La fièvre de l'or qui s'abat sur le monde

Premier roman de Blaise Cendrars, un grand poète-voyageur ; même s'il est surtout connu pour ses romans autobiographiques, L'or connut du succès à son époque.

Retraçant la vie de Suter, de son départ de Suisse à sa mort à Washington, Cendrars est nourri du "mythe de la Frontière", c'est-à-dire les confins de la civilisation coloniale américaine - la Californie dans le cas de Suter. Et le tout est détourné d'une manière ironique et dramatique avec cette formule: "L'or l'a ruiné."

Blaise Cendrars se fait le narrateur lointain de cette histoire, d'une certaine simplicité - aucune mise en abyme, ni flashback, etc. - nous suivons simplement de A à B une grande partie de la vie de Suter, rarement nous avons le droit à des éléments, des anecdotes rapprochés nous permettant de mieux cerner le personnage. Cela peut rebouter, mais tout l'intérêt du récit ne réside pas seulement en ce personnage de Suter, il réside également en cette vision élargie d'un monde qui s'agite autour de Suter, ce prince décharné de sa terre ; un monde qui ne cesse de se mouvoir depuis la colonisation européenne, arbre fruitier de tous les conflits.

Tout est immédiat et dit en peu de mot. Ayant lu son recueil de poésie, je m'attendais à beaucoup de descriptions par rapport à ce pays très vaste que ce sont les États-Unis, mais Cendrars, dans ce roman historique en quelque sorte, souhaite la neutralité. Ainsi, on vit la grandeur et la décadence de ce général, milliardaire ruiné, une ironie de l'Histoire, à cause de cet or, bout de métal jaune, qui fait finir agonisant au fond d'une mine ou au seuil de la folie.