Il y a une grande qualité narrative, une belle retranscription d’un esprit malade de dépression. Mais le personnage m’est insupportable. J’ai eu envie de le claquer à chaque ligne passé le tiers du livre !


Je parlais d’égoïsme dans Sukkwan Island. On retrouve la même idée puisqu’il s’agit de la même source d’inspiration, une auto-fiction basée sur le père de l’auteur, James. Perdu dans les limbes de sa douleur psychique et physique, il ne cesse de se plaindre, de culpabiliser, de se faire du mal. Il n’est qu’un incapable qui a passé son temps à être un enfant sage et à étudier proprement au lieu de profiter de la vie et des joies du sexe. Est-ce si mal que ça de ne pas être « capable » de s’amuser pendant sa jeunesse afin d’être une personne qualifiée de sérieuse? Aigri par sa rancœur et son impression de faute, il blesse tant sa famille que c’en est malsain. De quoi projeter la culpabilité vers ses proches qui ne parviennent pas à le sauver.


Marié, deux enfants, il les abandonne quand le divorce éclata à cause de ses divagations sexuelles. Puis il se remarie mais sans être plus fidèle qu’auparavant … Ne pas être capable de se maîtriser est une chose, s’en vouloir de cela également. Mais blesser délibérément les gens qui nous entourent pour extérioriser est mal. Il a pourtant eu des moments heureux, réussi à un moment à construire quelque chose sur les bases du bonheur. Toute architecture est fragile et peut tomber, mais il reste des morceaux à recoller, à ré-assembler.


J’ai donc haï James, car si on lit les autres œuvres de l’auteur on comprend ce qu’il veut faire passer comme message. La vie est une épreuve, une survie constante. Dans Sukkwan Island, le père à la merci de la faim et de la solitude se démène pour revenir sur les terres habitées car son instinct de conservation est le plus fort. Il devrait en aller de même pour quelqu’un en dépression. L’amour de son entourage devrait être une bouée suffisante pour reprendre une bouffée d’oxygène.
Ce roman n’est pas mon favoris en l’état mais fait preuve d’une grande dose d’émotions et de souffrance. Tant pour la famille du malade que pour ce dernier lui-même …


Après avoir rencontré l’auteur, il nous a expliqué qu’il avait eu besoin de faire ce livre pour faire le chemin parcouru par son père, comprendre, pardonner son acte. Une sorte d’adieu pour dire qu’il ne lui en veut pas. Malgré cela, malgré le fait que la dépression est une maladie difficile qu’il ne faut pas juger, j’ai personnellement du mal avec le point de vue du personnage de James. Pour avoir été à sa place, vivre la dépression, c’est quelque chose de très difficile. Et lire ce genre de roman me rappelle chaque jour qu’il faut aller de l’avant, essayer toujours un peu plus de supporter l’épreuve pour aller au lendemain, trouver le salut, le bonheur. C’est un travail quotidien, mais un jour ou l’autre il en vaut le prix. Bref, j’aime toujours la plume de David VANN et ses romans, j’attends d’en lire d’autres qui me toucheront sans doute moins personnellement.


https://cenquellesalle.wordpress.com/2019/06/12/un-poisson-sur-la-lune/

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le 8 avr. 2021

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