Okuribi
6.7
Okuribi

livre de Hiroki Takahashi (2018)

Pour Ayumu, fraîchement arrivé de Tokyo, tout semble étrange dans cette école de province. Il cherche à s’intégrer, à se fondre dans le décor. D’abord naïf, il se joint aux jeux d’un groupe de garçons. Mais très vite, l’innocence se trouble. Ce qui semblait n’être qu’une camaraderie ordinaire révèle une violence latente, insidieuse, presque invisible. Ayumu devient à la fois témoin et complice involontaire d’un harcèlement qui s’envenime à chaque page. Et alors que s’approche la fête des morts, l’atmosphère se tend dangereusement, jusqu’à devenir irrespirable.


Voici un récit poignant, direct et profondément réaliste, centré sur le thème du harcèlement scolaire. Mais là où d’autres choisiraient la frontalité, Hiroki Takahashi opte pour la subtilité cruelle. Le malaise s’installe progressivement, porté par la figure trouble d’Akira, charismatique et inquiétant, qui manipule les dynamiques du groupe avec une précision glaçante.


L’auteur installe un contraste fort : la beauté délicate de l’environnement nippon, forêts, temples, silences, s’oppose à l’ambiance électrique et toxique qui règne dans la cour de récréation. Le regard d’Ayumu, tout en retenue, en réflexion silencieuse, capte tout sans parvenir à agir. Il observe, analyse, encaisse... sans savoir comment se positionner.


Et c’est là toute la force du texte : la passivité devient elle-même une forme de violence, et l’on mesure à quel point le silence peut faire mal. La cruauté s’installe sans coup d’éclat, se banalise, devient presque un langage commun. Certaines scènes nous saisissent, tant leur réalisme dérange. Elles sidèrent, car elles nous placent face à l’inacceptable sans échappatoire.


Lorsque le roman flirte avec le fantastique, c’est pour mieux révéler le cœur noir du réel. Une tension sourde monte en crescendo, et l’on comprend que le pire est à venir. Hiroki Takahashi signe ici un roman fort, presque nécessaire, où chaque geste compte, chaque omission pèse, et où l’ombre d’un drame rôde à chaque ligne.

SophieSonge
8
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le 25 juil. 2025

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SophieSonge

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