"Plus les vers se tordent, plus grande est mon envie de leur écraser les entrailles !"

Si j'ai ouvert ce livre, c'est parce qu'il le fallait. Ce verbe était toujours associé au Hauts de Hurle-Vent, autour de moi. Le cénacle littéraire qui compose une partie de mon entourage s'échange beaucoup de "Il faut", que l'on suit - ne serait-ce que pour le plaisir de se faire un avis personnel, ne pas participer à la propagation de la répétition des propos d'untel/unetelle. Puisqu'il le fallait, j'ai lu La Princesse de Clèves ; puisqu'il le fallait, j'ai lu Les Hauts de Hurle-Vent.


Autant vous dire que la réception a été nettement contrastée. La Princesse, bon, je n'en écrirais pas une critique. Les Hauts de Hurle-Vent, par contre -


le roulement d'une vague, une tornade, un éboulis, du fracas, "plein de bruit et de fureur" (pour citer un de ceux que l'on ne cite plus).


Il est assez peu de livres qui sont capables de tétaniser un lecteur par leur faculté à générer des vues impressives (l'expression est de Dolorès Lyotard) ; des visions qui impriment sous votre front des images impressionnantes : Les Hauts de Hurle-Vent en font partie.


Je croyais peu probable qu'un livre puisse m'horrifier, non pas par petits spasmes terrifiants (ce qui est le mécanisme de l'horreur cinématographique la moins pertinente, qui n'est qu'alignement de sursauts plus ou moins espacés) mais par la diffusion d'un malaise qui vous empoigne l'estomac, la gorge, jusqu'à brusquer les moindres amas de salives ingurgités. Et encore - le terme de "malaise" n'est pas juste, ou, en tout cas, pas assez précis. J'entends : ce livre ne consiste pas uniquement en la diffusion d'un malaise ; il est capable de vous brusquer, par des éclats de violence vifs, qui, à chaque apparition, amplifient ce malaise, dans un mécanisme de gradation imperceptible. Si bien qu'à la fin de l'ouvrage, on en est à se demander s'il est possible, pour ces personnages, d'avoir un peu de paix - pitié, merci.


C'est la ronde du malheur, dans des terres isolées, où les revenants jaillissent dans les hallucinations, les regrets, les vengeances.


Il faut en être conscient : ce récit est celui de la haine, mère nourricière de la vengeance, telle qu'elle s’exécute et broie, un par un, les personnages.


Et c'est putain de brillant.


L'horreur naît de la faculté de la nature humaine à détruire, mue par une vengeance tenace, noire, violente, les existences ; le saisissement surgit face à ces scènes et des dialogues d'une brutalité mortifiante ; le malaise trouve ses racines dans cette folie vengeresse qui règne en maîtresse. Au-delà de ça, une chose est certaine : ce que Les Hauts de Hurle-Vent vous amèneront à visualiser, dans le théâtre de votre esprit, vous hantera.

Neena
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le 24 juin 2018

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