Imager l'univers de Lovecraft : défi réussi pour Gaulme ?

Adapter l'univers de H.P Lovecraft sous un format graphique, ça ne date pas d'hier. Et même si les tentatives se font rares, elles sont généralement et unanimement reconnues comme qualitatives, dépassant souvent la qualité du récit d'origine.


Les exemples ne manquent désormais pas, que ce soit l'une des premières incursions dans la bande dessinée avec le célèbre Les Mythes de Ctulhu de Alberto Breccia, paru en 1974, ou même très récemment dans la sphère manga avec les Chefs D'œuvres de Lovecraft dessinés de la main experte de Gou Tanabe. Impossible de ne pas non plus mentionner le trait moderne de François Baranger sur son adaptation de l'appel de Ctulhu, paru en 2017 chez Bragelonne !


Vous l'aurez compris, l'univers développé par le Fou de Providence est une source intarissable d'adaptation diverses et variées, donnant toujours du grain à moudre à de nouveaux artistes émergents. Derrière les horreurs cosmiques, il y a le plaisir de l'exercice stylistique, l'envie d'expérimenter.


Et s'il y a bien un nouvel artiste à suivre de près, dont les adaptations graphiques revêtent ici un intérêt différent d'un Tanabe ou d'un Breccia, c'est bel et bien Almar Gaulme et ses Carnets Lovecraft. Ici, le travail d'adaptation est presque anthropologique, ironique quand on sait que c'est justement la profession d'origine du monsieur.


Après avoir adapté les nouvelles Dagon, La Cité sans Nom et Les Rats dans les Murs, il s'attaque au Molosse, écrite en 1922.


Avec l'usage d'une prose macabre conjuguée à des protagonistes adorateurs de la mort, la vraie, la pure, la poétique, Lovecraft effectuait un exercice de style Baudelairien exquis.


Au travers d'une entrée en matière que ne renierait pas Schopenhoer, deux hommes en proie permanente à des désirs macabres sépulturales finissent par commettre l'impensable en pillant des cadavres. Mais c'est bel et bien ce rapprochement étrange et constant avec la mort qui finira par faire planer sur eux la malédiction du Molosse...


Gaulme propose ici une succession conséquente, sur un format de 76 pages (postface inclue), de croquis permettant de mieux appréhender et apprécier l'univers poétique et macabre de cette nouvelle. Ici, ce n'est pas forcément la qualité du trait qui est à analyser, mais bien la pertinence d'un tel travail d'édition et d'illustration... et force est de constater que le rendu est plus que réussi.


En effet, pour ceux qui sont amateurs des œuvres de Lovecraft, l'idée d'illustrer les nouvelles renforce l'aspect "carnet de notes" qui s'allie à merveille à leur narration, souvent mise au passé, comme si l'auteur de ses lignes n'existait déjà plus...


Cette nouvelle collection éditée par Bragelonne est donc une petite pépite indispensable pour les amateurs de Lovecraft, comme pour les néophytes, délivrée dans un format carnet en dur de taille raisonnable !

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le 31 juil. 2022

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