Molière, encore jeune, tourne en province. Il y joue plusieurs pièces, simples, qui tiennent de la farce. La Jalousie du Barbouillé est une de celles que sa troupe a joué plusieurs fois, notamment à Paris où elle est mise en scène sept fois entre 1660 et 1664. Aucun doute sur le fait que Molière a donc mis en scène et joué La Jalousie du Barbouillé. Mais cela n'empêche pas de poser la question : qu'est ce que cette pièce ?
Elle est courte, ne contient qu'un acte et treize scènes. Une dizaine de pages pour les dialogues. Le texte ne serait qu'un canevas, les comédiens brodant autour le plus gros du travail. L'authenticité de la pièce n'est pas certaine. Aucune preuve qu'elle soit de Molière, après tout le style peut déplaire et l'esprit être bien faible. Aucune preuve non plus qu'elle ne soit pas de Molière, on y trouve des idées qu'il exploitera.
La question se pose donc mais la forme même du texte que nous avons reçu n'est pas au-delà de tout soupçon. Plusieurs chercheurs pensent que la pièce que nous possédons n'est qu'un ensemble de fragments. D'autres pensent qu'elle est complète.
Le mystère est complet et je pense qu'un maigre connaisseur comme moi ne doit que se contenter de raconter son ressenti.


La Jalousie du Barbouillé raconte la crise conjugale entre le Brouillé et sa femme Angélique. Celle-ci est amoureuse de Valère tandis que le Barbouillé serait un homme violent qui aime boire. Angélique serait manipulatrice. La valet d'Angélique est clairement du côté de sa maîtresse. Le père d'Angélique essaye d'amener la paix dans le ménage. Et le docteur, au milieu, affiche son savoir inutile plus qu'il n'apporte de réponses aux problèmes.
Beaucoup d'éléments sont en suspension et nullement développé : Valère qui n'apparaît que bien peu, Cathau, la servante qui est encore moins présente. Les voisins qui ne font que paraître. En sommes, beaucoup d'éléments sont sous-développés et beaucoup d'élément humoristiques ne sont que visuels.
L'écriture souffre incontestablement de la rapidité et le rire ne se présente que peu. Le Brouillé n'ayant pas vraiment le souffle assez développé pour faire rire malgré quelques bons mots.
Le personnage du Docteur propose un constat nuancé, d'une part il est un personnage facile, servant à moquer les prétendus intellectuels et les médecins, une des cibles favorites de Molière, comme chacun le sait. Mais dans le même temps, au-delà de l'évidence du personnage, le Docteur offre également de très bons, savants, mais extrêmement drôles. On s'étonnera de cet humour dans une pièce plutôt général et pour le peuple. On a le droit à des blagues en latin, des références bien drôles aux règles de la logique aristotélicienne. Une vraie maîtrise du sujet se laisse comprendre pour le plus grand plaisir du lecteur connaisseur. Je pense que celui qui maîtrise ces questions là rira de bon droit sur ces répliques du médecin. Et il en sera très certainement le premier surpris.


L'étonnement de la situation, du rire si soudain, surprendra bien sur. Mais cela nous permet de voir que malgré l'oublie dans lequel il est tombé, malgré sa brièveté, malgré ce sentiment d'imperfection et de travail inachevé, la Jalousie du Barbouillé a une certaine intensité et rapidité dans l'efficacité qui le rend digne de la lecture.

mavhoc
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le 16 mars 2016

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