Je ne vais pas revenir sur mon amour de cette bonne vieille VHS et des vidéoclubs puisque je me suis déjà largement épancher sur le sujet à travers le documentaire Révolution VHS. Même si le support reste d'un point de vue qualitatif l'une des pire façon de voir un film, la vidéocassette et le vidéoclub restent deux solides piliers fondateurs de ma passion pour le cinéma avec autour une bonne dose de nostalgie liée à des souvenirs d'enfance. C'est donc avec beaucoup d'impatience, de curiosité et de gourmandise que je me suis plongé dans ce petit livre de Lucas Balbo, documentariste et journaliste cinéma auteur par le passé de bouquins sur Les Classiques Cinéma Bis ou des réalisateurs comme Mario Bava ou Michel Lemoine. L'occasion de faire une petite dédicace à SimplySmackkk qui m'a informé de l'existence de ce bouquin sur lequel je me suis immédiatement précipité.


VHS Story revient donc à travers un peu moins de 200 pages richement illustrées sur l'histoire de la vidéocassette en France de ses origines jusqu'à son agonie et sa mort. Le livre aborde divers thématiques et dossiers, propose quelques entretiens et recense de façon alphabétique plus de 40 éditeurs qui pendant 20 ans ont proposés divers films sur ce support que ce soit à la vente comme à la location.


VHS Story est un bouquin à la fois très attachant et un peu décevant et je vais m'efforcer d'en expliquer les raisons . Tout d'abord d'un point de vue très anecdotique lorsque l'on voit le format du livre on se dit qu'à quelques centimètres près l'ouvrage aurait pu avoir la taille exact d'un boitier de vidéocassette et que même si ça ne changeait strictement rien au contenu du bouquin cela pouvait déjà apporter un tout petit plus à la dimension nostalgique de l'objet. Mais revenons à l'essentielle avec le contenu du livre et les divers thématiques qu'il aborde au fil de ses pages. Si l'on s'en tient à son sommaire on a la sensation que VHS Story va vraiment faire le tour de la question et embrasser tout ce que les mots VHS, vidéocassette ou vidéoclub peuvent évoquer comme souvenirs mais à la lecture de l'ouvrage le sentiment sera un peu plus contrasté.


Le bouquin s'ouvre sur un intéressant dossier contextuel en guise de préambule sur l'histoire de la télévision et du support vidéo avec de nombreuses informations sur les premiers magnétoscopes quasiment préhistorique, la guerre des formats et comment le format VHS s'est finalement imposé en France. Un dossier très factuel mais assez riche dans lequel on apprendras beaucoup de choses notamment sur Shizuo Katano le créateur de la VHS. Ensuite le livre s'attaque à un sujet qui me tient particulièrement à cœur avec l'histoire des vidéoclubs de la profusion d'enseignes indépendantes jusqu'à la mort de supermarchés de la vidéo une quinzaine d'années plus tard. Un texte auquel j'adhère totalement dans la mesure ou je fais exactement le même constat sur la trajectoire des vidéoclubs qui passeront de lieues d'échanges et de découvertes chaleureux à des enseignes de consommation de films gérées comme des fast food. Le dossier est émaillé de quelques témoignages et anecdotes plutôt amusants comme lorsque Christophe Lemaire nous parle d'un client rapportant la VHS du film Maniac de William Lustig. VHS Story nous parle ensuite de la presse spécialisée à travers un long et riche entretien avec Gilles Gressard collaborateur des magazines Vidéo 7 et Télé K7 qui nous replonge dans la nostalgie des magazines papiers que l'on dévorait pour connaître les nouvelles sorties VHS du mois à venir.


Ensuite le bouquin entame un long inventaire alphabétique des différents éditeurs allant des tout débuts de l'aventure VHS jusqu'à son agonie. Les différents éditeurs sont présentés à travers leurs fondateurs, leur histoire, les titres emblématiques de leur catalogue, leur logo et jaquettes et leur pérennité dans l'aventure de la diffusion de films. Au fil de ses pages, le côté Madeleine de Proust de VHS Story fonctionne à plein régime puisque à travers de nombreuses illustrations on retrouve non seulement des jaquettes d'époque avec le logo emblématique de l'éditeur mais aussi les publicités que l'on trouvait dans les magazines papiers cités plus haut comme Vidéo 7, Vidéo News ou Télé Ciné Vidéo. Le grand bal des éditeurs n'est pas d'un intérêt constant mais il titillera forcément la fibre nostalgique des amateurs de VHS retrouvant les visuels et la petite histoire d'éditeurs oubliés et disparus comme Ciné 7 , Sunset Vidéo , Cocktail vidéo, Scherzo vidéo, Gilda Vidéo Production, Super Vidéo Production et bien d'autres. Fatalement les petites histoires des petits filous et passionnés de l'édition seront plus attachantes et riches en anecdotes que celles de géants tels que Warner Homme Vidéo ou Gaumont Columbia RCA . C'est le cas par exemple de Columbus Vidéo grand spécialiste du retirage et du visuel mensonger à tel point que les films vendues essentiellement en solderies étaient comme la boîte de chocolats de ce bon vieux Forrest Gump , tu ne savais jamais sur quoi tu allais tomber. De nombreux éditeurs de l'époque comme Melissa Vidéo jouaient d'ailleurs sur des visuels super clinquants mais mensongers et des traductions très approximatives de titres venant d'Italie, d'Espagne, du Japon ou des USA. Des pratiques qui front le bonheur de Mad Movies avec la célèbre rubrique Tonton Mav VS the Flying Jaquette. Cette grosse partie de l'ouvrage, coupée en deux, bien qu'un poil répétitive, est assez riche et complète allant jusqu'à la superbe collection HK Vidéo de Christophe Gans et Samuel Hadida dont je possède encore quelques reliques ne pouvant me résoudre à m'en débarrasser.


