Kobra
7.3
Kobra

livre de Deon Meyer (2013)

Habituellement on n’est pas trop fan des polars de Deon Meyer dont on sait qu’il est parfois capable de vraiment bâcler son écriture et malheureusement certains passages le prouvent encore.
Mais inexorablement l’Afrique du Sud et les séquelles douloureuses de son Histoire chaotique nous fascinent … alors de temps à autre, on replonge.
Notre ordonnance : un Deon Meyer par an, ne pas dépasser la dose prescrite.
Cette fois, nous voici aux prises avec Kobra.
Kobra c’est le surnom d’un tueur à gage beaucoup trop efficace qui, sur son chemin, sème des morts joliment exécutés entre les deux yeux et autant de douilles gravées d’un serpent.
Visiblement, le mystérieux Kobra n’en serait pas à son coup d’essai et aurait déjà Interpol aux trousses. Il aurait débarqué au Cap. Hécatombe dans une riche villa où se cachait un ressortissant britannique, mathématicien réputé, auteur d’un savant algorithme financier.
Pas mal de cadavres ce soir-là, ceux des gardes du corps bien sûr, mais point de matheux : disparu, enlevé ?
Tous les services sont sur la brèche y compris le MI6 anglais et les différentes officines plus ou moins secrètes du pays : et l’on sait l’Afrique du Sud trop bien lotie de ce côté …
L’inspecteur Benny Griessel et ses collègues essaient tant bien que mal de garder le contrôle de l’enquête et de naviguer dans ces eaux troubles et agitées qui feraient peur même aux requins, pourtant féroces dans cette région.
Au milieu de ces engrenages impitoyables, un grain de sable : un petit pickpocket maigrichon mais teigneux qui aura piqué le portefeuille de trop, à la mauvaise personne au mauvais moment …
Sans doute pour détendre une atmosphère tendue et rythmée comme un film américain, Deon Meyer réussit à distiller pas mal d’humour dans son roman et, une fois n’est pas coutume, il réussit même à placer quelques amusantes figures sur le thème casse-gueule et désormais éculé de la branchitude technologique en opposant les vieux de la vieille et les jeunes geeks connectés.
Comme on est très très difficile sur ce sujet précis (la branchitude techno), pointilleux jusqu’à l’intolérance, autant dire que si l’on a apprécié, c’est que soit une sénilité bienveillante nous guette, soit que c’est plutôt bon ! Et pourtant Deon Meyer en fait des tonnes sur ce thème et vous saurez bientôt tout sur ce qu’il faut faire et ne pas faire avec son téléphone portable.
Autre détail pittoresque, l’inspecteur Benny Griessel sort à peine de ses séances aux Alcooliques Anonymes. Jusque là rien de bien nouveau dans la profession policière où nous sommes coutumiers des enquêteurs imbibés. Donc lorsque le matin Benny se pointe la gueule défaite, les yeux froissés et la chemise douteuse, tous les collègues et le lecteur sont prêts à jurer que l’inspecteur Griessel a fatalement replongé dans la bouteille.
Sauf que non, c’est pas ça, c’est même pire, du moins selon Benny qui ne veut rien avouer à personne (il faudra plusieurs chapitres avant de découvrir de quoi il retourne mais on ne vous dit rien car on a juré à Benny de garder le secret, et ça se répète pas ces choses-là).
Cerise sur le gâteau au boer, les dialogues sont truffés d’expression locales (zoulou, afrikaans, argot du Cap …) qui amusent sans gêner la compréhension (y’a même un petit lexique pour les plus curieux).
Sans doute un des meilleurs Deon Meyer avec un scénario relevé et épicé, une galerie de personnages peinte d’un trait épais et soigné (un des meilleurs atouts de ce bouquin (1) ), une course poursuite foisonnante et trépidante, …
Alors si vous voulez savoir ce qui empêche Benny de dormir, savoir si le pickpocket échappera aux affreux, savoir pour qui tournait le fameux algorithme financier mis au point par l’anglais … direction Le Cap !

[…] – Vous connaissez le principe de Spider-Man ?
– Le quoi ?
– Le principe de Spider-Man. Plus on a de pouvoir, plus on a de responsabilités. De telles informations donneraient un pouvoir considérable à notre gouvernement, capitaine. Et je le pense incapable d’assumer d’aussi grandes responsabilités.

(1) - seule fausse note dans la galerie de portraits, l’improbable couple occidental que composent le trop naïf matheux anglais et sa trop jolie assistante de recherche - faut dire que le problème avec l’Afrique du Sud, c’est que c’est plein de noirs et le cahier des charges réclamait sans doute des rôles pour des stars hollywoodiennes blanches et bankables - visiblement Deon Meyer ne s’intéresse pas trop à ces deux personnages (et nous non plus) qui fort heureusement sont assez peu présents
BMR
8
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Créée

le 15 nov. 2014

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