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Spider
8.1
Spider

livre de Patrick McGrath ()

Spider, qui dit quoi ?
D'abord ces taches où il faudrait distinguer quelque chose. Le train débarque son plein de voyageurs, le dernier a descendre est malhabile, semble surpris et inquiet par tout l'environnement ferroviaire, sort de sa poche un papier qui devrait le guider dans le dédale des rues, s'arrête pour ramasser des détritus, son papier dit pegge street, au 71, c'est rouge et marron, il cogne, une Miss Wilkinson ouvre, lui c'est Cleg. L'immeuble est propre, les murs sont tout de même fatigués, la salle d'accueil présente des carreaux de couleurs passées, un homme usé parcourt le national geographic d'une loupe, l'interroge sur le scorpion, le prenant pour un ancien de l'Afrique, il ne faut pas sortir nu-pieds en Afrique, il ne faut pas non plus faire confiance à ce qu'il dit, c'est Terrence, et il parle de se faire piquer par un scorpion, de connaître une agonie de 17 heures, ces bêtes là, ça se cache au fond des chaussures, Cleg n'aime pas qu'on porte sa valise, on le conduit vers sa chambre, pourvue du strict nécessaire, moins que peu. Une cheminée, on ne sait, un évier, il sent des odeurs, ses vêtements ? Pas encore déshabillé, le bain est près. L'eau est saumâtre, boueuse et claire à la fois. Il s'y terre, annone des sons indicibles. Il faut défaire la valise, qui contient des ficelles et puis rien. Un cahier quand même, à dissimuler dans la table de nuit, où sous le tapis, Kitchener street, Ondurman close, suivre le canal, Kitchener street, maman, la nuit est passée. On ne fume pas au lit ici. Les lits sont assez spéciaux, on s'y fait après quelques années, et si lui ne veut pas y rester si longtemps, la vie est parfois brutale, dans un asile, on peut y rester pour toujours, c'est l'habit qui fait l'homme, plus il y a d'habits, plus il faut d'hommes, les bancs dehors sont tout jaunes, il peut y fumer et partir errer au bord des voies ferrées, entre les palissades, découvrir un potager et des cabanons de fortune. Ramper dans l'humus à la recherche de sa mère, avec qui il voudrait encore être. Sa maman, elle était si...
Corned beef, Liver sausage, keep britain tidy, photo de pâturages vallonés, dans un café terne. Après la pause, retourner aux activités de jardinage, tout tremblant, les autres remettent leur dentier en place, leur queue au centre du pantalon en riant, lui reconstitue un puzzle. Assez splendide. Ses cahiers sont hachurés de griffonages illisibles pour le commun, comme le sens de la ville pour ses esprits. Que fait ce vélo, ces rideaux ouvrent sur une famille avec un enfant habile de ses mains derrière la fenêtre, un enfant, lui dédoublé, il scrute et parle avant eux pour dire la même chose. C'est dans sa tête peut-être ? The Dog and Beggar est ouvert, on y sert de bonnes bières, les filles y sont légères, montrent leurs seins à l'enfant, Cleg est terrorisé, papa ? Papa ? Mais ce n'est pas lui. Le gamin racle son assiette avec la fourchette, ça exaspère le papa, Dog and Beggar, la mère vivait dans l'Essex, il y avait des toiles aux arbres, comme des toiles d'araignée, ça ressemblait à de la mousseline. Si on sait les regarder, on voit des oeufs. Toute sèche et vide, une fois la toile faite, elle peut s'en aller mourir, l'araignée. On confie la maison au gamin. Oui, tout ressemble à de la mousseline, à de grandes roues brillantes, mais ce ne sont que des paquets de larves. Elle s'en va en traînaillant. Le gamin aussi tend des fils, dans sa chambre. Pendant que les parents s'amusent, un gin-orange, une pinte, les autres femmes parlent de les finir à la main dans ce bouge, des grosses pouffes bien joyeuses, mais lui revisite son passé, et ne semble pas tout apprécier. « Les anglais ont débarqué », seul moyen de se débarrasser des clients type rognure qu'elles disent. Lui ne se débarrasse pas de son