Un roman particulièrement efficace, lisiblement addictif et qui se nourrit d'un imaginaire aux dehors terriblement quotidiens mâtinés de peurs archaïques. Avec Simetierre Stephen King s'interroge plus que jamais sur l'un des tabous premiers de l'Humanité : le passage de vie à trépas. Prenant d'emblée le sujet à bras-le-corps le romancier le plus populaire de la fin du XXème Siècle nous plonge sans ménagement dans la destinée tragique de la famille Creed, confrontée dès les premiers chapitres à la Mort et à ses retombées morales et affectives.
Étrange lieu que le Simetierre pour animaux de la commune de Ludlow, innocent petit charnier entretenu par les gamins de la région doublé d'une antichambre d'un autre lieu beaucoup, beaucoup plus terrible que sa succursale ; King installe rapidement un climat littéraire envoûtant, au pouvoir de fascination indiscutable tout en développant avec réussite une impeccable description de la classe moyenne américaine et ses valeurs judéo-chrétiennes. Il signe là un élégant sommet d'intelligence existentielle, conjuguant préjugés rationalistes et mysticisme tragique avec un bel équilibre.
Moment clé et charnière du roman le chapitre traitant du cas de Victor Pascow au sein de l'Université est l'un des sommets de terreur de toute l'Oeuvre de Stephen King. Littéralement morbide la suite du récit, fondée sur le principe du glissement, est remarquable de tristesse et de solennité confondues. Les dernières pages sont quant à elles d'une violence cauchemardesque inouïe, nous laissant sur un constat pour le moins amer et mortifère, avec un goût de cendre dans la bouche et des lubies d'effroi dans la psyché. J'ai adoré.