Ubik commence par du très classique : Anticipation du futur dans un monde kafkaien en perte de sens et de valeur, où les machines et processus automatiques ont remplacé l'homme dans son quotidien, où le monde "s'autogère" par les entreprises et compagnies et où tout se monnaie, terriblement tout. Il y a aussi l'existence de personnes aux facultés psy (télépathe, précog (ceux qui pressentent l'avenir)) et d'autre qui peuvent contrer ces facultés psy. Un monde bien en place ou les uns sont employés par des firmes d''espionnage industriel tandis que les autres sont employés par des firmes de contre-espionnage.
Puis apparaît une anti-précog d'un nouveau genre qui contre les précog non pas en limitant leur capacités mais en modifiant la ligne du cours du temps, rendant obsolète les précognitions, sans réellement effectuer de voyage dans le temps par ailleurs.
... Tout ça est exposé en quelques pages et apparaît de façon bien plus clair que le paragraphe ci-dessus en introduisant au passage un autre sujet central du livre, le concept de semi-vie, par l'intermédaire du personnage de rucinter (président de la plus grande firme de contre-espionnage) dans son dialogue avec sa femme, en état de semi-vie. ( Etat intermédiaire entre la vie et la mort : Le corps est mort, mais la conscience n'as pas encore totalement disparut et un appareillage autour du corps mort permet la communication avec les vivants. Dans Ubik, la "conscience" me semble être un état plutôt psychologique que spirituel, disons la capacité à intellectualiser et mémorisé le monde, et le ressentir par l'émotion connecté a l'intellect et la mémoire)
Bref un joli fatras de science-fiction exposé en quelques pages mêlant pêle-mêle plein de sujet casse-gueule (télépathie, précognition, non-mort, malléabilité du temps). On se dit que l'enjeu du livre, en développant sont intrigue va être de maintenir cet univers dans quelque chose de cohérent, ce qui semble être impossible étant donné le nombre de sujets casse-gueules abordés en même temps.
Et effectivement c'est impossible. Dans un vertige anxiogène et macabre qu'il faut découvrir par la lecture, le monde se défait peu à peu, pour se dissoudre totalement afin de se resserer sur l'homme et sa conscience, c'est a dire la capacité de l'être à se sentir vivre, en ressentant le monde par ses émotions connectées à son intellect et sa mémoire.
La (science) fiction de P.K.Dick permet d'aller au delà du mythe de Platon, ce n'est plus seulement le monde dont on ne perçoit que les ombres par les sens, mais la conscience elle-même qui est projeté et déformé par la (science)fiction. l'Entité Ubik est présenté comme le dernier lien a une forme de rationalité, et c'est un lien vaporeux, lumineux, mythique.
C'est terrifiant, vertigineux et jouissif !