Sept secondes pour devenir un aigle et quelques heures de lecture percutante.

« Sept secondes pour devenir un aigle » a été publié en 2013 par les éditions du Bélial’ et a fait l’objet d’une publication au format poche en 2016, aux éditions Folio SF.


Une des six nouvelles de ce recueil a reçu le Grand Prix de l’Imaginaire de la meilleure nouvelle francophone en 2014. Il s’agit de la nouvelle éponyme, que vous pouvez télécharger gratuitement sur le site du Bélial’, tout en bas de la page, où vous pouvez d’ailleurs vous procurer les nouvelles de façon individuelle, bonne idée.


Le recueil est accès sur l’écologie, il parait que c’est en vogue l’anticipation écologique. En même temps comment ne pas se sentir concerné avec tout ce qu’il se passe autour de nous. Thomas Day est concerné, il le fait savoir.


Je vais prendre le temps de dire quelques mots sur chacune des nouvelles, car elles ont toutes leur intérêt propre.


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La première nouvelle s’intitule Mariposa, ici point d’anticipation, mais du fantastique. Il est question d’une île du pacifique, qui traverse le temps à travers le récit. L’histoire débute par un journal de bord, écrit XVIème siècle lors d’une expédition de Magellan qui laissera sur l’île son testament. Puis les japonais y débarquent et y dénichent le testament de l’explorateur et surnomme l’île Onibaba (la femme démon). L’histoire se poursuit en passant par la guerre du pacifique lors de la seconde guerre mondiale, pour finir dans l’Amérique d’après-guerre.


L’intrigue tourne autour de l’île sur laquelle pousse des arbres mystérieux, les arbres papillons, dont les fruits ont des vertus particulières.


Le style est original, le début se fait par la lecture d’un journal de bord, puis alterne entre une relation épistolaire d’un officier japonais avec sa femme (durant la seconde guerre mondiale) et des extraits d’enregistrements de service secret américain interrogeant un ancien soldat (interrogé postérieurement sur cette même période).


La nouvelle n’est pas celle qui m’a le plus conquis, mais elle est plaisante et se lit rapidement. Il y est question de mémoire, de nature et de protection de cette dernière. L’homme qui détruit son habitat sans en connaitre toutes les secrets.


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Sept secondes pour devenir un aigle, la nouvelle éponyme du recueil, raconte l’histoire d’un vieil Amérindien et de sa relation particulière avec son fils. Il souhaite lui transmettre un certain mode de vie. Le texte se veut teinté de mysticisme.


Il y est question dans cette nouvelle de terrorisme écologiste et donc de radicalisation, forcément. Mais aussi de transmission, de culture et du retour aux choses vrais. Le thème abordé est glissant, la nouvelle est assez brute.


Je l’ai bien aimé celle-ci, il est difficile de ne pas être touché par le sujet et de se poser des questions sur notre futur.


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Retour en Asie, un décor que l’auteur affectionne, avec l’éthologie du tigre. Un consultant, spécialiste des tigres, est amené à se rendre au Cambodge sur un chantier d’un grand complexe hôtelier, après que les ouvriers aient découvert trois têtes de jeunes tigres posé sur un des murs de l’édifice.


Le texte est rageant tant il met le doigt sur des problèmes importants. Déforestation, destruction des habitats, extinction des espèces. Le récit à un côté mystique, comme le précédent.


La nouvelle est touchante et peut mettre le moral au plus bas tant les activités humaines sont parfois impitoyables. En passant, j’y ai appris l’existence d’un mouvement politique que je ne connaissais pas : les deep ecologist.


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Shikata ga nai, quatrième nouvelle du recueil dont le titre signifie, en japonais, « On ne peut rien y changer ». Dans un futur proche, trois jeunes Japonais pillent et maraudent dans la zone d’interdiction de Fukushima.


La nouvelle est très courte et ne comporte pas d’éléments SFFF (me semble), est-ce vraiment nécessaire lorsque l’on parle de catastrophe nucléaire.


Elle est très largement inspirée de Stalker (du jeu vidéo ou du roman de Arcadi et Boris Strougatski, prenait la référence qui vous convient), trois jeunes qui vivent et survivent grâce à une zone mystérieuse et interdite et souvent dangereuse.


Vu sa longueur, il serait bête de s’en priver, c’est frais et moderne.


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Tjukurpa, une nouvelle qui suit un groupe de jeunes aborigènes australiens qui se regroupent pour préserver leur pays, leur culture et surtout leur terre. Leur leader a créé un rêve, un monde virtuel, une espèce de monde ouvert (SandBox), dans lequel il a reconstitué le monde, tel un dieu 2.0. Il a vraiment tout recréé tout en respectant la cosmologie de son peuple. Il cherche des disciples pour s’occuper et préserver ce monde. Mais aussi pour préserver le monde réel, avec des moyens plus sombres et directs.


Une façon originale d’aborder un thème sensible et souvent oublié, le mépris et la destruction des cultures minoritaires.


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Dernière nouvelle du recueil et quasiment une novella tenant sa longueur : Lumière noire. Le récit suit Jasper et Jenny qui habitent à des milliers de kilomètres, l’un de l’autre. Lui au Canada et elle au sud des États-Unis. Problème, la terre a vécu un cataclysme. Une IA (surnommé Lumière noire) s’est emparée d’une bonne partie du monde et a rebattu les cartes de l’humanité.


Je n’en dis pas plus parce que c’est vraiment un plaisir de découvrir ce monde post-apo. Je me suis vraiment régalé à la lecture de ce texte. Le meilleur des six pour moi. Un mélange de Fallout et de Terminator. La nouvelle est bourrée de références et dispose d’une fin inattendue, ce qui lui donne un gros plus.


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Le recueil se termine sur une postface rédigée Yannick Rumpala, intitulée « Et la science-fiction entra elle aussi dans l’anthropocène… ». Un texte très intéressant sur l’avenir du genre qui nous intéresse, mais plus largement sur l’humanité.


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Thomas Day nous propose un recueil de nouvelles d’un haut niveau, tant par ses textes que par ses thèmes abordés.


À lire, si vous estimez, comme moi, qu’écrire de la SF sert avant tout à faire passer des messages.


Bonne lecture !


Vous pouvez consulter la présente chronique sur mon Blog

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le 17 févr. 2017

Critique lue 116 fois

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