Histoire sans doute de casser la monotonie de l'inventaire des éditeurs on revient en plein milieu à des dossiers un plus généraux avec première grosse déception un roman photo un peu cheap sur un vidéophile passionné expédiant du coup la thématique des collectionneurs de VHS en trois pages à l'intérêt des plus anecdotiques pou ne pas dire complétement nul. Ensuite viennent deux dossiers, un sur les vidéos en langue étrangères et un autre sur Les auteurs et leurs Droits qui ne m'ont pas vraiment transportés ni convaincus. Un gros creux d'attention de lecture qui fort heureusement reviendra avec une longue interview bourré d'anecdotes et richement illustrée du formidable Laurent Melki indissociable du culte de la VHS avec les formidables visuels qu'il donnera à de nombreux films de l'époque. Je serais en revanche bien plus réservé sur l'entretien avec Jean Marc Toussaint de Virgin Vidéo qui vient juste après. Le bouquin donne alors la sensation de s'éparpiller un peu en proposant trois courtes chroniques de films tournant autour des thématiques de la VHS et du vidéoclub avec Clerks, Vidéodrome et The Ring (Soyez Sympa Rembobinez est évoqué dans le dossiers des Auteurs et des Droits). Cette thématique aurait sans doute mérité d'être exploité bien plus largement au sein d'un chapitre général regroupant bien plus de films que ces trois titres balancés comme ça à l'arrache entre deux dossiers. Puis avant de reprendre l'inventaire des éditeurs à la lettre P nous auront droit à une longue interview de Bruno Maccarone et Patrick Nadjar les fondateurs de Haxan Films, boîte indépendante un peu mythique pour avoir proposer à la vente des films extrêmes comme les Nekromantik ou dans un autre registre Santa Sangre de Jodorowski. Jusqu'à ses ultimes pages VHS Story reprend alors la liste des éditeurs avec toujours la même mécanique et un intérêt fluctuant selon les petites histoires mais aussi la nostalgie provoquée par l'évocation de ses divers éditeurs.


Globalement VHS Story est un bouquin vraiment attachant et agréable à lire et j'avoue avoir retrouver avec beaucoup de plaisir certains éditeurs que j'avais complétement oublié et pleins de petites choses agissant comme autant de petites bulles de souvenirs qui vous éclatent dans la tête. Le concours Le Ruffian pour gagner un lingot d'or, les coupons à découper pour recevoir les catalogues des éditeurs, les autocollants de Vidéo 7 pour les tranches de vidéocassette, les publicités, les visuels des jaquettes je n'ai cessé à la lecture du bouquin de me dire avec bonheur "Ah mais oui putain c'est vrai j'avais oublié ce truc" (oui j'ai la nostalgie grossière). Même si le livre est assez complet il me manque vraiment un gros dossier sur les collectionneurs de VHS d'hier comme d'aujourd'hui avec en extension un petit truc sur le marché de l'occasion. J'aurais aussi beaucoup aimé avoir un dossier sur l'impact des vidéoclubs sur toute cette génération de réalisateurs français qui ont forgés leur amour du cinéma en découvrant celui des autres en VHS. Globalement je trouve également que le ton du livre est très journalistique, factuel et un petit peu froid là ou j'aurai adoré trouver un peu plus de nostalgie, de passion, de folie et d'humour ce que l'on retrouve (fort heureusement) dans quelques entretiens et anecdotes.


VHS Story reste un très bon petit bouquin qui rempli parfaitement son rôle de Madeleine de Proust des années vidéoclubs et il ne passe pas loin de devenir l'ouvrage de référence sur le sujet. Il ne manque au livre de Lucas Balbo que quelques thématiques oubliés ou pas assez mise en avant, une ribambelle d'intervenants vraiment passionnés (réalisateur, collectionneurs , ancien gérants de vidéoclubs) et un ton plus enthousiaste, léger, nostalgique et amoureux pour me faire adhérer à 100%.

freddyK
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le 12 janv. 2022

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