Nathalie, ma sœur (permets-moi cela), je ne réfléchis pas, je laisse mes doigts courir sur le clavier et mon coeur s'affoler… Si tu savais comme j'ai aimé ton texte si plein de vie, d'énergie, de rires, de couleurs, de mouvements, de poésie, un texte qui pourtant parle de la disparition de l'être aimé, de ton homme adoré et de toi, de ton effondrement, de ta façon de t'accrocher aux branches si minces sur les bords des chemins, histoire de tenir debout, à peu près…
Tu n'as rien lâché, tu as su dire aux uns et aux autres leur inhumanité, leur médiocrité, leur petitesse. Tu leur as balancé ça à la figure, tu as pris ce temps, tu as eu ce courage, cette patience… Tu es une reine, Nathalie, et j'admire ta force, ta volonté, ta détermination, j'admire aussi les mots qui sont les tiens, emplis de grâce, d'humanité, de sincérité, de vérité, de poésie (le nom des fleurs, Nathalie, le nom des fleurs…) : « je ferai de ce double mètre carré (dis-tu de la « petite tombe avec un jardin ») un Terra Botanica en réduction, une tête de Jivaro, un jardin à la française en miniature, avec ses buis et sa symétrie, un minuscule jardin à l'anglaise avec des herbes folles et des collerettes d'ancolies ou de Coeurs de Marie. » Savoir que des gens comme toi existent, là, sur cette terre où rien ne tourne bien rond, me comble de bonheur… On peut encore y croire alors...
Une multitudes d'images me viennent à l'esprit dans un joyeux mélange : le petit lopin de terre (deux mètres carrés pour la sépulture de ton amour) où s'entremêlent dans une douce folie fleurs et plantes et la petite grille devant la tombe… Qu'est-ce que j'ai ri des courriers avec le maire au sujet de cette petite grille et de ses 12 cm de trop… Et cet inventaire absurde pour la succession… la découverte du canon dans le jardin… J'en pleurais (de rire), oui, vraiment! Et la prof de philo d'Armance avec sa robe « qui n'existe pas» et son écharpe en peau de chat... Incroyable récit de cette rencontre où tu te dis que pour la philo, c'est mort… Et puis, j'ai tellement aimé tout ce que tu dis sur les mots, la langue… J'y suis sensible aussi. L'insupportable « ça va ? » : «Où va-t-on dans « ça va » ? Pas de volonté géographique d'aller quelque part. Une débandade, même. Un fiasco sur toute la ligne. Rien ne va dans « ça va »... » Je te cite encore « ...je ne pose jamais cette question, parce que je sais trop combien chacun porte sa part de malheur, sa barre de fer dans le coeur, et parce que je sais que personne n'en a rien à cirer. » Et ta lettre à la greffière du juge des tutelles sur sa « ponctuation défaillante » et sa « syntaxe douteuse » : comme tu as eu raison de pointer leurs limites à eux, les pinailleurs, les chicaneurs, les ergoteurs, ceux qui croient être du côté du vrai, du droit, du juste… J'ai beaucoup aimé aussi (la liste est longue, je sais) ce que tu imagines derrière un « -oui ?» qui t'est adressé de derrière un bureau, la vie de celui ou celle qui balance médiocrement cette non-réponse, ce non-sens, à l'autre (toi en l'occurrence!) qui attend depuis longtemps, qui n'en peut déjà plus avant d'arriver et à qui on ne dit même pas bonjour…
Et puis, tes enfants... J'y ai retrouvé les miens, évidemment… Je tente, moi aussi, d'être une mère « possible », ce n'est pas facile et je trébuche souvent… Eux aussi me disent aussi parfois de me taire, gentiment bien sûr... On a trop de choses à raconter, nous. Et puis, on n'est pas des taiseuses, on aime trop l'existence pour ne rien avoir à en dire, pour cacher nos émotions ou nos larmes, pour taire nos envies et nos désirs.
De tout coeur, merci pour toutes ces belles émotions et ce regard sur la vie...


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le 26 févr. 2021

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