J'ai relu Chair de Poule pour vous épisode 5 : Méfiez-vous des abeilles

Ce matin je suis allé faire un petit vide grenier. Il faisait beau, une température idéale et j'avais bon espoir de faire une ou deux jolies trouvailles. Au lieu de ça je suis tombé sur une poignée de Chair de Poule pour presque rien. J'en ai pris trois : Les Fantômes de la colo (que j'espère critiquer ici sous peu), Comment ma tête a rétréci et celui sur lequel je vous propose de vous pencher avec moi, Méfiez-vous des abeilles !
Il me semblait avoir déjà emprunté ce livre a la bibli de mon école à une époque sans toutefois jamais l'avoir lu mais un simple coup d’œil au résumé m'a fait comprendre mon erreur.
Avec un titre et une couverture pareils j'étais certain d'avoir entre les mains une histoire d'invasion animale pompée (comme notre ami Stine sait si bien le faire) sur un quelconque ersatz des Oiseaux et c'est avec une certaine curiosité que je m’apprêtais à me plonger dans un de ces rares Chaire de Poule exempt de tout élément surnaturel quand, en guise de mise en bouche je le retournais pour en lire le résumé. Et là, stupeur !


MÉFIEZ-VOUS DES ABEILLES !
UNE EXPÉRIENCE INFERNALE...
Un jour, Greg trouve sur l'écran de son ordinateur un étrange message : une société offre la possibilité d'échanger son corps avec quelqu'un. Greg tente l'expérience. Mais une fausse manœuvre l'expédie dans le corps... d'une abeille ! Les griffes du chat, une porte qui claque, tout devient danger mortel...


En lieu et place des films de terreur animale attendus c'est bel et bien du côté du film La mouche noire que ce nouvel opus semble lorgner !
Adieu donc essaims vrombissants d'insectes ailés et à nous donc expériences scientifiques à faible niveau déontologique !


Comme tout bon Chair de Poule Méfiez-vous des abeilles s'ouvre sur une scène d'exposition bâclée nous présentant Gregory Dunoy (affectueusement surnommé Grégo-le-Zéro par ses camarades qui manquent de toute évidence du plus infime des talents en matière d'abréviation), frêle garçon de 12 ans dont les passe-temps dans la vie semblent se limiter à lire des BDs, jouer à des jeux vidéos, manger des tartines à la confiture, se faire passer à tabac par les jeunes de son quartier et se ridiculiser à vélo devant l'élue de son cœur. Ça et espionner son voisin.
Cette brève description me permet de soulever un aspect de l"œuvre" de Stine que je ne pense pas avoir encore évoquée dans mes modestes critiques, à savoir sa propension à rédiger la plupart de ses histoire à la première personne. Outre que je reproche à ce procédé de sombrer dans une facilité crasse, je n'arrive toujours pas à saisir comment un auteur basant presque exclusivement son style sur des cliffhangers à la fin de chaque chapitre peut sciemment opter pour une telle narration qui du simple fait qu'elle utilise le passé désamorce d'elle même tout sentiment de danger immédiat pour le personnage principal puisqu'il a de toute évidence dû survivre pour être en mesure de raconter ses aventures...


Mais revenons en à notre voisin. Le voisin de Greg, monsieur Anvers est apiculteur amateur et un gros con. Quand je dis amateur c'est parce que même s'il s'enorgueillis de manipuler ses abeilles à mains nues, Anvers n'y connait visiblement rien et s'obstine à les enfermer dans un enclos et à leur courir après un filet à la main pour rattraper les quelques fugitives qui auraient réussi à se faufiler dehors en quête de quelques fleures. Bravo mec.
Quand je dis gros con c'est parce que le temps qu'il ne passe pas avec ses abeilles semble être employé a faire peur à Grego, notamment en lui faisant croire que ses insectes sont devenus fous et l'attaquent. Trop drôle !
D'ailleurs Grego n'a pas vraiment besoin de ça dans la vie ! En plus d'être le loser qu'on sait, notre jeune protagoniste semble avoir peur de TOUT ce qui l'entoure. Il a ainsi peur des abeilles (mais en même temps on est là pour ça donc bon...), de son voisin, du chat de sa sœur, des jeunes de son quartier, du noir, et même d'un hygiaphone qui le fait sursauter ! Attends de te retrouver dans le corps d'une abeille bonhomme, t'as pas fini de sursauter !


Hors donc un jour Grego reçoit un message (apparemment c'est un système de messagerie dans son jeu vidéo mais en même temps c'est décrit comme des petites annonces en ligne, on comprends pas trop et apparemment Robert non plus) lui proposant de changer de corps. En voilà une bonne idée ! Fini sa vie de misérable : tout est de la faute de son corps, c'est évident.


