« L’heure trouble », c'était, explique Johan THEORIN en évoquant l’enfance de Gerlof, père de son héroïne Julia, l'heure où dans les champs et les cabanons de pêcheurs cessait le travail de la journée. Tout le monde rentrait avant que la nuit tombe, mais on n'allumait pas encore les lampes à pétrole. Pendant l'heure trouble, les anciens discutaient du travail de la journée, échangeaient les nouvelles des autres fermes du village. Et parfois, ils racontaient des histoires aux enfants de la maison.
Et l’heure transformait les histoires, les troublait dans les cœurs d’enfants. Et les histoires ne duraient plus seulement l’heure, elles s’inscrivaient dans la vie de ceux qui les véhiculaient de génération en génération. Toute une ambiance…
Je relis, à propos du titre « Le sang des pierres », mon billet déposé chez Sens Critiques (le 11 septembre 2017). J’y partageais le plaisir de ma découverte de cet auteur. Je retrouve dans la lecture du jour, les mêmes qualités d’écriture, la même sensibilité d’un auteur qui prend le temps d’avancer dans son récit avec finesse, pudeur, respect du lecteur dans les indices posés ci et là sur le bord des pages. Jusqu’au bout, dans une construction-déconstruction-reconstruction progressive du récit, le lecteur se sentira invité, jamais forcé à rentrer dans la psychologie des personnages.

Dans cette histoire plus psychologie que policière, plus quête d’apaisement que poursuite fantastique des assassins, Johan THEORIN nous raconte les fissures, les failles qu’ont provoqué la disparition inexpliquée d’un petit bout à peine assez grand pour franchir, véritable Everest pour lui, le muret du jardin de ses grands-parents. Le séisme est profond et même s’il touche différemment les membres de la famille et du village, il laisse des séquelles profondes et n’offre en avenir qu’un présent trouble, empli de brouillard. L’heure trouble est devenue permanente !
A la rencontre de personnages énigmatiques, se jouant du temps, des rythmes de vie, de paroles et d’actes des différents personnages, l’auteur nous trace, en parallèle, des histoires convergentes…
Et ce n’est pas là le seul paradoxe du récit. Jusqu’où cela va-t-il nous mener ?

Le lecteur ne se pose jamais la question. A tout le moins n’en éprouve aucune impatience. Il entre sans difficulté dans ce livre qui oscille sur le rapport avec le temps, le temps de l’oubli, le temps de la survie, le temps qui gagne sur la vie ou qui reste suspendu à tout jamais.

Et puis le temps de l’amour, aussi d’une mère pour son fils, d’une fille adulte pour son père, d’une femme perdue pour … Allez savoir !
Johan THEORIN, un auteur que je suivrai encore lorsque l’occasion m’en sera donnée !

Créée

le 20 févr. 2018

Critique lue 255 fois

Critique lue 255 fois

D'autres avis sur L'heure trouble

L'heure trouble
Overtherainbow
5

Critique de L'heure trouble par Overtherainbow

Je n'ai pas terminé ce roman. Précisons qu'il s'agit là d'un acte odieux et lâche de ma part, mais le temps nous est compté chers amis et chaque seconde nous rapproche un peu plus de l'heure fatale...

le 12 juil. 2014

2 j'aime

L'heure trouble
Saurcroc
8

Captivant!!!

Une histoire d'enquête suédoise par des "petits vieux" du village au bord de mer. En parallèle, on découvre une autre histoire que commence pendant la guerre et qui rejoint la trame principale tout...

le 11 sept. 2018

1 j'aime

L'heure trouble
naeliann
6

Critique de L'heure trouble par naeliann

De bonnes notes ont été attribuées pour ce livre. Et pour cause, on est directement plongé dans une ambiance pesante, remplie de non-dits, du poids du passé. On se projette réellement dans cette île...

le 2 déc. 2012

1 j'aime

Du même critique

Charlotte
François_CONSTANT
8

Critique de Charlotte par François CONSTANT

La chevauchée tragique de la Mort qui pousse à vivre. La Mort qui s’approche, s’accroche, fait peur, étouffe, éloigne, rapproche. La Mort qui force Charlotte Salomon, juive allemande, à devenir sa...

le 20 nov. 2014

18 j'aime

4

L'Amour et les forêts
François_CONSTANT
8

Critique de L'Amour et les forêts par François CONSTANT

À travers « L’AMOUR ET LES FORÊTS », paru chez Gallimard en 2014, je découvre l’auteur Éric REINHART. Belle découverte ! Bénédicte Ombredanne est une lectrice de cet auteur. Ayant apprécié son...

le 27 févr. 2015

17 j'aime

4

L'Art de perdre
François_CONSTANT
8

Critique de L'Art de perdre par François CONSTANT

« L’art de perdre » écrit par Alice ZENITER est la troublante histoire du silence de deux nations conduisant à la perte de paroles, donc de mémoire, de trois générations, celles d’Ali, Hamid et...

le 7 nov. 2017

14 j'aime