Robert Neville est seul ; le seul ou en tout cas l'un des rares survivants d'une épidémie qui transforme les humains en vampires. Il s'échine le jour à tuer les créatures tapies dans l'ombre des habitations, du moins celles de son voisinage ; se barricade la nuit lorsque celles encore vivantes, ou relevées d'entre les morts, viennent pour se nourrir de son sang.
Je suis une légende narre le quotidien d'un homme tantôt résigné, tantôt désespéré, qui s'accroche parfois à l'espoir ne pas être seul, ou de pouvoir découvrir le pourquoi de cette "malédiction" qui touche le genre humain. Il sombre dans l'alcoolisme, oublie ce qu'est le contact humain (au point que ses futures rencontres le troubleront au plus au point), parfois retrouve la frénésie de vivre dans la recherche scientifique.
Divers évènements viendront altérer sa vision des choses, modifier son comportement et son destin, tandis que son passé le hante régulièrement et permet au lecteur, sous forme de flashbacks, de comprendre ce qui est arrivé, non seulement à Robert Neville mais aussi à l'humanité.
C'est passionnant de voir évoluer ce personnage qui a le recul nécessaire pour analyser ce qui lui arrive mais reste constamment sous la menace de ses plus vils instincts, ceux qui le conduisent à boire plus que de raison, ceux qui l'incitent à envisager de satisfaire ses besoins sexuels avec des vampires tantôt aguicheuses mais dangereuses, tantôt offertes à lui le jour, passives. Et ceux qui le conduisent à renoncer à se sauver, à sauver son espèce ; ceux qui lui murmurent à l'oreille de mettre fin à sa vie et de rejoindre le camp adverse.
Richard Matheson, l'auteur, a su créer une œuvre de fiction qui, à travers les questionnements de son personnage, nous met en face de nos propres choix, de nos propres hésitations, de nos doutes. Voilà un récit intelligent, assez bref et qui ne s'étend pas outre-mesure, pour mieux rester centré sur son personnage et emmener le lecteur avec lui.
Une fiction qui implique finalement beaucoup plus d'éléments de la réalité, que de la fiction ! Et cela fonctionne admirablement !