Ce troisième et dernier livre grand public de Ian Stevenson cible son enquête à propos des indices de réincarnation sur les traces cutanées de naissance des enfants qui seraient la réincarnation d’individus décédés antérieurement. Le principe général est que les taches cutanées (nævi, dépression cutanées anormales, cicatrices) que le bébé présente dès la naissance constitueraient le témoignage de blessures dont serait mort l’individu lors de son incarnation précédente. Ainsi, des traces circulaires seraient des vestiges d’orifices d’entrée et de sortie de projectiles d’armes à feu.


Isolées, ces traces ne signifient rien d’autre qu’un caprice de la nature. Mais Stevenson rapporte ici de nombreux cas (majoritairement choisis en Asie Orientale et méridionale, parfois en Syrie et au Liban, parfois dans les régions arctiques) où, dès qu’il sait parler, l’enfant raconte spontanément l’histoire d’une personnalité antérieure qu’il n’a pu connaître d’aucune manière, surtout à cet âge-là, décrit son métier, sa situation matrimoniale, la manière dont il est mort (toujours en rapport avec les traces cutanées). Après examen minutieux, on se rend compte que la personne ainsi décrite a bel et bien existé, a bien possédé les caractéristiques décrites par l’enfant, a bien vécu dans le cadre décrit par l’enfant, et est bien mort dans les conditions décrites par l’enfant. Souvent, on retrouve les parents et descendants du décédé, on peut les interroger, récupérer autant de détails que l’on désire. En général, le décédé ne vivait pas très loin du lieu où l’enfant est né. Très souvent, il est mort relativement peu de temps avant la naissance de l’enfant dans lequel il se réincarne.
Plus étonnant encore : souvent, le mort vient prévenir les parents du futur enfant qu’il va se réincarner dans leur progéniture pas encore née. Comment fait-il ? Il apparaît dans les rêves des parents. Pourquoi choisit-il cet enfant-là et pas d’autres ? Souvent, des liens familiaux plus ou moins directs existent entre le décédé et l’enfant. Lorsque l’enfant est emmené sur les lieux de vie du décédé, il reconnaît souvent le cadre de de vie, certains objets (en précisant lesquels étaient à lui personnellement) ; il aime ou déteste les mêmes personnes aimées ou détestées par le décédé de son vivant. Parfois, son témoignage permet d’identifier son meurtrier, qui avoue.
Le délai entre la mort précédente et la réincarnation qui suit est en général court, de l’ordre d’un à cinq ans. Mais il existe des délais nettement plus longs. Dans de rares cas, le réincarné a vécu une autre existence intermédiaire, entre celle dont parle l’enfant, et l’enfant lui-même. Les renseignements sur ce qui se passe entre deux vies sont très pauvres. Les décédés parlent comme s’ils étaient encore vivants, disent qu’ils observent les personnes, errent sur les chemins, et disent parfois qu’ils s’incarnent dans l’enfant déjà né assez longtemps après sa naissance. Toutefois, il semble que des relations peuvent se nouer entre décédés dans ce monde intermédiaire. Ainsi, un futur réincarné aurait invité un ancien voisin décédé à renaître en tant que son frère dans une nouvelle vie.

L’enfant (comme c’est le cas dans les livres précédents de Ian Stevenson) commence souvent à parler de son incarnation précédente dès deux ans, puis il commence à l’oublier progressivement à partir de l’âge de sept-huit ans. À l’âge adulte, il est fréquent qu’il ne se souvienne plus de rien. Les souvenirs s’érodent, donc, et les taches de naissance se déplacent fréquemment au cours de la croissance de l’enfant. Les zones de peau plus claires ou plus foncées, nettes au départ, deviennent progressivement plus indistinctes.


Les marques de naissance peuvent être de véritables malformations, correspondant à des amputations dans la vie antérieure : orteils rabougris, membres inachevés, etc. L’enfant réincarné peut très bien avoir changé de sexe d’une incarnation à l’autre, et certains enfants font toute une histoire pour s’habiller selon les critères de sexe que veulent leur imposer leurs parents ; ainsi, des filles s’habillent en garçon assez longuement. Les réincarnés semblent également avoir conscience de leur statut social antérieur : en Inde, pas question pour un réincarné d’une caste supérieure d’adopter les mœurs et les fréquentations des gens de caste inférieure où il s’est réincarné ! Les phobies de l’enfant réincarné correspondent souvent à son genre de mort : peur de l’eau, peur des serpents, des couteaux, etc.


Aucune information n’est donnée sur le processus par lequel une blessure dans une vie précédente peut être transférée à un nouveau corps. Dans une discussion finale, Ian Stevenson introduit des idées intéressantes, auxquelles il attribue des noms inédits :


• les éléments hérités de la personnalité décédée à la nouvelle personnalité sont appelés « diathanatiques » (= traversant la mort pour passer d’une incarnation à une autre) ; Ian Stevenson y place « des informations cognitives sur les événements de la vie précédente, une diversité de goûts (j’aime ceci, je n’aime pas cela) et autres attitudes, et, dans certains cas, des résidus de blessures physiques et autres marquages du corps précédent. »


• Ces informations psychologiques seraient portées entre deux vies par une sorte de corps énergétique appelé « psychophore » ; ce dernier influencerait la formation du corps du bébé dans lequel le défunt va se réincarner pour lui instiller des formes physiques, des marques et des souvenirs de la vie précédente.


• Comment se fait ce « façonnage » physique et psychique de corps du bébé à naître ? Stevenson évoque la possibilité, pour le psychophore, d’influer sur les champs morphogénétiques qui modèlent le corps humains. Pour se rappeler de ce que pourraient être ces « champs morphogénétiques » (immatériels), on peut voir un article de Wikipédia :


https://fr.wikipedia.org/wiki/Champ_morphog%C3%A9n%C3%A9tique


Le livre de Ian Stevenson, comme les précédents, n’est ni pittoresque ni drôle. Pas d’anecdote inquiétante. Juste une liste de cas qu’il a personnellement examinés, en donnant tous les détails et en critiquant la fiabilité des informations reçues au cas par cas. Ian Stevenson ne craint, à aucun moment, de fournir des arguments qui iraient à l’encontre de l’hypothèse de la réincarnation. Sa propension à critiquer le moindre détail, à évaluer en pourcentages la proportion de tels ou tels cas, peuvent paraître fastidieuses, mais elles sont une garantie de sérieux et de méthode.


Ce livre donne à penser. Longuement.

khorsabad
9
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le 4 févr. 2017

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khorsabad

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