C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayon.
C'est une vallée baignée de soleil, perdue quelque part dans le nord de la Californie. Un havre de paix qui échappe à la vue des Dieux qui l'ont créé.
Centré par la Salinas, fleuve porteur de vie, encadré par des montagnes, c'est un jardin fertile, une contrée verdoyante, un paradis terrestre. Un jardin d'Eden sur Terre.
Au coeur de cette vallée, ça vit, ça s'agite. L'Homme est venu y poser son empreinte, dans toute sa diversité. En ce début de XXe siècle, entre les quelques villes naissantes se dessinent encore de grandes exploitations agricoles, des fermes aux champs abondants.
On y trouve de tout. Des hommes formidables, exceptionnels, d'autres médiocres, et certains exécrables.
L'humanité propose tout son éventail dans cette vallée. Il suffit de suivre deux familles pour s'en rendre compte.
Certains sont des hommes d'exception. Brillants, ouverts et cultivés, agréables. Le patriarche Samuel Hamilton en est l'exemple idéal, immigré Irlandais philosophe et bricoleur, guide de sa famille et de tant d'autres. Un homme honnête, modeste comme sa terre, rocailleuse et hostile. Un homme pauvre en biens, mais riche en coeur.
D'autres sont plus terre-à-terre, telle sa femme Liza. Roc solide sur lequel repose sa famille, pragmatique et décisionnaire. Un volcan silencieux, prêt à entrer en éruption.
On croise de tout dans cette vallée. Trois générations suffisent à s'en rendre compte. Des hommes honnêtes, brillants, d'autres lâches. Certains se réfugient en eux pour fuir leur peine, d'autres mentent.
Il existe également des monstres, des êtres abominables pour lesquels la morale n'est rien. Des putains, des alcooliques, et une femme qui semble à peine humaine. Les pêchés s'invitent en Eden, l'histoire de ces hommes dérive sur trois générations pour se perdre en de multiples directions.
Pour peu qu'on s'intéresse à leurs destins, on pourra avoir un aperçu de tous les tourments de l'âme humaine. Les rapports au père, qu'il soit exemplaire comme Samuel Hamilton, perfide et manipulateur comme Cyrus Trask, ou lâche et amorphe comme Adam Trask, ceux tout aussi compliqués à la mère ou à son absence. On pourra entrapercevoir la violence du deuil, de la perte d'êtres chers, la complexité de rapports fraternels. En continuant à regarder, on verra la difficulté de trouver sa voie, les atermoiements de l'adolescence, la dureté du travail de la terre, mais aussi des affaires. On appréhendera les changements du début du XXe siècle, l'industrialisation, l'exode rural, la guerre, mais aussi les affres de l'immigration pour Lee le Chinois et Samuel Hamilton l'Irlandais, ainsi que pour Adam Trask le gars du Connecticut. Cette vallée, c'est un carrefour, un refuge pour des hommes perdus, venant du monde entier. Ici, dans ce coin de verdure hors de portée du monde, ils reconstruisent une société ensemble.
Au-delà de l'évolution de la société, la vallée de la Salinas nous exposera aussi les tourments de l'âme humaine. Trahison, amour, manipulation, amitié, franchise, tout y est. Le désespoir, la lutte, l'espoir, l'abandon prendront une toute autre dimension au coeur des tragédies familiales des Trask et des Hamilton.
A échelle humaine, la vallée de la Salinas évoque l'histoire de la vie. Philosophie et humanité, magnifiés par Lee et Samuel Hamilton, emportent les tourbillons émanant de cette multitude de caractères, de l'âpreté de leurs destins. Que ce soit Cathy Trask, Cal et Aron, Tom Hamilton ou les autres, leurs erreurs les hanteront, la vie ne les épargnera pas. Pourtant, au cours de cette fresque, c'est une plongée inoubliable au coeur de la Salinas, dans l'Amérique du début du XXe siècle. Et plus que ça, c'est une plongée dans l'âme humaine, ses défauts, ses problèmes et ses magnificences. Un aperçu du pire et du plus beau, un portrait de l'Homme avec un grand H, universel et intemporel.
Tout ça, on peut le voir en regardant la vallée de la Salinas.
C'est une vallée baignée de soleil, perdue quelque part dans le nord de la Californie. Un havre de paix qui échappe à la vue des Dieux qui l'ont créé.
Centré par la Salinas, fleuve porteur de vie, encadré par des montagnes, c'est un jardin fertile, une contrée verdoyante, un paradis terrestre. Un jardin d'Eden sur Terre.
Et pour peu qu'on regarde de loin, on verra seulement quelques hommes qui s'agitent. La nature, elle, observe, immobile. Le temps n'a pas d'emprise sur elle. Alors, devant cette insignifiance, cette impuissance, que faire ? Abandonner, lutter ? Ou se dire qu'il y a de l'espoir. Un espoir résumé en un mot, une preuve de la capacité de l'Homme à prendre en main son histoire, à se rire de la destinée et des chemins tracés.
Timshel.
Tu peux.