Mon cœur vient du désert d'Atacama, avant d'être un très bon roman de science-fiction, c'est avant tout de superbes portraits de femmes.
La narration va en effet nous être faite par l'intermédiaire de quatre générations de femmes distinctes, de l'arrière-grand-mère à l'arrière petite fille, sans pour autant respecter l'ordre généalogique, chacune des quatre ayant son moment de gloire.
Le récit se situe dans notre bonne vieille France, et même, pour être précis, à Priezon dans le Berry. Priezon, ville fictive à plus d'un titre puisqu'en plus de ne pas exister (je n'en ai trouvé traces nulle part sur le net), elle hébergerait un centre technologique de pointe, le Black Berry (jeu de mots), une start-up qui s'est spécialisée secrètement dans le développement d'I.A. et d'androïdes conscient.
Car oui, si c'est bien la France, c'est dans un futur assez éloigné pour que les technologies biomécaniques se soient développées, et assez proche pour que les catastrophes écologiques qui nous pendent au nez soient passé à la vitesse supérieure.
C'est dans ce contexte que l'on fait la connaissance de Phaedra, notre première narratrice, qui nous campe le décor, peu réjouissant (et je dis pas ça à cause du Berry !) d'un monde en fin de vie, et nous expose sa lourde hérédité familiale : une incapacité atavique à être de bonnes mères et même de bonnes personnes tout court, condamnées à faire de mauvais choix de vie et à créer des relations de haine d'une génération à l'autre.
Phaedra est donc celle qui s'est donné pour but de tenter de conjurer le signe indien et d'envers et contre tout élever sa fille dans l'amour. Le tout sur fonds de fin du monde tel que nous le connaissons.
Un roman post-apo donc, puisque le gros du roman se passe enterré dans un bunker, manière de justifier le nom de la ville berrichonne qui lui sert de cadre (mais j'ai peut-être juste l'esprit tordu).
L'écriture est réellement puissante, remuante et nous assène ses phrases comme autant de jabs à la mâchoire. Chaque chapitre s'ouvre sur un titre de chanson, souvent rock, et si je n'ai pas poussé le zèle jusqu'à les écouter en lisant le roman, je suis sûr que ça peut apporter quelque chose à l'expérience.
Je ne vais pas m'appesantir sur les tenants et aboutissants du roman (pas de spoil ! Déjà le bunker j'ai hésité), mais on y parle beaucoup de l'avenir de l'Humanité, d'écologie et d'artillects, un bien beau néologisme (c'est en tout cas la première fois que je le croise) pour artefact + intellect, des I.A. "incarnés" dans des corps synthétiques et capables d'apprendre par elles-mêmes une fois "éveillées".
Un beau roman, plaisant et touchant.