Paru en 2008 dans sa version originale et en 2011 dans sa traduction française par l'habituelle Valérie Gay-Aksoy, Le Musée de l'Innocence est le huitième roman d'Orhan Pamuk, et le premier qu'il ai écrit après avoir reçu le prix Nobel de littérature.

On peut dire qu'il est un livre "frère" avec Cette chose étrange en moi. En effet, dans ce dernier, l'auteur se proposait de dresser le portrait d'Istanbul à travers ses couches populaires, en suivant le destin d'un homme et de sa famille, sur de longues années. Ici, il fait un peu la même chose, mais du point de vue de la classe supérieure. Le récit de plus de 800 pages en Folio est écrit à la première personne, et c'est par la bouche de Kemal Basmaci, qu'on entendra le récit de son amour pour Füsun, une cousine pauvre, plus jeune que lui et extrêmement belle, (mais qui n'est pas une Femme aux cheveux roux) pour laquelle il ira jusqu'à briser ses fiançailles avec la charmante Sibel, qui aurait été l'épouse idéale.

Le récit commence comme un vrai roman d'amour à la française - on peut penser ici à l'Éducation sentimentale de Flaubert ou Le Rouge et le Noir de Stendhal - mais c'est surtout au Proust de la Recherche du temps perdu (et de Temps il sera question ici) - un autre prix Nobel pour lequel l'auteur ne cache pas son admiration - qu'il m'a fait penser par son style, par les thèmes abordés, et le milieu social décrit, que j'ai trouvé paradoxalement plus abouti que celui de Cette chose étrange en moi lu juste avant, mais que l'auteur a écrit juste après. Les sentiments du narrateur sont décrits avec intensité et précision.

C'est sous le prétexte de donner des cours de mathématiques qu'il séduira sa belle, ce qui pourra nous rappeler l'histoire d'amour entre Abélard et Heloïse .

Mais on s'en éloignera très vite. La belle disparait sans crier gare (ni garde) ce qui plongera notre héros romantique dans un grand désarroi. Je ne veux pas en dire plus sur l'histoire en elle-même, mais c'est ainsi qu'il se mettra à constituer les pièces de ce Musée de l'Innocence qu'il fondera à la fin de sa vie. Je dois dire que j'ai lu les 400 premières pages (c'est-à-dire la moitié du roman) d'une traite, mais que j'ai commencé à peiner à partir de ce moment là. J'ai alors traversé des phases d'ennui, d'irritation, d'agacement voire d’exaspération produits par les répétitions interminables, entrecoupées de phases où mon intérêt revenait, mais avec un sens du suspens peu développé. Cependant, malgré des longueurs qui auraient pu être évitées, je ne suis pas déçu d'avoir poursuivi ma lecture. À partir de la moitié, on change de registre. Notre héros torturé, qui ne nous épargne malheureusement pas toutes ses souffrances devient véritablement pathétique, puis comique, et enfin tragique, en passant par d'autres nuances.

Je ne souhaite pas en dire plus et vous en conseille la lecture, malgré plusieurs passages difficiles à partir de la moitié du livre, ne vous découragez pas et allez jusqu'au bout. La fin n'est pas non plus extraordinaire, mais elle mérite tout de même d'être découverte. Un livre à lire en parallèle, avec Cette chose étrange en moi, dont j'ai parlé avant

Bonne lecture

PS: Le Musée de l'Innocence se visite à Istanbul

Créée

le 17 déc. 2022

Critique lue 29 fois

Hunkarbegendi

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