On en arrive ici au gros nœud de l'intrigue. Parce que comme je vous l'ai expliqué plus haut, le vrai sujet du bouquin c'est pas les abeilles (et c'est dommage parce que pour une fois Bobby avait pas trop mal bossé le sujet, ça vole - haha - jamais très haut mais tout ce qui est dit au sujet de ces petits hyménoptères est vrai et si malheureusement son exemplaire de Les abeilles pour les Nuls ne comportait pas de chapitre sur l'apiculture en elle même -se reporter à sa description des entrailles de la ruche... - on peut au moins lui accorder ça) mais bel et bien le transfert de corps. Ou la téléportation. En fait on sait pas trop et Robert non plus. Parce que c'est du gros n'importe quoi.
Déjà c'est quoi cette entreprise ?
Les mecs font de la pub sur le net, semblent avoir du matériel de pointe mais n'ont en revanche qu'une seule employée ?
Leur clientèle semble constituée en grande partie (voire même exclusivement, pour ce qu'on en sait !) d'enfants mais à aucun moment on n’émet une quelconque objection (une petite signature des parents au moins ? non ?)??
Le matériel est (d'après les dires même de l'employée) tellement sensible qu'il faut le "protéger avec le plus grand soin (au point de le garder derrière une vitre dans leurs locaux) mais ils se déplacent avec à domicile pour l'intervention et posent tout sur la table de la cuisine (de toute évidence pleine de miettes vu la quantité de tartines que semble s'envoyer cette famille !) ???
Et puis on fait ça a distance, on a pas besoin que les deux participants soient dans la même pièce ? Il fait quoi le deuxième, il attends dans sa cuisine à lui, avec des fils plein la tête et une tartine à la main ???!
Et tout ça pour pas un rond, GRATOS ???!!


Rien
ne
va.


Pour en revenir a l'histoire la bonne femme de l'agence passe chez l'ami Greg, et vas y que je te fixe une courroie au poignet, et vas y que je te branche des fils, on pianote un peux sur deux trois touches et bingo bongo, c'est fait, te voilà relié au jeune éphèbe champion de planche à roulettes (ils appellent ça comme ça pendant tout le livre alors je fais pareil) qui a juste besoin de ton cerveau pour son test de math de demain. Bon Greg va disparaître pendant quelques minutes avant que son apparence ne réapparaisse mais que diable, le plus gros du boulot est fait, pas besoin d'attendre qu'il se re-matérialise, il est temps de rentrer, le patron paye pas les heures sup !


Hors suite a un habile retournement de situation (et parce que Stine a du voir la Mouche noire la veille au soir à la télé), une abeille qui passait par là entre dans l'équation et c'est sous les traits du petit animal que Grego refait apparition !
Et du coup, nouvelles questions : 1) pourquoi (encore une fois) faire ça à domicile et pas au cabinet vu qu'apparemment c'est la personnalité qui reste sur place et le corps qui voyage ? et 2) BORDEL DE MERDE MAIS C'EST DE LA TÉLÉPORTATION ÇA, PAS DU TRANSFERT DE PENSÉE (au passage la boîte s'appelle "Échange de personne à personne", c'est pas très explicite, on dirait qu'ils bossent dans le troc...)!


Grego devient donc une abeille. On s'attend donc à ce que son corps se comporte comme une abeille (comme dans la Mouche noire) mais en fait non, il se comporte normalement vu que c'est David Wolf qui est dedans, vu qu'inexplicablement cette partie de l'échange a marché, tandis que l'abeille va quant à elle passer (sans grand succès) le fameux contrôle de maths !
Là dessus Greg arrive à se faire entendre de la bonne femme de l'agence qui s'excuse poliment ("Je suis désolée, Gregory, dit elle poliment. Je serai plus prudente à l'avenir"), on apprends que David ne veut pas récupérer son corps d'éphèbe mais préfère continuer sa vie dans le corps sous développé de notre héros parce que sa famille est gentille et que sa mère lui fait des tartines avant d'apprendre que depuis le début ledit David entend très bien Grego (dans son corps d'abeille, vous suivez toujours ?) parce que "certaines cellules d'abeilles ont dû se mélanger à [ses] cellules humaines pendant le transfert" ce qui lui procure apparemment une super ouïe, etc, etc. pour finir sur une conclusion mielleuse tombée du ciel avec comme presque toujours une pseudo fin ouverte merdique.


Si vous avez eu le courage de me lire jusqu'au bout vous savez à présent comme moi que Méfiez-vous des abeilles n'est pas un bon Chaire de Poule et que malgré la présence de cette petite phrase si chère à mon cœur (1) et de si nombreux emprunts à un des classiques de la science-fiction horrifique Bobby est une fois de plus parvenu a repousser les limites de la médiocrité littéraire en prenant encore et toujours les enfants pour des cons (qu'ils sont sans doute un peu puisqu'ils en redemandent depuis plus de 20 ans maintenant !)... Bravo Bobby, et merci pour rien.
C'est sur ce rendez-vous raté avec le genre éculé de la terreur animale (mais également avec la littérature) que je vous quitte, on retentera le coup si j'arrive à mettre la main un jour sur Baignade interdite (d'autant que j'ai une anecdote marrante à vous raconter sur celui ci haha), en attendant portez vous bien et ne lisez pas de Chaire de Poule, c'est tout nul et je fais ça pour vous.
Bisous les loulous !


(1) "Je tentais de crier, mais aucun son ne sortit de ma bouche."

Thieuthefirst
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le 21 oct. 2018

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Méfiez-vous des abeilles
kalthurin
5

critique de kalthurin

Un chair de poule qui peut vous donnez des sueurs à la simple condition d'avoir peur des abeilles, sinon l'histoire est trop bateau et ne donnent aucun frissons, plus du suspense a vrai dire.

le 16 mars 2016

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