Cheryl, Mavis, Susie, Josh et d'autres, meilleure amie, rivale, père, amant, tante… toutes et tous collectent leurs souvenirs de Dulcinea Evers alias Trésor, célèbre peintre jamaïcaine. Ce récit choral tente de cerner cette figure qui n'aura laissé personne indifférent. Chacun décrit l'impact qu'elle aura eu dans leurs vies, leurs sentiments envers celle qui n'est plus. En effet, la principale intéressée vient de décéder. Elle, le noyau dur de l'histoire, n'a qu'une présence fantomatique dans le roman, le fantôme d'une vie passée mais toujours présente dans les cœurs.
A tour de rôle, ils racontent. Des histoires personnelles teintées d'amertume, d'amour, de ressentiment, de bienveillance, un éventail d'émotions qui se déploie avec pudeur et beaucoup de délicatesse. Pas de pathos, pas d'effet poussif pour traiter les ressentis de chacun. J'ai été touchée par la douceur et l'authenticité de la narration d'Alecia McKensie. Il se dégage du récit un cadre intimiste, qui favorise la proximité avec les personnages. L'ambiance tient du confessionnal. On écoute, sans juger.


Ce kaléidoscope de récits à la mémoire de Trésor ne fait pas de l'ombre à ces personnages secondaires. Ceux qui l'ont connus sont autant mis en valeur. Leurs vies, leurs choix, leurs pensées, ces éléments leur permettent d'acquérir une profondeur. Ils ne sont pas que de simples narrateurs.
Le fil rouge est Cheryl, seul personnage qui intervient à plusieurs reprises puisqu'elle est la meilleure amie chargée de répandre le reste des cendres de la défunte sur l’Hudson river. Le roman dure le temps de son voyage de Kingston à New York. Temps des questionnements, du recueillement, du deuil. A titre personnel, je me suis attachée à Cheryl, pour sa loyauté et son amour envers Trésor, touchante. J'ai aimé leur relation fusionnelle, mais qui n'est pas sans non-dits.
On a aussi une histoire dans l'histoire. La tante Mavis, figure mutique, fournit pourtant le plus long récit. Elle conte son histoire personnelle mais aussi, en parallèle, celle de la Jamaïque, sa colonisation, son esclavage, ses ouragans et ses manguiers.
Plus on avance dans la lecture, plus le puzzle Dulcinea Evers se construit, une vue d'ensemble apparaît. Mais est-il complet ? Y a-t-il des pièces manquantes, des secrets qui n'ont pas été livrés? Pour le savoir, je ne peux que recommander Trésor et de faire connaissance avec cette femme libre.

Vespertine
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le 20 juin 2016

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