Je sors très perplexe de ces roboratives 500 pages. Je ne sais toujours pas de que Gilles Farcet y fait, qui entend s'y livrer "en toute sincérité et innocence". N'est-ce alors que cela, un geste, le plus fidèle possible aux mouvements intérieurs, aux croyances et aux désirs tout autant qu'aux attirances esthétiques (stylistiques) et morales ?

Cela valait-il d'être publié ? Certains le penseront, et, si bien leur en advient de la lecture, je les rejoindrai dans cette appréciation. Quant à moi, Je ne suis pas du public que ce livre peut toucher, je pense, et les raisons de sa publication ne me sont pas claires. Je ne comprends toujours pas pourquoi Gilles Farcet l'a offert au public - j'aurai besoin que l'on m'explique. Le portrait dressé, au final, me frappe comme celui d'un réel serviteur de l'absolu à qui son esprit servirait d'étranges récits, souvent assez benoîts.

L'anecdotique des rencontres avec des sages et la manifestation de l'énergie que Gilles Farcet déploie à faire lien sont entretissées de la présentation de ses vues propres, revendiquées d'un cadre d'inspiration chrétienne (personne, autre monde, impérieuse nécessité du positionnement moral sur quasiment tout) qui, à mon sens hélas, se fait fort de replacer de très larges pans de son expérience dans un système axiologique perfusé du vocabulaire de la bonté chrétienne plus ou moins bourgeoise. J'y ai donc souvent trouvé beaucoup d'agacement. Gilles Farcet se définit comme prêtre - fallait-il qu'au fil des pages, il s'exprime de plus en plus dans un idiome saturé des mots normés d'un mauvais curé (robuste compagne, noble, "ces jeunes", etc.) ? - je n'aurais peut-être rien là-contre s'il prenait soin de montrer de quoi exactement ils sont inspirés, mais j'en suis à subodorer que leur emploi fait sens un peu moins plat aux gens qui le connaissent mieux.

Or, à mettre des mots partout et sur tout, le bonhomme se décrit aussi comme passant son temps à casser ses propres schéma, grâce à la double capacité qu'il possède de s'engager résolument dans une direction et d'entrer dans le flux des relations, jusqu'à parfois d'authentiques abandons (peu effusifs, certes - mais c'est là son caractère). On n'a pas à ce point la reconnaissance et la bénédiction de tant sans qu'il y ait une ingénuité de fond. Mais, aaaah, que tout ceci est divinement étrange, on n'en parle pas non plus ainsi qu'il le fait, sans orgueil manifeste, certes, mais avec une étrange insistance à en faire sens univoque pleine de "moi, mon, mien", aussi rempli de gratitude cela soit-il. C'est très étrange. Je ne sais pas quoi en penser. Je veux dire : je ne parviens pas à en être touché, et cela vient heurter les représentations que j'ai sur ces sujets. Ce qui en soi est bien intéressant.

Quelques belles lignes m'auront frappé, pourtant, sur Lee Lozowick et Yogi Ramsuratkumar. Quelques seulement. Gilles Farcet n'émeut pas. Ce n'est pas son propos, qui est essentiellement descriptif et, à de rares occasion, plus spéculatif. Il nous dit ses bouleversements de loin. Jusque dans le rire même, on ne sait jamais si son ironie reflète un bon gros orgueil ou de une réelle difficulté à répondre aux questions stylistiques de l'humour. "Je me dévoile somme toute très peu", écrit-il en amont de la citation liminaire à cette critique. Je tends à penser que c'est encore le cas dans ce (selon moi trop) gros livre.
Kliban
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le 18 sept. 2014

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