King est un formidable raconteur d'histoire, le genre capable de nous passionner avec l'annuaire. Et c'est exactement ce qu'il fait ici. Ce n'est pas un reproche, mais l'histoire de Mr. Mercedes tient sur une pièce de deux centimes. Un face-à-face entre un flic à la retraite et un tueur. Déjà vu, déjà lu.
De fait, le King ne cherche pas forcément l'originalité dans ce roman. Mr. Mercedes est clairement un hommage aux romans noirs et il est dédié à James M. Cain, l'auteur du facteur sonne toujours deux fois, Mildred Pierce ou Assurance sur la mort. Le nom de Philip Marlowe est également répété plusieurs fois.
Mais MR. Mercedes ne rentre pas forcément dans la catégorie "roman noir". C'est plutôt un thriller avec suspense. Une phrase citée par un personnage résume bien le livre : "un ordinateur n'est pas une télé. Quand tu allumes ton ordinateur, tu peux regarder le monde, mais le monde peut aussi te voir." C'est cette réciprocité des visions qui se met en jeu dans le roman. Je te vois, tu me vois. Celui qui voit l'autre gagne. Se laisser voir, c'est mettre sa vie en danger. Ainsi, la grande affaire du tueur, c'est la discrétion. Il fait toujours tout pour se fondre dans la masse, pour qu'on ne le voit pas (le regarder parfois, le voir jamais). Il veut ne jamais être remarqué pendant que lui espionne les autres. Voir l'autre, c'est obtenir des informations sur lui. Avoir le détail qui montrera la faille, qui permettra de le manipuler.
Car le roman est aussi un grand jeu de manipulation à distance, par réseau social interposé...


J'ai bien aimé ces trois personnages principaux, une bande de bras cassés qui vont tous retrouver leur force en participant à cette enquête pourtant dangereuse. Le flic retraité, bedonnant et suicidaire. Le gamain surdoué. La dépressive. Drôles d'enquêteurs...
Même si le roman n'est pas ce que King a écrit de mieux, il n'en reste un grand moment de suspense. Avec trois fois rien, le bonhomme nous retient pendant presque 500 pages. Chapitres courts, personnage taré, etc. Il y a bien des facilités, mais l'ensemble est vraiment plaisant, surtout comme lecture estivale.

SanFelice
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le 30 juin 2015

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SanFelice

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