De la petite série de récits de voyages que j'ai lus, celui-ci sort son épingle du jeu. Contrairement à la majorité de récits d'aventures qui prônent en premier lieu l'exploit physique, ce livre est avant tout un éloge du couple et de sa capacité à tenir face aux épreuves.


Alexandre et Sonia sont partis marcher sur les Pas de l'Homme durant 3 ans, du Cap de Bonne Espérance jusqu'à Jérusalem. Démunis de tout, avec sur leur dos en tout et pour tout un petit sac de 5 à 8 kilos, ils comptent sur la solidarité de leurs hôtes pour trouver où dormir le soir. Leur unique exigence consiste à ne pas utiliser d'autre moyen de locomotion pour avancer, mais seulement marcher d'une manière naturelle, spontanée et "lente". Un retour aux sources en quelques sortes, qui se marie idéalement avec leur désir de rencontrer et interviewer en chemin archéologues, historiens, anthropologues, qui leur en apprendront davantage sur les origines de l'espèce humaine et les migrations qu'elle a connu sur le continent africain.


Paradoxalement, aussi naturelle ait été leur progression, exploit physique il y a. Et même nouveau record enregistré lorsqu'il atteignent le sommet du Kilimandjaro, car jusqu'alors personne n'avait relié à pieds le point le plus austral du continent africain et son point le plus haut en altitude. A ce moment-là ils ne sont qu'à la moitié de leur périple, et c'est cette partie que relate ce premier tome d'Africa Trek.


Ce qui m'a beaucoup plus dans ce récit, c'est l'idée qu'Alexandre et Sonia aient pris un risque énorme en n'embarquant avec eux qu'un sac de 5 à 8 kilos chacun (au bout de quelques mois et plusieurs nuits à dormir sous la pluie au milieu de nulle part, ils font tout de même l'acquisition d'une tente et de tapis de sol...). Ainsi ils ont préféré mettre en avant cet esprit de marche libre et "légère", façon MUL, contrairement à quelques prédécesseurs qui se sont chargés de sacs de plusieurs dizaines de kilos à s'en casser le dos, ou d'autres qui se sont fais suivre tout du long par une voiture-balai en dormant le soir dans des hôtels de luxe... Le voyage perd de son sens lorsqu'il est encombré de tout ce débarras censé apporter confort et sécurité. Les quelques paires de chaussures qui auront été nécessaires à Sonia et Alexandre sont des cadeaux de leurs hôtes admirateurs.


Alexandre aime sa femme Sonia. Au bout de quelques chapitres on en est persuadés tant il en fait son éloge. Très touchant au début, je comprendrais qu'on s'en lasse par la suite. Mais tout de même, en regard de ce qu'ils traversent, rappeler à quel point cet amour est important pour lui est sûrement la preuve qu'il est la source et la force de ce voyage. S'ils sont bons marcheurs, il faut bien plus qu'une bonne condition physique à Alexandre et Sonia pour accomplir ce périple au long court. Pas de record de vitesse ici ! 16 à 50 kilomètres par jour, avec de réguliers séjours pour se remettre d'aplomb, profiter des lieux, découvrir de nouvelles personnes et cultures, interviewer,... Ce que ressentent Alexandre et Sonia l'un pour l'autre a fait le succès de ce projet. La preuve que pour accomplir un voyage au long court, en milieu parfois dangereux, une carrière militaire et de gros biceps ne sont pas forcément nécessaires...


Si j'ai beaucoup apprécié les récits de Mike Horn (pour n'en citer qu'un) pour cet aspect extrême et solitaire à tous points de vue (physique, climatique, géographique, social), j'entrevois dans le récit des Poussins une nouvelle fenêtre pour le récit de voyage. Quelque chose peut-être d'un peu moins impressionnant mais certainement un peu plus humain. Là où j'ai ressenti un certain soulagement en finissant "Latitude Zéro" et "Conquérant de l'impossible", c'est avec sérénité qu'on lit du début à la fin le récit d'Africa Trek.

Pascal_Allegre
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le 1 nov. 2019

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