Un truc comme ça, au rayon « sociologie », c’est une blague ? Je le verrais plutôt au fond d’un supermarché, pas loin de l’entrepôt. Dit encore autrement, Rites de virilité à l’adolescence, je l’ai dans mes toilettes mais pas pour le lire.
Le propos est à peu près aussi structuré qu’un crachat. Comme à aucun moment l’auteur ne définit son sujet, le livre consiste en une enfilade de chapitres à la fois dépourvus de transition et complètement interchangeables, qui mêlent allègrement tueries scolaires, misogynie ordinaire, happy slapping, occupation de halls d’immeuble, djihadisme et pratique compulsive des jeux vidéo… Les rites de virilité qui donnent leur titre à l’ouvrage ne sont ni mis en perspective, ni analysés en détails, ni même décrits – à bien des égards ils semblent des prétextes pour parler de la violence, sous toutes ses formes.
Un procédé récurrent du texte consiste à énoncer un poncif – mais sans jamais le présenter comme tel ! – et à le faire suivre d’une référence bibliographique. Par exemple « Nombre de garçons mènent un combat permanent pour ne pas déchoir dans le regard de leurs pairs » (p. 12) : au passage, on attend de connaître la tranche d’âge dans laquelle personne n’est jugé par ses pairs, ou la société qui encourage ses membres à se casser la gueule…
Ou encore « La vision de la société [chez les jeunes délinquants] est celle d’une jungle où il est normal que les faibles soient exploités ou ridiculisés » (p. 13). Que cette conception, aux deux derniers mots près – et encore –, soit celle de l’ultra-libéralisme dans son ensemble ne paraît pas venir à l’esprit de l’auteur, alors que cela mettrait les choses en perspective, notamment quant à la révolte contre la société qu’une partie de la sociologie prête parfois à ce qu’elle appelle la jeunesse des quartiers défavorisés.
En définitive, comme Rites de virilité à l’adolescence ne met rien en perspective, si bien que le texte implique une généralisation qui laisserait penser à quelqu’un qui ne sort pas de chez lui que tout être humain entre onze et trente ans est prêt à égorger son semblable à la première rencontre…
Rappels pour la suite : ne plus se fier au nom de l’auteur, quand on en a vaguement entendu parler au titre de spécialiste de quelque chose.

Alcofribas
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le 11 nov. 2017

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