L’œuvre majeure de Tolkien faisait partie de ces livres que je n'avais pas fini adolescent, par flemme et stupidité. Je préférais alors les films, à l'action plus rapide et soutenue, même si j'aimais déjà certains passages magiques très bien retranscris et des scènes d'affrontement extraordinaires. Là où ce livre est un cas unique pour moi, c'est qu'une fois terminé, je n'ai pas éprouvé de sensations différentes de celles du temps où j'avais des boutons pleins la figure. Au contraire, je me suis rendu compte que les années n'ont fait qu'amplifier les-dites sensations...


Pour ce qui est de l'histoire, il n'est plus possible de ne pas la connaître, et je ne vous l'infligerais donc pas en entier : un anneau pour les gouverner tous, un esprit maléfique serviteur de Morgoth et voulant détruire le monde, une quête désespérée pour détruire la source de son pouvoir, etc. Mais tout de même, on ne peut être qu'ébahit devant le travail de cohérence et de construction réalisé par Tolkien. Chaque race possède sa propre histoire et chronologie (la comté a son propre calendrier, les nains aussi...), certaines se recroisant et se perdant dans les méandres du temps. Lorsqu'on arrive dans cet univers, on sent qu'il a déjà bien vécu, et ce sans nous, ce qui rend merveilleux toute découverte par sa richesse et son passé. C'est d'ailleurs le gros point fort du livre : sa capacité à nous mettre devant la magie des Malorn de la Lorien, l'immensité des piliers de la Moria ou la beauté froide d'une dame du Rohan. Tom Bombadil est d'ailleurs, en ce qui me concerne, l'un des meilleurs passages du livre, tant il déborde d'inspiration mythologique et de virtuosité d'écriture.


Cela marche aussi très bien avec les batailles, qui sont toujours dantesques, très complexes, mais dont on ne perd jamais le fil. On est littéralement emporté à chaque fois, et quoique l'on devine le triomphe final des gentils sur les méchants, on mesure l'importance des pertes subies et l'on comprend que le monde découvert ne pourra jamais être comme avant après cela. On regrette cette perte d’innocence comme la regrette sans doute les personnages, créant une identification qui aide à se passionner pour l'intrigue.


Et puis il y a tout le reste du livre. Je ne dis pas qu'il est mal écrit, ce serait de mauvaise foi, mais il tranche nettement avec le rythme soutenu des meilleurs passages. Malheureusement, on passera bien plus de temps à voir les héros aller d'un point A à un point B qu'à profiter des passages que j'ai décrit précédemment. Pire : quoique les lieux décrits soient toujours fabuleux, ils en appellent toujours aux mêmes émotions de notre part, qui au bout d'un moment s'épuisent. J'ai dû faire un grand nombre de pauses à force de lassitude, ce en quoi le Mordor est très bien retranscrit d'ailleurs, puisqu'on éprouve autant de difficulté à le lire que les personnages à le parcourir.


En fin de compte, un livre très vaste et bien écrit, un univers cohérent du début à la fin, mais un auteur que je préfère infiniment lorsqu'il écrit des contes. J'ai largement préféré Bilbo le Hobbit à cette grande fresque épique, comme je préfère les hobbits aux elfes, justement parce qu'ils sont plus petits et moins grandiloquents.

Pulsar
8
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le 26 déc. 2016

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Pulsar

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