À la gloire du courage

Un court et mignon petit livre adapté pour la tranche d'âge à laquelle elle s'adresse. Un récit de guerre parmi tant d'autres expliqué et construit pour le très jeune public autant que pour les plus anciens. 

Robert, Adam, Georgette et Léon sont des écoliers qui après l'exposition d'une affiche ou un soldat de seize ans nommé Jean Corentin Carré apparaît triomphant presque invincible, ont pour soudaine ambition de partir eux-mêmes sur le front pour se battre au nom de la France mais aussi pour partir à la recherche d'un certain Raymond Rajeot le père de deux des quatre protagonistes.
Bien évidemment qu'ici les détails sont infantilisés, la crédibilité n'est pas forcément au rendez-vous mais la trame suit son cours et la fluidité narrative est plutôt bonne. En se mettant à la place d'un auteur nous nous rendons compte que ce n'est pas si évident de parler de sujets graves à un public mineur. Un beau défi donc que d'écrire une histoire accessible en montrant tout de même les sombres et sordides aspects que reflète forcément une guerre d'ordre mondiale. L'historiette à laquelle nous avons à faire est bien concise, l'agencements des phrases sont simples et les enchaînements d'actions efficaces.Peu importe donc l'âge du lecteur, il est rentable pour l'esprit avide de culture de donner de son temps à la lecture de ses cent-vingt six pages. 

SPOIL 

C'est vraiment étrange que le maître d'école Monsieur Ritter se soit amusé à espionner la bande jusqu'au champ de bataille tout de même. Je pensais que le métier d'éducateur demandait un temps de travail assez conséquent. Je ne savais pas qu'on pouvait avoir le temps, entre la préparation des prochains cours ou la corrections des dictées et autres évaluations, de fliquer des têtes brûlés que sont la quatuor enfantin. L'instituteur passe donc plus pour un investigateur, un indic, que pour un enseignant. On va dire qu'il fallait ajouter du piment à la structure livresque.Les phrases dans ce bouquin sont accompagnées par de belles illustrations orchestrées par Jérôme Brasseur. Et dans deux d'entre elles se trouve un homme moustachu vulgairement planqué derrière des objets de l'environnement dessiné, le fameux éducateur qui aime lui aussi à risquer sa vie en parcourant les terres françaises jusqu'à atteindre les plus dangereuses d'entres-elles ... Les quelques personnages qui croisent la route des enfants sont, pour la plupart, extrêmement conciliants en acceptant de répondre à la requête des petits aventuriers. Si on tenait vraiment à leur sécurité on les abriterait d'office sans questionnement ! Mais non a la place on les mène tout droit au cœur du danger, vers un champ de bataille. Et c'est après ses comportements extrêmement imprudents où nous faisons face à un petit passage fort intéressant. Celui de la désillusion des gamins qui, une fois en zone de guerre, ne reconnaissent pas l'idéalisme héroïque observé dans les journaux, placardés sur les affiches. Un des moments les plus mémorables de tout le récit. 

Dans ce style de livre, le happy ending est obligatoire bien-sûr car dans les mœurs, les mineurs se doivent d'être tenu à l'écart de l'âpreté de la vie et de la noirceur que cache l'homme soumis aux terribles affrontements nécessaires quant à leur propre survie (le conflit armé dans le cas présent). Ce qui n'empêche nullement l'intérêt que l'on peut porter envers cette œuvre fictionnelle destinée aux plus jeunes d'entre-nous. La découvrir à l'âge adulte, "mature" comme on dit, est une expérience particulière car l'on remarque de suite à quel point, dans la création littéraire, certaines situations sont naïvement construites. Alors que dans la vraie vie la moindre d'entre elles peut devenir un casse-tête complexe et délicat à gérer et seul un esprit courageux, immuable et terre à terre est éligible à la possible résolution de celui-ci. Mais l'art en soi n'est-il pas à l'antipode du réalisme ?