche. Arnott accepte ces deux marques. Visiblement, on le retrouve mort. Byng prouve que l'histoire de la société est cousue de fil blanc, mais le récit se termine sans qu'on ait le fin mot de l'affaire.


Le document dérobé : sorte de retour sur La lettre volée de Poe.


Histoire policière : un essai sur le roman policier.

zardoz6704
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le 13 févr. 2017

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