Ce texte polémique et satirique est censé soutenir la foi et la piété des exilés juifs à Babylone: l'histoire juive, trop féconde en tentations idolâtriques, connaissait à ce moment l'un des plus graves dangers d'ordre religieux. Il est curieux de voir un texte finalement fidéiste employer des arguments aussi rationnels pour démystifier les pratiques religieuses. De telles attaques devaient nécessairement lui retomber dessus un jour ou l'autre.

Ce livre n'est pas plus authentique que les autres Deutérocanoniques, en dépit des autorités dont le rédacteur se couvre: le texte est en grec, alors que Jérémie écrivait en hébreu... Le texte puise son inspiration dans Jérémie, Isaïe, et les Psaumes.

Toute la verve juive, consciente de sa supériorité religieuse, se donne libre cours dans ce pamphlet où les dieux des païens sont assimilés à des épouvantails dans les champs. La nature offre dans les astres et les météores des êtres bien supérieurs à ces figures grotesques auxquelles les bêtes, douées de vie et de mouvement, sont bien préférables.

La portée actuelle de ce texte peut aisément se déduire de l'arrogance, de la suffisance avec laquelle l'auteur, convaincu de sa supériorité religieuse (cette notion a-t-elle un sens ?), écrase de son mépris les croyances d'un peuple éloigné - et, il est vrai, ennemi. On trouvera sans peine des courants religieux dans le monde actuel, conquérants par l'épée dès leur naissance, faisant preuve d'une telle étroitesse d'esprit et d'un tel fanatisme, en détruisant physiquement les "idoles" qu'ils rencontrent.

Plus grave encore pour la cohésion de l'esprit humain, l'orgueil débordant conféré à l'auteur par son adhésion à un monothéisme abstrait lui coupe tous les ponts vers une compréhension tant soit peu superficielle des mécanismes psychologiques qui ont donné naissance à l'idolâtrie et à l'animisme. Nous sommes les héritiers d'une telle étroitesse d'esprit, qui pousse de nombreuses personnes à établir dans leur mental à propos des religions une hiérarchie comparable à celle qu'établissaient de fort célèbres racistes du XXe siècle: religions "supérieures", "moyennes" et "inférieures". Certains courants religieux mettent en pratique leur propre Shoah au Proche-Orient. Ici et maintenant.
khorsabad
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le 1 mai 2011

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