passé. L'air refoule, toute l'installation est pourrie, le père est plombier, il faudra voir ? Toutes les mêmes, sauf celles qui ont trois seins, comme cette française de Manchester, le plombier c'est un peu lui quand la pute le branle sous un pont, Spider le petit, aussi. Sa grosse araignée au plafond, qui rampe, rampe, rampe, et divise l'espace de sa mémoire. Il est parfaitement peigné lui, et il chantonne. Ses puzzles ne vont pas, mais il veut les faire aller, alors il jette tout au sol. Son pantalon est trop court, sa veste élimée, mais sobre. L'usine à gaz le fascine, parce qu'elle est dangereuse. Ca sent le gaz partout. Le père veut un grand scotch, ça marche. Les putes l'apprécient, il est classe. Sa femme se fait belle, pour voir son père. Spider joue avec ses cordes, mais il sait tout. Le vélo qui mène le père près du pont désert, la nuit, la lampe à pétrole qui illumine le cabanon, la fille ivre qui titube dans le potager et trébuche en riant, elle se prend des gamelles, mais ça ira mieux dans une minute. Sa femme le cherche dans le pub, mais il est déjà affairé ailleurs, pinte de bière, chips, Bill Cleg alias Spider note tout, Salisbury Hôtel, potager, ciel étoilé, escarpin oublié dans les herbes, gémissements des trains et des amants, regard de défiance du mari surpris, coup de pelle sur l'aimée, la compagne, il faut l'enterrer peut-être. Sous les salades, la pute baille en fumant, il fait frais, le sol résiste, une tombe, ça prend du temps à creuser. Les amants boivent et se réjouissent devant la dépouille. Elle fonds, elle s'en fout, des voisins, de tout, ils rejoignent le 29, la mère est remplacée. « Barrez-vous bandes d'ordures où je vous bute tous, je suis espagnol et il ne faut pas me parler de nonchalance où je vous arracherai le coeur à la truelle ». Ca c'est les gens qui vivent maintenant avec Spider. Les bouts de carreaux dans la manche, les mégots repris au sol, la tranchée artère qui fait envie. Le directeur est tout vert et marron, il dit que ça peut crever un oeil, bacon egg, cheese, cigarettes, mauvais sandwich, les pâturages, la tasse qui répugne, comme la lumière de la rue Kitchener, le bridge café, le 29 avec sa mère de famille et son ange en poussette, The dog and Beggar, les échafaudages fleuris, le vent inutile, frêle, les souliers qui raclent les trottoirs, le canal déserté, avec rien à contempler. Spider pense à cette fille qui a remplacé sa mère, elle le trouve étrange, en lui faisant son toast, le père rentre, il amène des abats,le gamin leur dit qu'ils sont des assassins, il leur dit en étant enfant et adulte, en une même seconde, plié contre l'humus, avant, après, douce nuit sacrée, tout est calme, lumineux, autour de la Vierge, la mère et l'enfant, si tendre et délicat, « dors en paix, dors en paix », pas sûr. Spider c'est Dennis en fait, un gamin seul, qui s'ennuie, il invente peut-être tout, pour passer le temps. Il doit avouer qu'il n'y croit pas. Tout ira mieux, la mère a ramené un truc extraordinaire à manger mêmes'il a l'air monstrueux, genre d'anguille verdâtre. Spider a emprunté un trousseau de clefs, avec un anneau, la directrice le fouille, y trouve juste des cordes, des plumes, les clefs étaient dans sa serrure. La directrice de l'asile ressemble à une catin, comme celle qui a contemplé sa mère enterrée, ailleurs, dans sa tête en tout cas. Les cordes relient la porte à la lampe, démultiplient l'espace, stérilement. Il a actionné la cuisinière, concrètement. La pute est morte. Dieu tout-puissant, il a fait ça, il a buté sa mère. Prk 315 K, la bagnole est lustrée, ouverte, « prêt à revenir chez eux? », il veut une clope, on l'attend, hors de l'asile. Dans sa famille ? Mais laquelle...
ThomasRoussot
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le 31 août 2013

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ThomasRoussot

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