Ensemble contre le reste du monde

N’avez-vous jamais caressé l’idée d’abandonner votre vie convenue et de monter dans un train pour aller à la rencontre de votre destin ? Question tranchée pour notre protagoniste qui embarque sans hésitation dans un Thalys. Les nonante minutes de voyage lèveront le voile sur les raisons de ce départ précipité et de sombres souvenirs d'enfance, un pacte fraternel de cette biologiste, apparemment sans histoire. Le temps affecte-t-il les liens du sang ?


C’est en tout cas ce que nous propose Pascale Fonteneau avec TGV, sorti en 2003. Auteure française vivant à Bruxelles, elle est connue notamment pour son affection pour l’écriture de romans policiers ainsi que ceux de la collection Série Noire des éditions Gallimard dont Confidences sur l’escalier, sorti en 1992.


TGV s’ouvre sur une scène de quai, notre personnage principal s’engouffre dans un Thalys Bruxelles-Paris dans la précipitation jusqu’à en oublier son manteau. Son auto proclamée meilleure amie Claire embarque de justesse et tente de la raisonner, de rentrer au bercail de leur vie agréable, paisible et rangée. Seulement le lecteur apprend que ce quotidien pépère n’est qu’un mirage où l’on se contente d’observer sa propre vie sans broncher.


Grâce aux analepses successives, les histoires du passé jaillissent pour le plaisir du lecteur : le personnage du frère ; George a une place prépondérante dans l'existence de cette voyageuse. Marqués par l’absence d’un père soldat américain, mort à la guerre du Vietnam et d’une mère plus préoccupée par l’intendance de la ferme familiale et de ses propres parents vieillissants, les enfants sont livrés à eux-mêmes. Le lecteur s’amuse à les observer lorsqu’ils émulent des jeux de guerre, expérimentant pléthore de jeux d’adresse et de stratégie avec les autres enfants du village, rendant ainsi grâce à leur père, ce héros. Ils se promettent d’être présents l’un pour l’autre à la vie, à la mort. Malheureusement George dérape et commet de petits larcins et plus tard entrainera sa sœur avec lui à un homicide involontaire, secret enterré six pieds sous terre.


Par la suite, ne tenant pas à se faire attraper par les autorités, il part au loin et chacun a continué sa vie. S’en suit un mélange de lamentations et de passivité qui laisse tout passer ; cette amitié forcée avec Claire qu’elle méprise, son amant François dont elle ne veut pas porter l’enfant, trivialités abandonnées par un coup de fil de son frère ; ce qui nous amène au début du récit où notre protagoniste se précipite à Paris pour le rejoindre, ayant reçu un signe de vie de sa part depuis tant d’années. Elle se libère enfin des faux semblants ; on remarque une progression du ton à l’égard de Claire accentué : elle lui dit ses quatre vérités, ne la ménageant pas, la provocant pour qu’elle la laisse tranquille. Cette évolution du personnage qui reprend contrôle de l’expression de ses opinions et de ce fait de sa vie est inversement proportionnelle aux stress et interrogations qui se posent sur sa route.


Avec ce récit, Pascale Fonteneau nous propose de nous plonger sur le thème de la guerre et des liens sociétaux dont ceux de famille et notamment fraternaux, le rapport héréditaire et l’éducation, la répétition des événements et le caractère immuable de ceux-ci.


Les analepses aèrent le récit et permettent au lecteur de s'immerger à grande vitesse dans un suspense haletant. Le vocabulaire est abordable et ne représente pas de difficultés et invite à tourner les pages du roman pour en continuer la lecture.


Durant la narration, il n’est pas fait mention du prénom du personnage principal de ce récit. Elle endosse de nombreux rôles , tour à tour: biologiste, amie, amante, (petite) fille, sœur, mais puisque les autorités sont à présent à la recherche de son frère et que des gendarmes l’attendent sur le quai à l’arrivée, le monde connaîtra bientôt le nom de la cadette de George Wacke.


Laissez-vous tenter par ce sympathique roman noir à la progression rapide, mais réfléchie qui saura vous accompagner lors de vos déplacements en train, vous amener à vous poser la question : seriez-vous parti ? Auriez-vous fait les mêmes choix ? Une seule chose à faire pour en être sûr : lire TGV de Pascale Fonteneau.

Althaea
5
Écrit par

Créée

le 12 mars 2018

Critique lue 62 fois

Althaea

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