Je lis beaucoup, depuis toujours, de tout, mais rarement des choses que je n'aime pas. Si le contenu d'un livre ou même d'un article ne me plaît pas ; non pas le sujet traité, mais la façon dont il est rédigé ; je m'en aperçois vite et je ne poursuis pas. La lecture doit me procurer un minimum de satisfaction. Ainsi, en général, j'en arrive à aimer ce que j'ai lu. Il y a bien des exceptions, mais souvent, c'est parce que je revois mon jugement a posteriori ; au moment de la lecture, je dois y trouver assez de plaisir pour poursuivre. Pourtant j'ai terminé celui-ci. L'entreprise fut assez pénible, mais je l'ai menée jusqu'à son terme parce que depuis un certain temps je me suis lancé dans la lecture de polars ou de thrillers dont une adaptation en film avait été tirée pour enchaîner ensuite avec le visionnage de celui-ci. Jusqu'à présent, je m'en suis trouvé content, mais maintenant j'appréhende de voir « Avant d'aller dormir » sur un écran. Devoir me farcir une telle daube me procure une certaine dose d'anxiété, ce qui est censé d'ailleurs être l'effet provoqué par un thriller, mais là, ce n'est pas le contenu qui en est la cause.

Au vu de la platitude de l'ouvrage, je me suis demandé s'il n'avait pas été rédigé par un robot. J'ai lu quelque part qu'une intelligence artificielle était capable de nos jours d'écrire un roman. La rédaction n'est qu'une succession de clichés narratifs, de lieux communs descriptifs et de stéréotypes de situation. J'avais commencé à corner quelques pages pour les relever, mais il y en avait trop. En fait, il n'y a que cela, à toutes les pages. Pas une fois je n'ai trouvé une tentative de décrire un lieu ou des personnages par la bande, de façon imagée ou évocatrice, autre chose qu'une restitution brute et sans relief. Des nuages qui s'amoncèlent ; des parents qui se promènent dans un parc avec leur landau ; des fêtes d'ados où on fume des joints ; des patients psychiatrisés avec le regard vide ; une assiette qui se casse et sur laquelle on se coupe, le lieu du drame, Brighton, lieu de destination obligé des séjours linguistigues, qui ne laisse pas de doute dès que le Pier est décrit ; la demande en mariage sur une colline à, attention, tenez vous bien, tatata, à Vérone. Ça n'arrête pas. La seule objection qu'un lecteur fûté pourrait me retourner, c'est que le personnage central ayant perdu la mémoire, il n'en avait pas assez de stock pour produire des allusions à faire vivre. Concéder à cette remarque m'obligerait à croire que cela a été fait exprès, mais même dans ce cas, qu'est-ce que c'est chiant. Je n'en croirais pas un mot, à mon avis, pour faire publier ce genre de chose qu'un éditeur avec un minimum de conscience professionnele devrait rejeter tout de suite, il a du y avoir du copinage.

L'intrigue est déjà assez tarte à la crème : une femme qui a totalement perdu la mémoire au delà de la nuit qui précède. Elle s'endort, elle oublie. Déjà, je me suis dit que son mal eut été moindre eut-elle été insomniaque, mais passons. Il eut été possible à partir de là de trouver une façon nouvelle de traiter le sujet. Non, l'auteur a choisi de s'engouffrer dans la pente la moins subtile. Il y a d'abord trois personnages principaux auxquels viennent participer plus tard d'autres, secondaires. Un de ceux-là est un psychiatre qui cherche absolument à soigner à coup de théories pseudo-scientifiques sur la mémoire, sans doute recueillies dans la rubrique psy de son hebdomadaire, cette patiente en laquelle plus personne ne voit de guérison possible. Les deux autres sont la femme amnésique et son mari dont on apprend très vite qu'elle ne peut pas lui faire confiance, elle l'a écrit dans le journal qu'elle tient en secret, mais à la connaissance de son psy, pour récupérer sa mémoire au jour le jour. En fait, le médecin se révèle aussi être un peu accessoire, c'est dommage, je l'aurais bien vu participer au « twist » qui est censé nous surprendre à la fin. Mais non, l'auteur s'est acharné à téléphoner son dénouement : il y a le mari douteux et la femme amnésique. Les possibilités sont réduites, on est vite spoilé après quelques pages du livre lui-même. Moi, j'ai été jusqu'à imaginer pour entretenir mon infime intérêt pour cette lecture que quelque chose de fantastique allait apparaître dans le récit, que ce n'était pas un thriller, mais de la SF. Une faille temporelle allait se révéler, ou un scénario à la Matrix, il fallait bien que je trouve une motivation pour continuer. Mais non, les quelques dernières pages furent un supplice, comme les derniers kilomètres d'un marathon qui paraissent interminables, quand j'avais compris qu'il ne pouvait rien arriver d'autre que ce qui était prévu.

Il paraît que ce livre a été un best seller. Des gens ont aimé. Je pense qu'ils devraient envisager une autre activité que la lecture : le vélo, le jardinage ou, s'ils n'aiment pas sortir, la télé. Ça peut être bien la télé, il y a même des pubs qui sont plus divertissantes et instructives que ce truc que je viens de lire. Quant à l'intérêt qu'il a suscité auprès de producteurs pour en faire une adaptation, c'est comme pour l'édition, il a du y avoir du copinage.

Brahim-Ski
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le 23 sept. 2022

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Brahim-Ski

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