Un héros, un vrai, est mort lâchement assassiné le 16 août dernier, en Tanzanie, dans une certaine indifférence médiatique. Il faut dire qu'un autre "héros", sportif celui-ci, recueillait alors et pour plusieurs jours une attention particulièrement démesurée. Le second, vous l'aurez reconnu, est un joueur de football brésilien payé des milliards par le Qatar pour pousser un ballon dans son nouveau club de milliardaires. Le premier est - ou plutôt était - un homme de 51 ans du nom de Wayne Lotter qui a consacré sa vie à la protection des éléphants et plus généralement à la lutte contre le trafic des animaux sauvages en Afrique.


Mais quel rapport entre Wayne Lotter et le roman d'Estelle Nollet ? Ce n'est pas un lien direct car Quand j'étais vivant est une fiction qui tout en s'inspirant de la réalité du braconnage aujourd'hui n'évoque jamais de faits ou de personnes réelles. Mais sa lecture nous plonge dans l'atmosphère des nuits africaines, au plus près des animaux de la savane : éléphants, rhinocéros, mangoustes, guépards... Et pose la question de la survie de ces espèces face à la surpuissance des hommes.


Le roman, à la narration très originale, s'appuie sur quatre "personnages" : Harrison, le directeur d'une réserve en Tanzanie, Juma un petit garçon albinos, Ndilo un jeune homme et Pearl une éléphante femelle. Quatre personnages donc qui dès le début de l'histoire ne savent pas pourquoi ils sont morts et qui vont par le biais d'une sorte de projection de leurs souvenirs revoir des passages de leur vie et les évènements qui les ont conduits jusque là.
Le lecteur reconstitue ainsi, de 1979 - l'ouverture de la réserve - jusqu'à 1999 - les différents éléments éparpillés d'un puzzle.


Littérairement parlant, l'écriture d'Estelle Nollet est particulièrement convaincante lorsqu'elle s'attache à décrire la sensualité de l'Afrique, de la nature, de l'état sauvage. De très beaux passages.


Politiquement, le livre s'avère engagé. Il se termine d'ailleurs par une liste rappelant le nombre réduit d'individus encore vivants pour chacune des espèces concernées. C'est terrifiant.
Et la fiction à la suite de cette triste réalité souligne ce constat accablant : la sauvagerie n'est pas le fait des animaux - que l'on qualifie pourtant de sauvages mais bien celui des hommes qui lorsqu'ils sont aveuglés par des profits miraculeux peuvent se prêter aux pires carnages qui soient.


Et quand la dernière page du roman tournée on apprend que l'un des plus grands opposants au braconnage et au commerce de l'ivoire a été tué de deux balles à bout portant, tels les éléphants qu'il s'évertuait à protéger, on se sent à la fois malheureux et en colère.


Wayne Lotter était un grand monsieur.
Et Estelle Nollet est assurément une écrivain à suivre.


8/10


http://www.demotivateur.fr/article/wayne-lotter-heros-de-la-lutte-contre-le-braconnage-en-afrique-a-ete-tue-par-balles-11025

Theloma
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Romans puzzle, Romans récents qui m'ont plu, La cause animale en question (livres) et Lus en 2017

Créée

le 24 août 2017

Critique lue 203 fois

9 j'aime

13 commentaires

Theloma

Écrit par

Critique lue 203 fois

9
13

D'autres avis sur Quand j'étais vivant

Quand j'étais vivant
BibliOrnitho
5

Critique de Quand j'étais vivant par BibliOrnitho

Aux portes du paradis, quatre êtres morts depuis peu sont rassemblés au pied d’un grand écran sur lequel défilent des images de ce qu’a été leur vie. Il y a là un enfant noir albinos mutilé pour de...

le 15 mai 2017

2 j'aime

Quand j'étais vivant
alea35
9

Projection privée

Quatre personnages voient défiler sur un mur des images de leur vie passée. Ils sont morts au même endroit, le même jour. L'un est blanc, anglais, fils d'un ancien colon et propriétaire d'une réserve...

le 27 déc. 2016

1 j'aime

Quand j'étais vivant
AMqt
8

Critique de Quand j'étais vivant par AMqt

C'est un roman à lire, car au-delà de cette histoire très dure entre les hommes et animaux, l'auteure a su aussi, par ses descriptions, nous faire voyager à travers l'Afrique et ses grands espaces...

Par

le 18 mai 2022

Du même critique

Us
Theloma
7

L'invasion des profanateurs de villégiature

Avec Us et après Get Out, Jordan Peele tire sa deuxième cartouche estampillée "film d'horreur". Sans vraiment réussir à faire mouche il livre un film esthétiquement réussi, intéressant sur le fond...

le 21 mars 2019

107 j'aime

33

Ad Astra
Theloma
5

La gravité et la pesanteur

La quête du père qui s’est fait la malle est un thème classique de la littérature ou du cinéma. Clifford (Tommy Lee Jones) le père de Roy Mac Bride (Brad Pitt) n’a quant à lui pas lésiné sur la...

le 18 sept. 2019

97 j'aime

55

Life - Origine inconnue
Theloma
7

Martien go home

Les films de série B présentent bien souvent le défaut de n'être que de pâles copies de prestigieux ainés - Alien en l’occurrence - sans réussir à sortir du canevas original et à en réinventer...

le 21 avr. 2017

81 j'aime

17